1. Déjeuner à Buy avec les Thonier et Le Sueur. Visite à Beaumont, où nous sommes reçus par Monsieur Ratheau, sa femme est souffrante, il me fait voir ses chevaux de selle qu’il monte avec ses petits enfants, et un vieux taureau, origine Gaby dont il a refusé cinquante mille francs l’année dernière.
Les Donjon de Saint Martin me font part des fiançailles de leur fille Anne avec le Lieutenant Antoine de la Croix Vaubois, 17ème artillerie, voilà un artilleur que je ne plains pas, il épouse une jolie et agréable femme.
2. Pluie trop importante, impossible de terminer la moisson, les grains vont germer sur terre. Ma sœur qui devait nous arriver ce matin par l’autobus a reculé devant le temps, mais elle débarque par celui de six heures du soir.
4. Au retour d’un service chanté à Saint-Parize pour Mouche de Montrichard, nous trouvons Cécile et sa fille arrivant de Rennes en auto après avoir couché à Angers et à Vatan Indre, sans accrocs.
5. Marguerite retourne à Nevers. Brouillards. Les gens de la campagne les accusent de tous les méfaits ! Il y a une chose certaine, c’est que dans le jardin où les haricots, les pommes de terre et la vigne étaient superbes au beau matin tout est devenu noir. Voisin prétend que les deux jours de brouillard qui se sont suivis la semaine dernière en sont seuls la cause. Qui le sait ? Mariage de la Bretonne.
6. Pluie.
8. Pluie. Mesdames Grincour déjeunent avec nous ainsi que les M.M. de Buy, Marie-Thérèse ne les accompagne pas ayant eu une crise de foie la nuit précédente. A une heure on annonce le Bridge qui dure jusqu’au départ des dames de Fontallier. A trois heures et demie, les Paul Tiersonnier arrivent en visite, on reprend les cartes jusqu’à six heures. Henri est infatigable sans pour cela faire des progrès. Jumilhac a du faire un trou dans la lune, car Brezé son beau-père fait abattre la futaie dans les taillis de tout âge de sa propriété de Beaudreuil. C’est une maladie qui sévit dans ce pays ci.
9. Bridge à la Grâce avec les Lunyt, Monsieur s’est rasé et ressemble à Paul Bonecourt le socialiste, Madame toujours fraiche, désolée d’avoir fait couper ses cheveux les laisse repousser, avec eux les Marcy, Beaumenil et du Verne de la Baratte. Yvonne prend quarante poissons rouges avec Jean-François.
10. Déjeuner à la Belouze où nous emmenons Anne Marie de Rigny, bonne cuisine comme toujours, le Comte vieillit, il ne nous accompagne pas, Villaines et moi dans la visite du bétail. Son gendre me montre dix-huit belles vaches suivies d’autant de veaux, les génisses sont très supérieures à leurs frères. Je vois aussi le taureau acheté quinze mille francs l’année dernière à la vente Besson, très défectueux dans sa tête, somme toute la ferme est menée d’une façon intelligente et doit rapporter. En passant à la Grange Quarteau je m’aperçois que la moisson n’est pas terminée et que ce qui est en tuziaux germe et que les pailles sont noires. Dans la vallée de Nièvre les foins sont loin d’être finis, c’est lamentable ! En rentrant je regarde dans le pré de la Joie trois veaux de Callot qui sont certainement meilleurs que ceux de la Belouze et que je vendrai moins chers, l’écurie n’étant pas cotée et non inscrite.
11. Pluie. Cécile nous emmène avec sa Renault déjeuner aux Gouttes, marche parfaite, soixante kilomètres à l’heure dans les bonnes routes. Je trouve qu’Edmond a moins bonne mine que son père qui ne prend pas un jour, il souffre de son exema que la station d’eau n’a pas guéri, il suit maintenant un régime ordonné par un médecin de Lyon.
12. Déjeuner à Bulhon, tout le monde en bonne santé y compris mémère Marthe, qui porte gaillardement ses quatre-vingt printemps, et mange comme quatre. Les enfants s’amusent bien, Yvonne monte à califourchon sur l’ânesse pendant que ses cousins la suivent ou la précèdent à bicyclette. Augustin me fait voir que leurs terres sont saturées d’eau et que l’on ne peut ni finir de lever la récolte ni labourer, il n’est pas satisfait de son métayer.
13. Déjeuner aux Fougis et retour à Tâches par un beau temps. Yvonne compte quatre-vingt-quinze automobiles croisées entre Moulins et Moiry, tout le monde se plaint mais tout le monde voyage.
