30.10.10

OCTOBRE 1927

1. Mes filles déjeunent au Colombier où le journal Action Française est étalé sur la table du salon, Geneviève brave le courroux du Saint Père. Yvonne reste pour me tenir compagnie, et aussi pour m’accompagner à la chasse, cette chère petite est un vrai disciple de Saint Hubert.

Pommes de terre, j’en récolte 800,0 dans la Varenne et 400,0 dans le jardin, ma provision est assurée à moins qu’elles ne pourrissent ce qui est fréquent par cette année plus qu’humide.

2. Nous assistons à Decize aux Vespres chantées pour le bienheureux Gabriel Desprez de Roche, très beau sermon du Père Miel, chants superbes, trois évêques. Après la cérémonie religieuse, goûter à Brain où sont réunis une grande partie des parents du glorieux martyr, Noury, Pinet, Toytot, Tiersonnier, etc. Retour peu agréable, nos phares ne marchent pas, nous n’avons pour nous éclairer qu’une lanterne de bicyclette. Enfin grâce à Saint Christophe nous rentrons sans encombre.

3. Berthe et Marcelle font des visites aux curés de Mars, Langeron et Livry pour y fonder la ligue et prennent date pour des conférences en novembre. Pendant ce temps, déguisé en plâtrier, je blanchis la maison de mon garde et je peins portes et fenêtres.

4. Les Maurice Robert viennent très gentiment faire un Bridge de cinq à sept. Henri est à Angers où il est allé faire le lit du Tone qui rentre ce mois ci à l’école, où il le reconduira dans quelques jours.

5. Avec Marcelle nous poussons jusqu’au Rond de Bord pour y trouver la Vènerie Grincour, personne au rendez-vous, les sangliers sont, croit-on, aux Epinières, l’auto de M. Crotat m’y transporte et là l’équipage arrive, il est mieux homogène, les chiens ont pris du sang et de l’œil, ils sont plus frais que le patron, qui n’en peut mais, il est vrai que Mathilde est toujours jeune et sémillante. On foule pendant deux heures dans Feuilloux et le Crt Moine, pour n’y lancer qu’un renard.

6. Bridge à la Grâce avec les Buy et les Phulpin.

7. Geneviève Tiersonnier déjeune avec nous, avec elle nous voulions avoir les Lépinière et Guillaume du Verne qui n’ont pas pu venir de même que Gaspard de Soultrait mon contemporain. On enterre aujourd’hui Madame de Champeaux, mère de Bernard.

8. Foire de Nevers, c’est la débâcle, particulièrement pour les bovins. Déjeunons chez Marguerite avec Antoinette Jourdier et Guillaume, ce dernier rentre chez Renault après un congé de trois mois. Laissons notre batterie d’accus chez Rivaillon. On me dit que Favier fermier au Mou a acheté le domaine du Coudray quatre-vingt hectares environ pour la modeste somme de sept cent mille francs. Jusqu’à cette année il nous payait sept cent francs de fermage, il faisait certainement de meilleurs affaires que son propriétaire. Quand la maison de la rue de l’Oratoire sera à vendre il s’en rendra probablement acquéreur car il lui faudra bien un logement en ville. Il est vrai que jusqu’à présent contrairement à beaucoup de ses semblables il est d’une grande simplicité.

9. Fête de Jeanne d’Arc à Saint-Pierre, nous allons aux Vespres, je n’ai jamais vu autant de monde, nous entendons un magistral sermon de l’archevêque de Rouen Monseigneur de La Villerabel. Quatre évêques et un nombreux clergé honorent cette réunion de leur présence. Le doyen me fait mettre dans le banc d’œuvre. Dans la foule je trouve Madeleine de Pazzis, venue de Bruxelles, je ne dirai pas tout exprès.

10. Déjeuner succulent à Fri-cottage avec les Charles du Verne, d’Anchald, Ganay. Visite à Fontallier et à Buy. Henry est à Paris avec Tone, afin de faire voir le salon de l’auto à ce dernier.

12. Mariage de Suzanne Magnard avec le Baron Pierre de Rouville, très jolie cortège dans le parc de Fondevaux par un soleil radieux. La mariée est très à son avantage grâce aux artifices colorants les joues et les lèvres. Robes et dentelles superbes. Le chanoine Bond prononce un fort beau discours me dit-on car avec soixante-dix ou quatre-vingt personnes je n’ai pas pu pénétrer dans la chapelle, trop petite pour contenir toute l’assistance. Lunch assis dans toutes les pièces du rez de chaussée, le Clos-tour de Varzy et le Champagne coulaient à flots, et j’ai vu de petites jeunes filles qui sifflaient une coupe aussi vite qu’un jeune homme dans une figure de cotillon. Au retour nous passons par Fourchambault pour y prendre une femme de chambre, Marie-Louise Creach, dix-huit ans.

13. Foire primée de chevaux à Saint-Pierre-le-Moûtier, la qualité est médiocre et les affaires assez lentes. J’en ramène deux poulains mâles sans que personne ne me les ait demandés. Là comme ailleurs il y a du relâchement. Je trouve à Tâches MM de Pardieu et de Goy qui déjeunent avec nous ainsi que notre bon curé qui a la joie après midi de tuer sur la pelouze que son bon chien Cartouche a fait sortir d’un massif. A quatre heures les gens de Buy viennent faire un Bridge.

14. Comme distraction je peins les portes de la Garderie par un temps superbe. En huit jours le puits a baissé de deux mètres.

15. Les Faverges, Paule et Alice déjeunent avec nous, et avec Henri nous tuons six lapins dans l’après midi.

16. Geneviève et Antoine Clayeux nous font une petite visite en rentrant de Paris en auto. Ma nièce a acheté au salon une Citroën B14 pour vingt quatre mille francs ; son garagiste lui reprend sa vieille Renault pour onze mille francs.

18. Les Maurice Robert déjeunent avec nous ainsi que ma sœur. A trois heures les Tiersonnier et Chavanne arrivent pour faire un Bridge. Avant cela Maurice me conduit à Sornay où j’achète un jeune bélier Southdow à Gouzin qui a monté une bergerie très pure.

