20.2.10

Novembre 1944

1 + 2°. Pluie. Je m’approche de la Sainte Table. Kiki fait la quête à la petite messe ce qui l’amuse beaucoup. Nous attendions Hervé et Yvonne pour déjeuner, mais ils n’arrivent qu’à 3 h du soir, la jeep américaine ayant eu une panne en passant à Vichy. Ils ont avec eux un monsieur Canu, un ami qu’Hervé amène à Paris. Ils ont laissé Simone bien portante mais condamnée à rester un mois au lit. Hervé n’ayant pas touché sa solde depuis quelque temps, je lui donne quatre mille francs. Il ne demande rien à son père.

2 Pluie. Jour des morts. Malgré une pluie torrentielle, beaucoup de monde à la messe et au cimetière qui ressemble à un marécage. Ce temps me fait broyer du noir très noir.

3 + 2°. Premier vendredi du mois, je m’approche de la Sainte Table. St Hubert, assez triste j’écris à mon arrière petit fils pour lui souhaiter sa fête.

4 Je vais aux Queudres avec Marcelle et Yvonne.

5 – 0°. Dimanche. Geneviève et Antoine Clayeux viennent nous surprendre. Nous ne les avions pas vus depuis un an.

6 Pluie. Antoine va à Nevers et revient par le Chamouton. Le comité de libération de St Pierre dissout le conseil municipal de St Parize et Gilbert remplace Montrichard comme Maire. Antoine m’achète un veau de Callot et un à Moreau pour 18 000, son plus petit. Il lui en fait un de ses plus gros cent mille. Il nous quitte après déjeuner et nous laisse sa mère 4 jours.

7 Pluie glaciale. L’herbe disparaît et les animaux couchent dans l’eau le ventre vide. C’est désolant, je me morfonds.

8 Neige. Moreau emmène Geneviève, Cécile, Kiki et Monique déjeuner au Colombier. Marcelle et Yvonne les y rejoignent à bicyclette dans l’après midi. Une des granges dont la toiture avait été refaite il y a peu d’années, s’est effondrée. Coût cent mille francs et fourrages endommagés

9 …

10 Neige. C’est le mois des surprises. A 11 h une auto conduite par Monsieur Mathieu de Bulhon s’en allant à Paris, nous amène Miette qui est très en forme. Geneviève et Cécile prennent le train de 9 h 15 à Mars pour aller retrouver les Edmond à Moulins et déjeuner avec eux à l’hôtel de Paris. Geneviève rentre aux Fougis.

11 St. Martin. Service à l’église, commémoration de l’armistice. Au cimetière, Montrichard fait encore l’appel des morts. Mes enfants me souhaitent ma fête et Miette fait un bon gâteau en cet honneur.

12 St René. Dimanche. Personne à la messe, dite avec catafalque, Dies Irae, absoute pour réparation des capitaux qui devaient servir pour dire des messes et qui ont été volés par l’Etat. Koutchi déjeune avec nous.

13 Pluie torrentielle. L’eau sort de la basse cour comme d’une écluse. Les Château viennent me payer leur terme sur le pied de 256 F le kilo. Gilbert devient notre maire, Jouannet adjoint et Drut garde champêtre. Ce trio est grotesque et dangereux.

14 Pluie aussi torrentielle qu’hier. Malgré cela Melle de Maubec vient chercher Cécile avec sa charrette pour la conduire prendre le train à Nevers. Elles déjeunent ensembles à 11h ½ . Yvonne les accompagne. Temps épouvantable et froid. Malgré cela, Cécile arrive assez tôt pour avoir une place debout direction de Paris. A 4 h ½ Maubec revient, un peu gelée. Nous lui offrons un verre de vin chaud. Montrichard espérant encore trouver Cécile ici, nous arrive. Il voulait lui recommander son beau frère de Guébriant transféré à la prison de Rennes.

15 Longue lettre de Roger qui me dit que deux jeunes Darré se sont engagés, qu’un troisième entre à l’abbaye de Solesme. Candolle a son château envahi par 200 apprentis soldats. La Duchesse de Duras emprunte l’âne d’un voisin quand elle veut sortir de son château de Chatelux. Marcelle, Miette et Monique font des visites au Manoir, à Fontallier et à Buy. Je donne à Dufour l’autorisation de visiter la coupe que je veux vendre à Azy. Faguet vient avec sa voiture à âne chercher du bois de chauffage que je donne à la mère Richard.

16 Marcelle et Miette vont à Nevers et reviennent part Port Gadouille, c’est ainsi qu’on appelle la gare qui est au bout du viaduc. Cécile a eu une place assise pour aller à Paris. Elle y restera pendant 4 jours pour attendre son billet pour Rennes.

17 Jean écrit à sa femme que son cousin Bruno de Valence comme lui capitaine d’artillerie et dans son voisinage a été tué en passant sur une mine avec son auto. En 1940, son père était mort au front. M. Mathieu et sa fille venant de Paris en auto, s’arrêtent ici pour déjeuner, ils repartent pour Bulhon en emmenant Miette, Yvonne, Kiki et Monique qui ne se sentent pas de joie.