14. Les Charles Tiersonnier avec les Lunyt et les Chavannes nous arrivent en même temps qu’Henri et Antoine, on dresse de suite trois tables de Bridge et on se bat pendant deux heures et demie.
15. Nous nous approchons tous de la Sainte Table. A neuf heures nous allons à Vespres, il n’y a que deux hommes, mon contemporain Tardy et moi. J’oubliais les M.M. de la Chassaigne qui sont dans leur banc dans le chœur, où on ne les voit pas, et où eux-mêmes ne voient rien et n’entendent pas davantage. En rentrant je prends mon bâton et je vais me promener au Paturail Masle où je ne trouve pas les animaux qui devraient y être, inspection faite de l’abreuvoir je constate qu’il n’y sont pas entrés depuis plusieurs jours, en faisant le tour du pré je m’aperçois qu’ils sont sortis à travers la haie le long de la vieille rue, je m’empresse d’aller à Callot où mon métayer Drouet me dit que depuis plusieurs jours il n’est pas allé visiter ses jeunesses au nombre de neuf. Je lui donne un sérieux abatage et lui intime l’ordre d’aller les chercher. Je suis fort mécontent de cet homme qui est très négligent. (retrouvés chez Arbaulti).
16. Marcelle va assister à la levée du corps de Madame Ossaye qui s’est éteinte à la suite d’une longue maladie. C’est une perte pour les bonnes œuvres de Nevers, dont elle était une des plus ferventes protectrices. Ma fille la regrettera bien à son ouvroir, dont elle s’occupait avec intelligence et dévouement, et lui donnait souvent de bons conseils.
Journée avec vent mais pas de pluie.
17. Nous avons à dîner Marguerite, les Louis et leurs enfants, ainsi que Solange Houdaille qui nous amène le ménage Jallot, qui est en séjour à la Châtellenie. Mes métayers finissent de couper les avoines, ils sont en retard de trois semaines à cause des pluies persistantes.
18. Pluie, orage. Cécile nous conduit au Mou, où je regarde les réparations aux toitures faites par Brunet du Guétin, il n’y a plus qu’à solder la douloureuse. Je recommande au fermier Favier de ne plus passer par l’avenue de Sully pour monter à son champ des Argougneaux car Monsieur Dubois s’est plaint à Augustin de la liberté que prenait ledit Favier de passer par ce chemin privé malgré ses remontrances. Nous passons par Nevers et la Baratte pour nous rendre à Sury où nous devons déjeuner à onze heures et demi mais comme dans cette excellente et retardataire maison on est toujours à l’ancienne heure, c’est à midi et demie que l’on se met à table. Nous étions convoqués pour pécher l’écrevisse mais grâce au mauvais temps nous nous sommes contentés de faire un Bridge, peu intéressant du reste car M. T. de Vannoise joue comme un enfant. Pendant ce temps Yvonne faisait le tour de la pelouze à cheval sur l’ânesse.
19. Pluie. Bernard de La Brosse nous amène Odette et Hubert dans sa Bugatti en quatorze minutes de Nevers. Comme le temps menace je la lui fait remiser sous le porche de l’écurie, il débraye sans se mettre au point mort, et quand il laisse la pédale revenir à sa place, la voiture bondit et me casse une porte appuyée au mur. Arrivés en vitesse et à coups de freins, le sable de la cour est labouré. C’est beau la jeunesse mais combien imprudent ! Louis et Joséfa revenant de signer le bail de Tonay s’arrêtent en passant, nous avons aussi Madame de Lépinière et Roger de quoi faire deux tables de Bridge.
Collision d’auto au croisement des routes de la Bonnefer et de Dhéré entre le Docteur Robet et Roger de Bouillé, peu de mal humain, mais les véhicules sont en miettes. Celui du Docteur laisse trois roues à la bataille.
20. Dîner à Buy où nous assistons à l’arrivée d’une magnifique conduite intérieure Berliet qui vient en remplacer une de la même marque qui n’avait le frein que sur les roues arrières et dont la ligne était moins à la mode. On ne respire pas la misère chez mes cousins. A déjeuner nous avons eu André et ses trois plus jeunes filles, retour de Nevers où ils étaient allés faire une action de grâce près de la châsse de Bernadette.
21. Pluie. Trompette déjeune avec nous et très gentiment nous emmène mes filles et moi aux courses de Nevers, où il y avait une belle chambrée ( ?) et beaucoup de monde, surtout dans la tribune des fermiers.