19. Déjeunons à Dornes avec les habitants de la Grâce et les Chavanne.

22. Très aimablement, Marguerite Pinet nous fait déjeuner avec les Toytot, nous dégustons un gigot sauce béarnaise qui comme le reste du repas est très à point. Concours d’automne, les fleurs sont moins belles que les années précédentes et les Charolais moins nombreux, les chevaux en revanche le sont davantage et je vois que l’on continue à primer en tête ceux qui sont le plus gros, ce n’est pas mon avis j’aime mieux le sang que la viande. Pluie à torrents au retour si bien qu’en arrivant j’étais dans un bain de siège. Nous perdons notre femme de chambre qui convenait cependant, mais elle s’ennuyait trop.

23. Notre excellent curé qui ne pense qu’au bien des âmes nous fait commencer une mission qui doit durer trois semaines, le prédicateur qu’il a fait venir pour la prêcher parle bien, mais un peu longuement à mon sens qui est celui d’un mauvais chrétien. A la grande messe il y avait pas mal de monde, à la réunion du soir qui était à six heures, onze hommes seulement.

25. Visite au Veuillin où nous trouvons Marie-Thérèse encore bien triste et dolente. Dîner à Nevers chez les Pardieu et après représentation de la Drac au Ciné-Parc.

26. Temps idéal, les Buy dînent avec nous et Bridgent jusqu’à onze heures, Henri en perd le sommeil, lui qui se couchait habituellement à neuf heures.

27. Foire de Saint-Pierre, c’est la débâcle sur les bovins qui perdent de huit cent francs à mille francs sur les cours d’il y a trois mois, j’avais trois veaux mâles dont je n’ai trouvé qu’un prix dérisoire. Cochons gras six francs quatre-vingt à sept francs, les nourrains huit francs le kilo. Thé Bridge chez Madame Le Sueur, avec les Thonier, les Buy, les Jean Olivier et le jeune ménage de La Vayssière. Madame est belle femme mais n’a pas l’air de causer beaucoup.

28. Modeste Bridge à la Grâce avec les Maurice Lunyt, ils ont une fille Paule qui est ravissante. Au retour, nous assistons à six heures et demie à l’exercice de la mission.

29. Les Guillaume du Verne déjeunent avec nous et ensuite chasse aux bassets (huit lapins, un lièvre).

30. Les Buy en nous apportant une épaule d’un chevreuil dont ils ont tué la paire dans leurs bois des Vertus que Maurice a acheté aux Donjon de Saint-Martin en même temps que Biere, restent faire un Bridge.

31. Taille de cheveux.

29.10.10

SEPTEMBRE 1927

2. Antoinette Jourdier avec Paul et Guillaume déjeunent avec nous. Ce dernier quitte momentanément l’usine Renault pour se reposer, il en a besoin. Avec eux nous avons les Louis de La Brosse et Marguerite. Armand de Montrichard prend une tasse de thé avec eux et fait un poker.

Depuis huit jours il fait beau.

3. Augustin arrive par Saint-Pierre où Edith va le chercher.

Pluie le soir et une partie de la nuit.

4. Pluie. Ouverture de la chasse. Il pleut une partie de la journée. A cinq heures je sors avec mes petites chiennes et Augustin qui manque trois lapins, j’en tue un.

5. Goûter d’enfants à la maison, Madame Talabot avec quatre filles, Madame de Montrichard avec Gaby, Mesdames de Faverges et de Vannoise sans enfants, Zizi Delamalle avec tous les siens, Madame Le Sueur avec Paulette. Heureusement il faisait beau et l’on a pu courir dans le jardin. Augustin rapporte deux perdrix, et dit qu’il en a peu vu autour de Callot. Visite à deux heures de Madame de Grincour et de Marie.

6. Marcelle va inutilement à Varry chercher une femme de chambre. Dans l’après-midi avec mes trois filles nous faisons une visite à Dornes où presque toute la famille est réunie. Dédé avec ses trois enfants, Nano a été reçue au bachot. Les Gaspard sont sur leur départ, ils ont un bel enfant et en attendent prochainement un autre. Laurent est parti hier pour Mecknès, aux chars d’assaut, il sera sous les ordres de Louis Clayeux. A sept heures du soir comme on allait sonner le dîner arrive en visite Madame Louis de Savigny.

9. Pluie. Pendant que les Riberolles et Cécile vont passer la journée à Maumigny, Marcelle et moi nous allons goûter à Cheugny où il y a nombreuse assistance et gâteaux excellents. Comme toujours, et c’est l’habitude idiote, on arrive très tard, autant de pris sur la partie de Bridge mais c’est plus chic. Il n’y a que les vieilles bêtes de mon espèce qui voudraient arriver à l’heure.

10. Les Riberolles me conduisent à Nevers pour la foire où les bovins se vendent fort mal, la viande ne baisse cependant pas chez le boucher, mais à Paris la consommation baisse parce que les ouvriers travaillent moins et on sent de la gêne un peu partout.

11. Pluie. Madame de Lépinière nous fait part de la naissance de Monique Guillemain d’Echon, arrivée un peu plus tôt qu’on ne l’attendait. Sa tante Suzanne qui devait soigner la mère et l’enfant est partie il y a deux jours en auto pour pèlerinage à Lourdes. Marcelle, Hervé et Miss May s’embarquent à huit heures du soir à Nevers pour le même pèlerinage, que comme les autres années notre Saint Evêque conduit aux pieds de la bienheureuse Bernadette d’abord et ensuite auprès de la grotte. Les pèlerins sont au nombre de six cent cinquante, il y en a dix de Saint-Parize, dont un malade, le jeune Berthier, boiteux de naissance. Daigne la Sainte Vierge prendre ces voyageurs sous sa sainte garde, et leur accorder une ample moisson de grâces, pour eux et leurs familles.

