27.2.10

Avril 1945

1 Pâques. Messe de communion des hommes. 81 scouts remplissent le chœur et répondent aux prières. Les pauvres enfants doivent geler car ils sont nus bras, nues jambes et en chemise, mais le moral a l’air parfait. Kiki s’approche comme moi de la Sainte Table, de même que Jeannot le fils de mon jardinier qui a 9 ans et qui n’a pas l’air de savoir ce qu’il fait. Guite Le Sueur invitée par Dédette, vient goûter et visiter le camp scout avec mes filles. Comédie à la mairie jouée par des jeunes gens de la commune. A 9 h bal chez Chapon. Tirage d’une loterie au profit des prisonniers. Vente aux enchères. Mon métayer Michel pousse un paquet de cigarettes jusqu’à 140 F.

2 + 14 °. Avance de l’heure. L’abbé des scouts arrivé cette nuit de Paris à Saincaize vient à pied. Il nous fait une visite. Nous lui offrons une chambre pour coucher, il accepte. Nous avons la visite des Maurice Robert et de leurs filles. Maurice me raconte quelle a été sa vie pendant ses trois mois de prison. On nous amène un scout malade. Marcelle le fait coucher dans la chambre au dessus de la sienne. Tout mon monde va après dîner voir le feu de camp des scouts sur le champ de foire et n’en revient qu’à 11 h ½ . Nombreuse assistance, feu d’artifice très applaudi.

3 Simone et Hubert viennent nous voir par le train. Il paraît que la succession de Mme Vuillemin, coutera six millions à ses deux enfants. Figaro m’apprend la mort de ma cousine Edmond Fouret, 58 avenue du bois de Boulogne. Les scouts vont et viennent par toute la maison. L’aumônier goûte avec mes filles et mon âne est mis à contribution. Gonin me rentre le bois du dépotoir. Jacques m’écrit que Bernard et lui ont vendu à leur oncle Louis leur part du domaine du Port des Bois, sur le pied de 20 000 F l’hectare.

4 Marcelle assiste à la messe dite en plein air dans le pré de la sablière et elle déjeune avec les scouts, menu délicieux. On nous amène un autre scout malade. Ma fille lui bassine un lit dans l’ancienne lingerie. A 4 h avec mon âne je vais visiter le camp. Je vois des tentes dans les Champs Blonds., dans le Champ de la Vache et dans le Champ procureur. La table du banquet est dans la forêt. Un troisième louveteau est malade. Je le ramène dans ma voiture et on l’installe dans la grande chambre.

5 Marcelle invite tous les scouts à goûter, ils arrivent à 4 heures, jouent et chantent devant le perron et font ensuite honneur aux gâteaux dont une partie a été envoyée par Mesdames Le Sueur et Barrière. M. le curé honore cette fête de sa présence ainsi que Madame Boursin et Melle Bure. Il paraît que Pierre Pellorce est encore de ce monde, il va donc hériter du Bassain. Nous avons à dîner l’aumônier et le président des groupes. M. Genthial, 23 ans, ingénieur électricien, d’une grande distinction et fort aimable.

6 1er vendredi. C’est sous le coup d’une délicieuse impression que j’écris ces lignes, après avoir entendu une messe en plein air, dite par l’aumônier des scouts devant la glace sans tain. Ceux-ci au nombre de 80 formaient le carré et chantaient d’une façon remarquable. Je ne m’attendais pas à recevoir un jour la Sainte Communion devant ma maison. Je rends grâce à Dieu d’avoir daigné nous honorer de sa visite. Après la messe un des chefs nous a fait les adieux de la meute dans des termes beaucoup trop flatteurs pour nous. La présence d’un soleil radieux, a bien contribué au succès de cette fête religieuse. L’aumônier et un scout dînent avec nous. A 9 h du soir, Gérard de Vassal de passage dans notre cuisine, mange ce qui restait de notre soupe.

7 C’est la larme à l’œil que Marcelle voit le camp se vider, car je crois que la présence des scouts a été pour elle, une agréable distraction et de son mieux elle s’est employée pour mettre du beurre sur leurs tartines et leur faire manger des fromages à la crème. Mme de Sansal, Simone et Edith qui est superbe passent la journée avec nous.