23. Pluie. Déjeunons à la Châtellenie chez les Houdaille avec la Comtesse Servois et son fils, Madame Jallot et ses enfants qui sont des amours, la cuisine est bonne, plat de mousserons avec ris de veaux de premier ordre. Richebourg de marque. Bridge de trois à cinq heures. Au retour l’auto de Cécile s’arrête pile en face de l’avenue de Boisvert. Panne de Magneto. A pied je vais à Magny chercher le mécano qui heureusement peut réparer la pièce cassée et mes filles rentrent à huit heures et demie à Tâches.
24. Pluie. Déjeunons chez Marguerite avec Mesdemoiselles Magnard, leurs neveux et les Louis. Jacques retour d’Angleterre est un beau jeune homme mais par trop silencieux.
25. Pluie. Cécile me conduisait à la foire de Saint Pierre avec sa Renault, quand arrivés cent cinquante mètres avant Moiry la voiture fait une embardée à gauche, une autre à droite, et se couche mollement sur le côté de la route ; quatre-vingt-dix centimètres plus en avant nous capotions dans le pré de Gandat, grâce à Dieu, à Saint Christophe et à l’allure très lente à laquelle nous marchions, seule l’auto a du mal. Je suppose que nous étions partis avec le pneu gauche arrière dégonflé, et qu’en tournant il a du se déjanter. Sur la grande route j’ai trouvé Monsieur Guéraud qui m’a emmené à Saint Pierre d’où j’ai envoyé Paris chercher la voiture pour la réparer. J’avais des brebis grosses à la foire, personne ne me les a demandées, c’est à ne plus en envoyer à ce marché là, il vaut mieux aller à Sancoins où l’on trouve plus facilement des acheteurs. En fait d’acheteur, il y a deux italiens installés depuis peu à l’auberge à Saint Pierre et qui font des rafles sévères dans le pays, ils sont venus tantôt m’acheter ma vieille vache normande.
Les vieux Clayeux retournant de Villette aux Gouttes ont déjeuné avec nous en passant.
26. Par une belle matinée Edith nous amène ses enfants en auto. Augustin ne les a pas accompagnés, il est resté à Bulhon pour essayer de faire rentrer sa récolte.
27. Mes filles ayant invité quelques personnes à goûter nous avons l’honneur de recevoir la Comtesse douairière de Villeneuve Allix avec le ménage Charnacé et les Gaby, les Bacquencourt, les Massias, du Part, Chavanne, les Charles-Henri et Antoine Robert, Baronne de Rouville et Mademoiselle Magnard. Heureusement il faisait beau et ceux qui ne jouaient pas au Bridge ont pu se promener dans le jardin.
28. Les Edmond Clayeux nous viennent pour déjeuner. A quatre heures nous les emmenons goûter à la Grâce où nous retrouvons les Louis de La Brosse.
29. Pendant que les Edmond, Cécile et Edith vont goûter à Chevenon, Marcelle emmène ses neveux goûter au Banlay où ils retrouvent les Toytot, Boisselet, La Motte, Maumigny, Faverges, etc. Dreux fauche le regain de la pelouze, ce qui est chose rare.
30. Pendant que mes filles font des visites à Fricot, Fontallier et Buy, j’emmène mes petits enfants et Miss May aux étangs Américains où Monsieur Crotat a mis son bateau en pension, et pendant une heure nous canotons. Yvonne et Vé armés chacun d’une petite bêche s’en servent comme de rames et nous promènent dans tous les sens de la somptueuse pièce d’eau qui pour tout ce petit monde vaut bien le Lac Léman. En sortant du bateau Hervé était aussi mouillé que s’il eut pris un bien de siège tout habillé. Un jour prochain nous recommencerons cette fête qui a été une grande joie mais il ne faudrait pas laisser pratiquer ce sport par la seule jeunesse, car un fâcheux plongeon serait à craindre et à certains endroits l’eau est profonde.
31. Edith et Cécile conduisent les enfants goûter à la Garenne et reviennent par le Colombier. Madeleine Pradelle, fille de l’assistance se dispute avec la cuisinière et nous quitte sans crier gare. Nous avions cette mulâtresse depuis trois ans et ne la gardions simplement pour ne pas avoir à en chercher une autre, ce qui tous les jours devient de plus en plus difficile, mais elle ne savait rien faire et n’était pas susceptible d’apprendre.