12. Pluie. Cécile nous conduit Edith et moi, faire visite au Veuillin. Nous y trouvons Marie-Thérèse toujours bien triste et bien déprimée. Je fais la connaissance de sa belle-fille, elle parait petite dans cet intérieur de géants, cause peu, et sa simplicité est grande. Retour par Nevers, compliments aux Guillemain et condoléances à Madame de Mollins qui a perdu sa mère. Suzanne Magnard âgée de trente-six ans est fiancée au Baron Pierre de Rouville, veuf en premières noces de Mademoiselle de Drouas, grâce au fard qu’elle se met sur les joues elle est fraîche comme une rose, malgré cela il faut un certain courage pour l’épouser, car grâce aux quarante cigarettes qu’elle brûle chaque jour, elle a contracté le tremblement des fumeurs, en dehors de cela femme charmante et remarquablement intelligente.

14. Mes filles me quittent pour aller faire aux Gouttes et aux Fougis leur visite annuelle. Dédette a passé une mauvaise nuit, son malaise doit venir d’une dent, au moment de monter dans la conduite intérieure de sa tante ça allait mieux.

Machine à battre aux Petites Granges, l’avoine rend bien, si la trop grande quantité de pluie est gênante ailleurs, sur les Craies elle est un bienfait.

Madame de La Motte et sa sœur viennent faire une visite après le départ de mes filles.

15. Pluie diluvienne, la machine ne peut battre à Callot. Les prés sont à blanc d’eau.

Le jeune du Part est reçu aux Mines et à Polytechnique. S’il ne brille pas par la taille il brille au moins par l’intelligence.

17. Par un temps gris on peut finir de battre à callot. Mes trois pèlerins me reviennent enchantés de leur voyage. Malheureusement Fafa de Soultrait n’a pas pu les accompagner, elle est restée à Lourdes, aux prises avec une angine.

Anne de Champeaux après sept ans de repos, met au monde une fille à la clinique du Docteur Rollin à Nevers.

18. Pluie. Hervé et Miss May nous quittent pour les Gouttes. Ils sont remplacés par le Colonel d’Assigny appelé dans notre commune pour y parler de la Drac dont il est le représentant à Nevers. Il nous fait dans l’école libre une conférence écoutée par cent vingt personnes des deux sexes, les hommes représentent l’Union Catholique et les dames, la Ligue Patriotique des Française, tous l’écoutent avec attention. Montrichard qui introduit l’orateur le fait d’une façon beaucoup trop longue et peu intéressante. Nous reconduisons à Mars au train de cinq heures cet excellent Frédéric qui a l’air fort satisfait de l’effet qu’il a produit.

19. Nous avons la visite des habitants de Buy, y compris George qui est là en passant, il ressemble à un chilien, et a beaucoup engraissé, ce qui prouve que le métier de marchand de vins ne le fatigue pas. Ils ont assisté la semaine dernière à une grande fête donnée aux Guérands, pour les dix-sept ans de la jeune fille, commencée à neuf heures du soir, elle ne s’est terminée qu’à deux heures du matin. Cent cinquante à cent quatre vingt personnes. Rien ne manquait. Jazz venu de Clermont, champagne du Marquis de Foucault, pâtés chaud-froid, monceaux de petits fours, électricité posée partout pour vingt-quatre heures, etc. On me dit qu’Amable a beaucoup fait danser Mademoiselle Picard de Grandchamp, aurait-il des prétentions sur cette très riche héritière.

20. Temps superbe et chaud, j’en profite pour monter un instant sur les craies avec mon fusil, j’y tue deux perdreaux qui seront probablement les seuls de l’année. Au retour je trouve les Charles Tiersonnier avec lesquels nous faisons un petit Bridge.

21. Temps magnifique, très chaud.

22. Pluie. Foire de Saint-Pierre, c’est le marasme rien ne se vend, les châtrons ont baissé de trois cent francs depuis un mois, personne n’y comprend rien. Marguerite et Félix déjeunent avec nous.

23. Nicole de Barrau met au monde une quatrième fille, ce doit être le marasme.

24. Pluie. Cécile et Yvonne nous reviennent des Fougis. Visite de Geneviève Tiersonnier.

25. Pluie. C’est à devenir enragé.

26. Pluie. Mes enfants déjeunent chez Marguerite et goûtent à la Garenne, cependant que je peins portes et fenêtres de la Garderie.

27. Pluie. Geneviève de Buzonnière avec ses enfants et Yves de Chomereau déjeunent avec nous. A quatre heures les Tiersonnier, les Chavanne, Madame Houdaille et les gens de Buy, y compris les Maurice, se joignent à eux et l’on monte quatre tables de Bridge, c’est tout ce qu’il y a dans la maison.

28. Je reçois une lettre de Denyse Boignes qui nous invite à assister Dimanche aux Vespres qui seront chantées très solennellement dans l’église Saint-Aré de Decize en l’honneur du Bienheureux Desprez de Roche qui fut guillotiné en 1799 pour ne pas avoir voulu prêter serment. Il est un peu notre cousin, sa famille étant alliée aux Noury. Ce prêtre martyr est une gloire pour la Nièvre et pour nous. Aline, Geneviève et Simone déjeunent avec nous et pendant que les deux premières mettent le cap sur les Gouttes, Marcelle conduit Simone à Nevers où elle s’embarque pour Corvel l’Orgueilleux.

29. Nous dînons à Buy d’où nous ne partons qu’à onze heures. Le Bridge a beaucoup d’attrait dans la maison et Henri qui dans le temps se couchait à huit heures et demie veille maintenant avec plaisir.

30. Pluie. Mon bon curé ne déjeune pas avec nous comme il le devait, il a pris une médecine.

26.10.10

AOUT 1927

1. Déjeuner à Buy avec les Thonier et Le Sueur. Visite à Beaumont, où nous sommes reçus par Monsieur Ratheau, sa femme est souffrante, il me fait voir ses chevaux de selle qu’il monte avec ses petits enfants, et un vieux taureau, origine Gaby dont il a refusé cinquante mille francs l’année dernière.

Les Donjon de Saint Martin me font part des fiançailles de leur fille Anne avec le Lieutenant Antoine de la Croix Vaubois, 17ème artillerie, voilà un artilleur que je ne plains pas, il épouse une jolie et agréable femme.

2. Pluie trop importante, impossible de terminer la moisson, les grains vont germer sur terre. Ma sœur qui devait nous arriver ce matin par l’autobus a reculé devant le temps, mais elle débarque par celui de six heures du soir.