8 Gelée blanche. Dimanche. Je me sens tout patraque. Je lis ma messe au coin du feu. Gérard vient régler avec Marcelle les dépenses faites chez nous. Curriculum vitae d’Yvonne pendant la guerre. Octobre 39 à Bulhon, elle met Monique au monde à Clermont. Départ en avril 40 à Rennes jusqu’en juin. Bulhon jusqu’en janvier 41, Oudjda jusqu’en janvier 1942, Bulhon juillet 1942. En avril, Aliette naît à Clermont. Boutavent jusqu’à mars 1943, Tâches juin et juillet à Bulhon, Aout à Boutavent, septembre 43 à Tâches jusqu’en avril 45 sauf janvier et février à Boutavent ;

9 Charles Métairie meurt au château de Fonfaye. Marcelle et Yvonne vont au Lieu Normand voir Bringant qui a un ulcère à l’estomac. Son fils aîné qui a 24 ans est fiancé à une Michot qui a le même âge.

10 + 18° à 16 h. Le Dr. Piel qui est au même hôpital que Miette à Dijon, l’amène en auto à Nevers. Elle en profite pour venir passer 4 jours avec nous. Elle parle avec volubilité de ce qui se passe dans son hôpital où il y a 50 docteurs, 1200 malades 40 infirmières dont Madette de Féligonde qui est son agréable camarade de chambre. Le gestionnaire est mauvais, la nourriture aussi.

11 Montrichard déjeune avec nous pendant que sa femme est en Bretagne. La grippe court partout. Mon jardinier est au lit. Je scie le bois pour la cuisine. Le vétérinaire vient voir ma Normande qui a de la mammite. Miette a mal à la gorge. Pagueux a la fièvre.

12 Pluie chaude qui fait un bien énorme. Miette garde le lit avec mal à la gorge, ma jardinière en fait autant. Lettre de Louis de la Brosse, qui me charge de louer la chasse de 72 hectares de son domaine du Port des Bois en même temps que celle de mes filles. J’écris à Jeanne de Soultrait qui a des bois qui nous touchent pour savoir si elle se joindrait bien à nous pour les louer.

13 Vendredi. Le taxi de Magny vient à 4 h du matin prendre les Valence pour les conduire à Nevers prendre le train pour Paris où elles arriveront à 11 heures. Elles doivent déjeuner chez les Rouville, coucher chez les Monnier et prendre demain à 9 heures le train pour Rennes. Dédette nous arrive à 7 heures pour trouver Miette encore au lit avec violent mal de tête et 38° de fièvre.

14 Ce matin elle a 39 et Bonnichon surchargé de besogne ne vient pas la voir. Notre bonne part en congé, c’est bien commode. Heureusement Dédette est là pour nous aider, car nos jardiniers eux aussi sont malades et l’entretien du fourneau de la cuisine est une obsession. Il brûle une grande brouette de bois chaque jour et il faut que d’avance, il soit scié à 22 centimètres de long. Roosevelt est mort. Cela fait du bruit dans le monde entier. Antoine Clayeux fait tuer son 65 ème sanglier comme louvetier et le donne à la Kermesse Bal organisée à Thionne en faveur des prisonniers. Il est vendu aux enchères américaines et adjugé à 40 000 F. Bonnichon vient voir Miette qui a une angine rouge sans gravité. Mère Pierdet nous donne 4 heures.

15 Dimanche. Bien peu de monde à la messe, malgré le beau temps (+20 °). Miette descend un peu au soleil, mais sa mine n’est pas brillante.

16 Elle reprend une température normale et déjeune avec nous. Guite Jourdier met au monde une fille et Simone a la roséole. Dépèche de Cécile – filles bien arrivées à Rennes- Je m’en réjouis car ce voyage me troublait. Mon rosaire que j’oublie.

17 Miette qui n’a pas une mine encore bien brillante prend le car pour Nevers, d’où elle doit aller dîner et coucher à la Belouze. Demain, madame Boisson de Prémery ira l’y chercher pour la conduire à Dijon dans son auto. J’écris à Cécile.

18 Miette téléphone de chez madame Boisson chez qui elle déjeune qu’elle ne va pas trop mal. Les Tourraud Faulqier nous font part du mariage de leur fille Claude avec Olivier Aymé. Marcelle et Dédette goûtent au manoir. Renaud emmène le veau de la Normande, 6 semaines, 118 kilos à 25 F = 2950. Vent trop chaud et déssechant. M. Brocq, entrepreneur rue Louis Vicat à Nevers me demande à prendre du moellon dans ma carrière. J’y consens au prix de 20 f le m3 une fois extrait par lui.