18 Je fais faire à Marcelle les comptes de St Martin des Petites Granges. Le journal du Centre annonce que ce domaine cherche un fermier pour 1945 de même que le Pied Prot. Beau temps.

19 Dimanche. Je règle avec Roy en cinq minutes. D’avance, je donne à mes métayers, le compte écrit de toute l’année. Si nous sommes d’accord, ils me les rapportent et je les paye. Notre compatriote le général Marion que le regretté Maréchal avait nommé préfet de Savoie, a été emprisonné par les communistes. Une bande de 20 jeunes armés sont entrés dans la prison et malgré les gardiens l’ont emmené et fusillé séance tenante. Richard du moulin vient me demander à louer les Petites Granges. Il a donc bien gagné d’argent en faisant le métier de roulier dans sa petite ferme. Gy à Morizot vient d’être affermé 108 hectares, 1200 kilos de bœuf 1re qualité et 73 quintaux de blé.

20 Tempête.

21 Beau temps. Visite de deux agents de la Sté Gle qui font souscrire à l’emprunt. Marcelle en prend.

22 Pluie. Ste Cécile. Ma fille a fait un bon retour à Rennes, mais elle a mis 5 jours pour regagner son domicile où elle a trouvé son personnel à son poste. Elle est rentrée dans son wagon par la fenêtre grâce à l’aide d’un Saint-Cyrien et d’un F.F.I. tellement le couloir était plein. Les Rouville l’ont reçue bien aimablement à Paris. Elle a déjeuné chez les Louis de La Brosse. Jacques a été emprisonné pendant 3 semaines puis relâché. A qui le tour. Le Mollier gendre d’Eustache, est condamné à 5 ans de réclusion pour avoir assassiné son père qui devait passer en correctionnelle pour attentat aux mœurs. Marcelle va à Limoux goûter, retour par la Chasseigne. Les Raclettes, 90 hectares, sont affermées. Les prés de bonne qualité, 20 kg de bœuf de première qualité par hectares. Les terres médiocres 60 kg de blé à l’hectare. Boucaumont régisseur. Limoux vient d’être reloué à Thomas 2/3 en prés, 1/3 en terre 23 kg de bœuf à l’hectare.

23 Tempête pluie. Lettre de Gabrielle de Rouville qui dit que Jacques est toujours surveillé pour avoir donné son adhésion pour assister à des réunions politiques où il n’est jamais allé. On gèle à Paris et pour venir chercher du bois dans la Nièvre, un camion leur demande 36 F du kilomètre. Il coûterait donc plus de trente mille francs. Dufour est allé visiter ma coupe d’Azy, 8 hectares. Il m’en offre 67 000 F, j’en veux plus cher que cela. Il n’estime les cordes de charbon que cent francs. Ce n’est pas suffisant. Clostre qui les prendrait insiste pour les avoir. Dufour ne garderait que la futaie. J’attendrai pour traiter que le calme revienne si c’est possible.

24 Pluie. Je visite le cheptel de Callot qui n’est pas brillant, le manque d’herbe se fait sentir. A 4 ½ je descends à la gare avec mon âne. J’en ramène, retour de Bulhon, Yvonne et ses filles accompagnée de Dédette qui vient nous faire une petite visite. Simone rentre à Moulins. J’achète un très bon veau à Roussy Le Sueur.

25 Pluie. Ste Catherine. Dédette la coiffe ainsi que Paule de Villaine. Marcelle et Dédette vont à Nevers, elles y apprennent qu’on a retrouvé le corps de Jean de Sansal dans les bois de Beaumont. On l’enterrera dans un cimetière militaire à Prémery le 28.

26 Dimanche. Je donne du bois à couper dans les Queudres, angle Nord Est sur la route à 18 hommes de Moiry. Ils me payent 15 F chacun = 270.

27 Neige. Yvonne crève sa bicyclette à Moiry, elle veut la faire réparer chez Asselineau, qui lui dit d’aller trouver les gardes du S.H.C. pour faire la réparation, se souvenant qu’ils avaient fait un procès à son père pour avoir tendu des collets. Il aspire au moment où il pourra m’en mettre un au cou.

28 Pluie. Dufour et Clostre viennent m’acheter une coupe à Azy. 8 ha avec sortie difficile et un hectare inférieur pour 85 000 F. Je ne sais pas si j’aurai pu faire mieux par les temps troublés que nous vivons et avec les exigences actuelles des bucherons syndiqués et communistes. Lettre de Cécile. Ses deux bonnes la quittent pour aller se placer à Paris gagner 24 000 F.

29 Les Guillaume du Verne nous arrivent pour 48 h avec leur cheval qui est jeune mais pas rapide. Il a mis 3 heures pour faire la route. Guillaume que je n’avais pas vu depuis son accident commence à marcher. Il est encore maire de St Eloi.

30 Yvonne et Dédette déjeunent à Buy et nous gibernons avec les du Verne jusqu’à 11 h du soir.

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