4. Au retour d’un service chanté à Saint-Parize pour Mouche de Montrichard, nous trouvons Cécile et sa fille arrivant de Rennes en auto après avoir couché à Angers et à Vatan Indre, sans accrocs.

5. Marguerite retourne à Nevers. Brouillards. Les gens de la campagne les accusent de tous les méfaits ! Il y a une chose certaine, c’est que dans le jardin où les haricots, les pommes de terre et la vigne étaient superbes au beau matin tout est devenu noir. Voisin prétend que les deux jours de brouillard qui se sont suivis la semaine dernière en sont seuls la cause. Qui le sait ? Mariage de la Bretonne.

6. Pluie.

8. Pluie. Mesdames Grincour déjeunent avec nous ainsi que les M.M. de Buy, Marie-Thérèse ne les accompagne pas ayant eu une crise de foie la nuit précédente. A une heure on annonce le Bridge qui dure jusqu’au départ des dames de Fontallier. A trois heures et demie, les Paul Tiersonnier arrivent en visite, on reprend les cartes jusqu’à six heures. Henri est infatigable sans pour cela faire des progrès. Jumilhac a du faire un trou dans la lune, car Brezé son beau-père fait abattre la futaie dans les taillis de tout âge de sa propriété de Beaudreuil. C’est une maladie qui sévit dans ce pays ci.

9. Bridge à la Grâce avec les Lunyt, Monsieur s’est rasé et ressemble à Paul Bonecourt le socialiste, Madame toujours fraiche, désolée d’avoir fait couper ses cheveux les laisse repousser, avec eux les Marcy, Beaumenil et du Verne de la Baratte. Yvonne prend quarante poissons rouges avec Jean-François.

10. Déjeuner à la Belouze où nous emmenons Anne Marie de Rigny, bonne cuisine comme toujours, le Comte vieillit, il ne nous accompagne pas, Villaines et moi dans la visite du bétail. Son gendre me montre dix-huit belles vaches suivies d’autant de veaux, les génisses sont très supérieures à leurs frères. Je vois aussi le taureau acheté quinze mille francs l’année dernière à la vente Besson, très défectueux dans sa tête, somme toute la ferme est menée d’une façon intelligente et doit rapporter. En passant à la Grange Quarteau je m’aperçois que la moisson n’est pas terminée et que ce qui est en tuziaux germe et que les pailles sont noires. Dans la vallée de Nièvre les foins sont loin d’être finis, c’est lamentable ! En rentrant je regarde dans le pré de la Joie trois veaux de Callot qui sont certainement meilleurs que ceux de la Belouze et que je vendrai moins chers, l’écurie n’étant pas cotée et non inscrite.

11. Pluie. Cécile nous emmène avec sa Renault déjeuner aux Gouttes, marche parfaite, soixante kilomètres à l’heure dans les bonnes routes. Je trouve qu’Edmond a moins bonne mine que son père qui ne prend pas un jour, il souffre de son exema[1] que la station d’eau n’a pas guéri, il suit maintenant un régime ordonné par un médecin de Lyon.

12. Déjeuner à Bulhon, tout le monde en bonne santé y compris mémère Marthe, qui porte gaillardement ses quatre-vingt printemps, et mange comme quatre. Les enfants s’amusent bien, Yvonne monte à califourchon sur l’ânesse pendant que ses cousins la suivent ou la précèdent à bicyclette. Augustin me fait voir que leurs terres sont saturées d’eau et que l’on ne peut ni finir de lever la récolte ni labourer, il n’est pas satisfait de son métayer.

13. Déjeuner aux Fougis et retour à Tâches par un beau temps. Yvonne compte quatre-vingt-quinze automobiles croisées entre Moulins et Moiry, tout le monde se plaint mais tout le monde voyage.

14. Les Charles Tiersonnier avec les Lunyt et les Chavannes nous arrivent en même temps qu’Henri et Antoine, on dresse de suite trois tables de Bridge et on se bat pendant deux heures et demie.

15. Nous nous approchons tous de la Sainte Table. A neuf heures nous allons à Vespres, il n’y a que deux hommes, mon contemporain Tardy et moi. J’oubliais les M.M. de la Chassaigne qui sont dans leur banc dans le chœur, où on ne les voit pas, et où eux-mêmes ne voient rien et n’entendent pas davantage. En rentrant je prends mon bâton et je vais me promener au Paturail Masle où je ne trouve pas les animaux qui devraient y être, inspection faite de l’abreuvoir je constate qu’il n’y sont pas entrés depuis plusieurs jours, en faisant le tour du pré je m’aperçois qu’ils sont sortis à travers la haie le long de la vieille rue, je m’empresse d’aller à Callot où mon métayer Drouet me dit que depuis plusieurs jours il n’est pas allé visiter ses jeunesses au nombre de neuf. Je lui donne un sérieux abatage et lui intime l’ordre d’aller les chercher. Je suis fort mécontent de cet homme qui est très négligent. (retrouvés chez Arbaulti).

16. Marcelle va assister à la levée du corps de Madame Ossaye qui s’est éteinte à la suite d’une longue maladie. C’est une perte pour les bonnes œuvres de Nevers, dont elle était une des plus ferventes protectrices. Ma fille la regrettera bien à son ouvroir, dont elle s’occupait avec intelligence et dévouement, et lui donnait souvent de bons conseils.

Journée avec vent mais pas de pluie.

17. Nous avons à dîner Marguerite, les Louis et leurs enfants, ainsi que Solange Houdaille qui nous amène le ménage Jallot, qui est en séjour à la Châtellenie. Mes métayers finissent de couper les avoines, ils sont en retard de trois semaines à cause des pluies persistantes.