19 Dédette nous quitte. Je la conduis au train de 7 heures du soir à Mars. Je vois l’aîné des Fleury retour de captivité. Il n’a pas trop souffert étant dans une ferme. Il dit que là bas les actions d’Hitler ont bien baissé et que bien des villes ne sont plus que des ruines.

20 Vendredi. Jusqu’à ce jour, le gouvernement faisait des sacrifices pour que le kilo de pain ne soit payé que 4,80 F. Il supprime sa générosité et à Nevers, le kilo de pain coûtera 7 francs. J’en tiendrai compte à mon jardinier pour sa consommation familiale. D’Angers, Geneviève Clayeux nous apprend les fiançailles d’Edgar de Chargères avec Melle Guinel, fille d’un industriel, charmante personne sous tous les rapports, 25 ans, famille honorable, grosse fortune, mariage le 2 juin à la campagne. Roger de Bouillé prépare une liste pour le conseil municipal.

21 Suzanne Le Sueur, vient manger avec nous le ris de mon veau Normand ;

22 Dimanche. Vent glacial qui nous promet de la famine. Visite d’Antoine Chenut. A Vendôme, même sécheresse. Je fais la connaissance de notre nouvelle directrice de la Poste. Elle ressemble à une sœur sécularisée. Son mari est menuisier. Il prend l’atelier de Berger.

23 Marcelle passe par Fontallier en allant à Livry voir la nouvelle présidente de LPFF. J’ai la visite de Boibien, Huissier Greffier à Saint Pierre, venu pour s’entendre avec moi au sujet de Michel. Cheveux .

24 Je coupe les branches gelées des lauriers et je donne 7 000 F à Lavergne pour ne pas avoir fait grand-chose.

25 Maurice Jourdier a été blessé et décoré de la Médaille militaire par le Général de Larminat. Il est hospitalisé à Saintes. Le jeune d’Aunay est fiancé à la seconde fille des P. du Verne. Saint Marc ne nous donne pas le changement de temps désiré.

26 Pluie. Alain de Villenaut fait part de la mort accidentelle de leur fils âgé de 20 ans. Le Marquis de Chargères annonce par un imprimé les fiançailles de son fils avec Melle Guinel. La Marquise ne m’écrit pas, c’est qu’elle n’est pas contente. Il n’y a pas assez de quartier de noblesse dans la partie adverse. Paul du Verne me fait part des fiançailles de sa fille Renée avec l’aspirant d’Aunay, fils du bon ami d’Augustin. Marcelle va à Nevers. Elle en revient tard fatiguée par sa bicyclette. Foire à Saint Pierre, où les petits cochons se vendent 200 F le kilo. Mon jardinier en achète un à Callot pesant 17 kilos. Je ne lui fais payer que 1700 Francs, un autre de la même portée coûte 4 000, c’est fou !

27 Martinat vient couper la queue à une pouliche de Callot qui a un an. Une fille mère de Saint Parize vient nous couler une lessive. Je rallume du feu.

28 Pluie. Samedi. J’écris à Guiguite de Villeneuve, elle nous écrit que la sécheresse est terrible à Angers. Marcelle me fait de la bonne cuisine, comme nos deux vaches sont fraîches de lait on a du beurre.

29 Neige. Dimanche. Beaucoup plus de monde à la mairie pour voter qu’à l’église pour prier le Bon Dieu. Dubost me téléphone que Boibien a pu faire signer à Michel la pièce qu’il voulait, j’en suis bien aise. 8 conseillers sont nommés, 7 de la liste Gilbert et 1 conservateur Martinat. Il manque une voix à Roger de Bouillé pour être élu, c’est dommage. Somme toute nous allons à gauche.

30 Il neige et le froid glacial fait perdre ce que la pluie nous a apporté de bon. J’écris à Yvonne et à Edmond. Guillaume est en ballotage à St Eloi. Toute la journée, il passe des avions de je ne sais quelle nationalité. La fille mère Billat vient avec son nourrisson de 14 mois garder notre cuisine et faire la vaisselle. Melle Tissier dîne avec nous.

4 commentaires:

H2R a dit…

6 millions de 1945 représente tout de même 720 000 euros 2009 !!!

Geoffroy a dit…

"Edith qui est superbe!"
J'espère que vous êtes flattée Tte Edith.
Je vs embrasse

EDITH a dit…

Cela n'a pas changé, n'est-ce pas ???

Unknown a dit…

A peine signe tôune