18. Pluie, orage. Cécile nous conduit au Mou, où je regarde les réparations aux toitures faites par Brunet du Guétin, il n’y a plus qu’à solder la douloureuse. Je recommande au fermier Favier de ne plus passer par l’avenue de Sully pour monter à son champ des Argougneaux car Monsieur Dubois s’est plaint à Augustin de la liberté que prenait ledit Favier de passer par ce chemin privé malgré ses remontrances. Nous passons par Nevers et la Baratte pour nous rendre à Sury où nous devons déjeuner à onze heures et demi mais comme dans cette excellente et retardataire maison on est toujours à l’ancienne heure, c’est à midi et demie que l’on se met à table. Nous étions convoqués pour pécher l’écrevisse mais grâce au mauvais temps nous nous sommes contentés de faire un Bridge, peu intéressant du reste car M. T. de Vannoise joue comme un enfant. Pendant ce temps Yvonne faisait le tour de la pelouze[2] à cheval sur l’ânesse.

19. Pluie. Bernard de La Brosse nous amène Odette et Hubert dans sa Bugatti en quatorze minutes de Nevers. Comme le temps menace je la lui fait remiser sous le porche de l’écurie, il débraye sans se mettre au point mort, et quand il laisse la pédale revenir à sa place, la voiture bondit et me casse une porte appuyée au mur. Arrivés en vitesse et à coups de freins, le sable de la cour est labouré. C’est beau la jeunesse mais combien imprudent ! Louis et Joséfa revenant de signer le bail de Tonay s’arrêtent en passant, nous avons aussi Madame de Lépinière et Roger de quoi faire deux tables de Bridge.

Collision d’auto au croisement des routes de la Bonnefer et de Dhéré entre le Docteur Robet et Roger de Bouillé, peu de mal humain, mais les véhicules sont en miettes. Celui du Docteur laisse trois roues à la bataille.

20. Dîner à Buy où nous assistons à l’arrivée d’une magnifique conduite intérieure Berliet qui vient en remplacer une de la même marque qui n’avait le frein que sur les roues arrières et dont la ligne était moins à la mode. On ne respire pas la misère chez mes cousins. A déjeuner nous avons eu André et ses trois plus jeunes filles, retour de Nevers où ils étaient allés faire une action de grâce près de la châsse de Bernadette.

21. Pluie. Trompette déjeune avec nous et très gentiment nous emmène mes filles et moi aux courses de Nevers, où il y avait une belle chambrée ( ?) et beaucoup de monde, surtout dans la tribune des fermiers.

23. Pluie. Déjeunons à la Châtellenie chez les Houdaille avec la Comtesse Servois et son fils, Madame Jallot et ses enfants qui sont des amours, la cuisine est bonne, plat de mousserons avec ris de veaux de premier ordre. Richebourg de marque. Bridge de trois à cinq heures. Au retour l’auto de Cécile s’arrête pile en face de l’avenue de Boisvert. Panne de Magneto. A pied je vais à Magny chercher le mécano qui heureusement peut réparer la pièce cassée et mes filles rentrent à huit heures et demie à Tâches.

24. Pluie. Déjeunons chez Marguerite avec Mesdemoiselles Magnard, leurs neveux et les Louis. Jacques retour d’Angleterre est un beau jeune homme mais par trop silencieux.

25. Pluie. Cécile me conduisait à la foire de Saint Pierre avec sa Renault, quand arrivés cent cinquante mètres avant Moiry la voiture fait une embardée à gauche, une autre à droite, et se couche mollement sur le côté de la route ; quatre-vingt-dix centimètres plus en avant nous capotions dans le pré de Gandat, grâce à Dieu, à Saint Christophe et à l’allure très lente à laquelle nous marchions, seule l’auto a du mal. Je suppose que nous étions partis avec le pneu gauche arrière dégonflé, et qu’en tournant il a du se déjanter. Sur la grande route j’ai trouvé Monsieur Guéraud qui m’a emmené à Saint Pierre d’où j’ai envoyé Paris chercher la voiture pour la réparer. J’avais des brebis grosses à la foire, personne ne me les a demandées, c’est à ne plus en envoyer à ce marché là, il vaut mieux aller à Sancoins où l’on trouve plus facilement des acheteurs. En fait d’acheteur, il y a deux italiens installés depuis peu à l’auberge à Saint Pierre et qui font des rafles sévères dans le pays, ils sont venus tantôt m’acheter ma vieille vache normande.

Les vieux Clayeux retournant de Villette aux Gouttes ont déjeuné avec nous en passant.

26. Par une belle matinée Edith nous amène ses enfants en auto. Augustin ne les a pas accompagnés, il est resté à Bulhon pour essayer de faire rentrer sa récolte.

27. Mes filles ayant invité quelques personnes à goûter nous avons l’honneur de recevoir la Comtesse douairière de Villeneuve Allix avec le ménage Charnacé et les Gaby, les Bacquencourt, les Massias, du Part, Chavanne, les Charles-Henri et Antoine Robert, Baronne de Rouville et Mademoiselle Magnard. Heureusement il faisait beau et ceux qui ne jouaient pas au Bridge ont pu se promener dans le jardin.

28. Les Edmond Clayeux nous viennent pour déjeuner. A quatre heures nous les emmenons goûter à la Grâce où nous retrouvons les Louis de La Brosse.

29. Pendant que les Edmond, Cécile et Edith vont goûter à Chevenon, Marcelle emmène ses neveux goûter au Banlay où ils retrouvent les Toytot, Boisselet, La Motte, Maumigny, Faverges, etc. Dreux fauche le regain de la pelouze, ce qui est chose rare.

30. Pendant que mes filles font des visites à Fricot, Fontallier et Buy, j’emmène mes petits enfants et Miss May aux étangs Américains où Monsieur Crotat a mis son bateau en pension, et pendant une heure nous canotons. Yvonne et Vé armés chacun d’une petite bêche s’en servent comme de rames et nous promènent dans tous les sens de la somptueuse pièce d’eau qui pour tout ce petit monde vaut bien le Lac Léman. En sortant du bateau Hervé était aussi mouillé que s’il eut pris un bien de siège tout habillé. Un jour prochain nous recommencerons cette fête qui a été une grande joie mais il ne faudrait pas laisser pratiquer ce sport par la seule jeunesse, car un fâcheux plongeon serait à craindre et à certains endroits l’eau est profonde.

31. Edith et Cécile conduisent les enfants goûter à la Garenne et reviennent par le Colombier. Madeleine Pradelle, fille de l’assistance se dispute avec la cuisinière et nous quitte sans crier gare. Nous avions cette mulâtresse depuis trois ans et ne la gardions simplement pour ne pas avoir à en chercher une autre, ce qui tous les jours devient de plus en plus difficile, mais elle ne savait rien faire et n’était pas susceptible d’apprendre.



[1] sic

[2] sic

15.10.10

JUILLET 1927

2. Pluie. A Nevers Félix nous donne un excellent déjeuner à Marguerite, Marcelle et à moi, (foie de veau roulé dans de la rouelle). Si son Alexandrine n’en fait souvent qu’à sa tête, cette fois son idée a été bonne. Je souscris une petite somme pour la ligue anticommuniste et je réponds au Commandant Bouchacourt son président pour lui indiquer Louis Bouille comme organisateur dans le canton et la ville de Saint-Pierre, me trouvant trop vieux pour assumer semblable mission.

Cécile s’installe aujourd’hui à Saint-Cast, Côtes-du-Nord, Ville Emeraude, s’il y fait aussi froid qu’ici, elle y aura de l’agrément.

3. Henri et Torre viennent faire un bridge, ils ont la chance de rencontrer ici Auguste et Guillaume du Verne avec lesquels ils peuvent se mesurer.

Les du Verne restent à dîner.

4. René et Aline nous arrivent pour cinq jours, et amènent un soleil radieux. Berthe nous fait une visite avec Madame de Chassey qui séjourne à la Grâce pendant que l’on enlève l’appendicite à son gendre Phulpin.

5. René me conduit au Chamont, où son fermier Sothy ne récrimine pas trop contre l’application de la loi sur les baux ruraux, qui fait passer son fermage du simple au triple. A cinq heures et demie nous faisons une visite à Buy. Temps splendide, on rentre les foins.

6. Clayeux emmène à Buy mon curé et Tante Laure qui sont les cousins de son fermier. Mes métayers finissent leurs foins, il n’est que temps car à six heures du soir un coup de vent terrible précède un orage et des torrents de pluie. Le champ d’avoine d’hiver de la Brolle est couché, comme si le rouleau avait passé dessus.

7. Pluie. Marguerite et Félix viennent par l’autobus et repartent à cinq heures par le train.

8. Pluie trop abondante. Les vieux Clayeux retournent aux Gouttes après déjeuner. Je paye mon boucher qui consent à me baisser la viande de cinquante centimes bien que je la vende deux francs de moins par Kilo qu’il y a neuf mois.

Le ruisseau du pré de la Joie coule comme en hiver.

9. La pluie s’arrête à deux heures. Marcelle en profite pour aller faire une visite à Fontallier.

10. La tempête continue.

11. Le temps se remet au beau, et nous permet de faire une agréable promenade en allant à Corbigny au mariage Guillemain-Boursier. Beaucoup de monde mais cortège peu élégant. Lunch debout dans la maison familiale, toutes les pièces sont occupées, même la cour des poules. Au retour nous passons par les étangs de Vaux, que Marcelle ne connaissait pas. Nous n’avons pas crevé et nous aurions pu nous passer de Philippe Moine que j’avais emmené, en cas de panne. + treize francs de déjeuner vingt-cinq francs de journée.

12. Déjeunons à la Grâce avec l’ancien stagiaire de Beauchamps qui faisant son temps militaire, a obtenu une permission de moisson de vingt jours, la passe dans les poulaillers, où sa présence est très utile, le poulailler chef étant malade.

13. Hervé a deux prix et deux accessits, son collège a beaucoup de succès pour le baccalauréat, seize présentés, quatorze reçus.

14. Beau temps pour fêter la République. En son honneur, Henri vient faire un bridge, c’est notre seule façon de nous associer au gouvernement qui nous dégoute.

15. Bridge ici. Solange Houdaille nous amène Madame de Mollins, Andrieu et le Colonel d’Assigny. Les Charles T. amènent leur stagiaire Beauchamp. Viennent ensuite les Servois, Geneviève Tiersonnier, et les Guillaume du Verne ferment la marche comme d’habitude. Ont manqué les Boignes et Paul Tiersonnier.

16. Pluie. Nous partons Marcelle et moi à neuf heures et demie direction Decize, Luzy, Magny où les Angenieur nous reçoivent très gentiment et nous font faire en grand le tour du propriétaire, sans oublier les poulaillers et le toit à cochon. Le château est du goût lyonnais, seul un escalier édifié après coup à du caractère, le mobilier est criard. A cinq heures nous mettons le cap sur le Creusot et à six heures au delà nous rendons visite au ménage Mazau qui doit venir en octobre occuper ma garderie, la femme est très paysanne, et ne parait pas très maline, l’adjudant est mieux, et fera bien je l’espère dans les fonctions que je veux lui donner. A six heures et demie nous arrivons au Pignon Blanc que malheureusement Magdeleine a quitté la veille pour aller chez sa fille Darré qui n’a qu’une bonne de seize ans pour l’aider à s’occuper de ses six enfants et faire le ménage. Ces Italiens passent l’hiver à Milan et l’été dans leur propriété située près de cette ville. Le général et ses filles nous accueillent fort aimablement et, après dîner, les petites entraînent Marcelle à Autun où des acteurs de la Comédie-Française donnent le Bourgeois Gentilhomme, dans le théâtre romain, c'est-à-dire en plein air. Elles ne rentrent qu’à une heure et demie du matin. Dimanche messe à Brion. Après déjeuner nous nous dirigeons sur le château du Foing, dont nos amis d’Anglejan viennent d’hériter, c’est une fort belle propriété, beaux et bons domaines au pied du Beuvray, parc superbe, arbres variés dont le sommet touche aux nuages. Mobilier élégant, pas mal de vieux meubles dans le grand salon, portrait d’une grand-mère peint par Van Loo, qui malheureusement ne va peut être pas y rester, un frère du Baron demandant à ce qu’il soit partagé, et comme il vaut une grosse somme, on ne pourra peut-être pas le garder.

A quatre heures et demie nous arrivons à Decize pour y visiter l’exposition canine du griffon nivernais, dont Raoul d’Anchald est le président et Roger de La Brosse la cheville ouvrière. Soixante dix chiens sont exposés sous les magnifiques platanes de la place. Un orchestre composé de sept sonneurs de trompe venus de Paris, tout de rouge habillés, fait entendre les plus joyeuses fanfares. Joseph Boignes invite tous ses amis à venir goûter à Brains, nous y trouvons les Brezé, Jumillhac, d’Espeuille, les vieux d’Arbigny avec leur plus jeune ménage, Madame n’est pas belle mais fort aimable, les Certaines, les Paul Tiersonnier, Aubergy, Anginieur, les vieux de Laplanche. Le parc de Brains est une splendeur, nous admirons tout particulièrement les bassins couverts de nénuphars multicolores. A sept heures nous arrivions à Tâches après une journée bien remplie et sans avoir crevé.

19. Marcelle conduit à la gare Solange du Part que nous avions amené hier et qui part pour Clermont où elle passera une quinzaine avec Reine chez le Docteur Fourniol, c’est une jolie et agréable personne, espérons qu’elle tapera dans l’œil d’un aimable Auvergnat. Geneviève et Antoine revenant de Villette et retournant aux Fougis, goûtent en passant ici. Mes métayers coupent leurs avoines d’hiver, c’est en retard, mais à la Chasseigne et dans beaucoup d’autres domaines on est encore dans les foins.

20. Déjeunons à Nevers chez Marguerite, goûtons chez Félix et manquons ici la visite des gens de Buy venus pour nous inviter à déjeuner samedi avec les Grincour. Impossible d’accepter, car ce jour là nous aurons les Villeneuve qui se rendent aux courses de Moulins. Les Tollu me font part des fiançailles de leur fille Edmée avec Monsieur Guy Constantin.

22. Visite au Colombier. Geneviève donne à Marcelle un bouquet de pois fleurs, elle cherche un journal pour les emballer et ne trouve que l’Action Française, elle recule épouvantée pensant que pareille feuille peut tomber dans des mains aussi infidèles que les nôtres. Tout de même nos consciences doivent être moins bourrelées de remords que la sienne. Bridge à la Grâce avec les Servois, Phulpin, Dubois et G. du Verne.

23. Pluie. Les G. de Villeneuve se rendant aux courses à Moulins déjeunent avec nous, et se régalent avec un canard rôti de l’élevage de Marcelle.

24. Berthe emmène Marcelle à Millay où elle doit fonder la Ligue, elle y fait une remarquable conférence en parlant d’abondance, devant une centaine de femmes, sous la présidence de Marie-Thérèse Anginieur qui leur offre à déjeuner, Madame Pierre de Laplanche honorait la réunion de sa présence.

25. Philippe Moine après m’avoir remplacé cinq lames de ressort cassées gauche avant, me conduit à la Barre où mon vieil ami Trompette m’a convié à déjeuner, il est au régime et mange plus de légumes que de gigot, mais il a encore sept personnes à la cuisine, ce temps de vie chère ne l’effraye pas. Je reviens par Buy où je ne trouve que Madame Chanier, ses enfants goûtent à Saint Loges, c’est un moyen de penser un peu moins à la mort de la tante Boucaumont qui s’est éteinte hier dans son 95ème printemps.

26. Mouche de Montrichard meurt à Lyon, où elle vivait comme disait sont père, à l’ombre de son couvent, c’est à cette même ombre qu’elle est enterrée.

Félix passe la journée avec nous, il apporte à Marcelle un superbe bouquet d’œillets produit de son jardin.

Les Villeneuve retournant des Fougis à Villette font un Bridge en passant avec les M.M. de Buy qui arrivent en même temps qu’eux. Naturellement c’est Henri qui perd.

27. Un quart d’heure de pluie. Déjeuner à Nevers avec Marguerite des Ecots et les du Verne chez ma sœur.

La moissonneuse de Libault me lève en un jour et demi la récolte des Petites Granges, qui comme d’habitude est pauvre. Dans ces terres là on devrait se contenter de semer du seigle, et encore là où l’on fume.

28. Pluie. Foire plutôt en hausse pour les jeunes bovins, cela tient à ce que maintenant et depuis peu l’exportation est permise. Petits cochons très chers.

29. 29. Pluie. Cela devient terrible pour faire la moisson, et aussi pour terminer les foins, qui sont fort en retard dans certains domaines comme à la Chassaigne. G. de Montrichard dit que c’est plus avantageux car on coupe foins et regains en même temps. Visite de condoléances à la Chasseigne, la comtesse n’a pas une mine bien brillante en revanche je trouve Armand en superbe état.

13.10.10

JUIN 1927

1. Marcelle et moi conduisons notre directrice des postes à Saint-Saulge dans le couvent des sœurs de la charité de Nevers où elle doit se reposer une quinzaine, étant très fatiguée. Au retour nous nous arrêtons à Limon, où nous trouvons Madame de Maumigny, Geneviève et trois petits Féligonde ou Courrège. En passant, visite au Chazeau, personne, à Curty nous sommes reçus par Nenette, sa belle-mère est à Paris, et son mari à son agriculture. Son petit garçon ressemble d’une manière frappante à son papa.
Carl d’Arbigny épousera le 9 juin à Paris Mademoiselle Paulette Le Brets.

2. Pluie. Notre excellent curé déjeune avec nous, et fait ensuite des visites à Callot et à Tâches.

3. Enterrement de mon camarade Henri de Lavesvre qui meurt à Clamours dans sa soixante-et-onzième année d’une congestion pulmonaire. Il a passé toute sa vie avec son frère Jules, mon contemporain immédiat, car nous sommes, je crois, de la même semaine. Beaucoup de monde à la cérémonie, ce qui ne m’a pas étonné, car la charité est de tradition dans la famille Lavesvre. Les petites sœurs des pauvres en particulier par leur présence étaient venues payer une dette de reconnaissance. Déjeuner chez Marguerite, et Bridge chez Madame Hondaille, avec les Villeneuve qui se rendaient aux Fougis, Gaby avec sa rage de ne pas vouloir abandonner la table de jeu, a bien failli faire manquer le train à sa famille.
Gaudat de Moiry qui prêtait à Marcelle une petite maison où elle réunissait les enfants de son patronage est venu l’autre soir lui dire que dorénavant, elle ne devrait plus y mettre les pieds, ceci en nous abreuvant d’injures. Il est vrai qu’il était ivre mort. Cherut me parlant de cette aventure, m’a fait remarquer assez judicieusement que les ivrognes, quand ils ont bu, disent ce qu’ils pensent lorsqu’ils sont à jeun.

Pentecôte. Monsieur le Curé fait des compliments à ses paroissiens parce qu’il y a beaucoup de monde à la Messe. Mais d’autre part dans son sermon, il nous dit qu’il constate avec peine que la foi s’en va, et que les enfants qu’il prépare cette année à la première communion lui donnent peu de consolation.

6. Nous dînons à la Grâce, les Charles y sont bien ennuyés, le chef poulailler qui avait signé avec eux un engagement de cinq ans les a plantés là, du jour au lendemain. Ils avaient fait pour lui d’assez grosses dépenses, escalier intérieur pour monter au grenier, cabinets d’aisance, changé les papiers de tenture, etc. Ils en sont réduits à laver les œufs eux-mêmes, à donner les repas… je me demande si en fin de compte, ils retirent quelque profit. Ils ont un gentil stagiaire, le jeune de Fraÿs qui s’occupe de la culture, mais non des poules.

7. Marguerite nous vient par l’autobus, les Henri se joignent à elle pour le déjeuner.

8. Enterrement de Duchemin, beaucoup d’hommes témoignant leur affection à Jules Mathieu le beau-père.

11. Pluie. Foire de Nevers, tous les cours en baisse. Je commande à l’office agricole 700 H blé rouge de bordeaux et 200 H avoine d’hiver livrables en septembre pour renouveler mes semences. Nous déjeunons chez Marguerite. Il pleut pour la Saint Barnabé !

12. Les Charles Tiersonnier déjeunent avec nous. Bouheury un modéré radical, bât dans l’Aube un communiste par 28000 voix contre 25000. Les bourgeois qui d’abord devaient voter blanc, pris de trouille se sont ravisés. Est-ce un bon présage pour 1928, Dieu le veuille, nous en avons bien besoin, car la France descend rapidement la pente qui conduit à l’abîme.

14. Pluie. Les Clayeux, Aline et Geneviève nous amènent pour déjeuner Guiguite et sa fille, Gaby arrive de son côté par Nevers et repart le soir pour Villettes avec femme et enfants.

15. Pluie. Batréau, bon vétérinaire, remets debout une jument des Petites Granges couchées depuis 24 heures à la suite de la mise au monde d’un poulain mort-né. Il fait faire au dessus de la bête, un atelier de six perches solides mises trois par trois en pied de chèvre. Une traverse relie les deux sommets. On attache avec des câbles la jument, d’abord autour des hanches ensuite autour des épaules, on passe des chaînes sur la traverse et avec des leviers on monte successivement le devant et le derrière.
Les Jack d’Assigny, Pierre de Barrau et Houdaille dînent avec nous.

16. Fête-Dieu. Première communion à Saint-Parize, quatorze enfants presque tous des pitaux, cette année correspond comme naissances à la première année de la guerre. Après la cérémonie nous déjeunons à Buy avec les Maurice. Henri qui a pris à Moulins l’habitude du téléphone le fait installer à la campagne. Près de la Chapelle-aux-chasses, le chauffeur de la Chassaigne qui villégiature avec l’auto de son maître dans laquelle il emmène six personnes, entre en collision dans une croisée de routes, avec la voiture d’un huissier de Moulins, conduite par sa femme, celle-ci qui a le volant en main, est tuée sur le coup.

17. Auguste du Verne qui a en séjour chez lui George et sa nièce Guillemette nous les amène à dîner, ils repartent avec des phares éteints !!!

18. Bridge chez Madame Delecluze, cinq tables et goûter beaucoup trop somptueux avec des glaces.
Odette de Noury, née en 1884 est fiancée au Baron Abord Sibuet.

19. Les Henri et Maurice Robert dînent avec nous et restent jusqu’à onze heures pour travailler le Bridge. Voila ce que peut vous faire faire la passion du jeu.

21. Madame de Pardieu et Marguerite passent la journée avec nous. Elles descendent à Mars d’un modeste Wagon de troisième. Signe des temps. Paul Tiersonnier nous fait visite à quatre heures et ramène ces derniers à Nevers.
Dreuze avec deux faucheurs coupe dans sa journée tout le fond du pré de la Joie.

22. Déjeunons à la Grâce. Berthe a un bras en écharpe à cause d’un rhumatisme qui l’a fait cruellement souffrir. Nous passons par le Veuillin, où il n’y a personne. Le Russe qui remplit les fonctions de maître d’hôtel nous dit qu’ils sont dans un petit château près de Vichy.

24. Saint-Jean. Beau temps. Je rentre du bon foin.

25. Pluie une heure le matin. Fête du Sacré-Cœur, je m’approche de la Sainte table. Bien que pas très sec, je finis de rentrer mes foins, le manque de personne fait que l’on se hâte un peu trop, ce qui est un tort.

26. Douze degrés seulement. Henri passe par Tâches et nous prend Marcelle et moi pour nous emmener à Nevers à une conférence de Kerillis. Salle comble, il est venu du monde de tout le département mais surtout des comtes, des marquis et de gros propriétaires avec leurs femmes. Le commandant Bouchacourt qui a été nommé Président du groupe de défense anticommuniste, présente le conférencier dans de très bons termes. Pendant deux heures Kerillis nous expose le danger des cellules communistes, installées dans le plus petit des villages et nous donne quelques moyens pour nous défendre, surtout par les tracts, les affiches et les conférences répétées. Il faudra de l’argent, beaucoup d’argent et se dégrouiller. L’orateur reproche aux modérés d’être restés les bras croisés, attendant les évènements. S’ils continuent c’est la fin de la France en 1928 et le régime des Soviets installés chez nous avec toutes ses conséquences. En sortant par une pluie battante nous allons goûter chez Marguerite avec les Villeneuve.
Léon Adenot est nommé capitaine au 8ème Dragons à Lunéville, au grand désespoir de sa belle-mère.

27. Le nommé Mazau d’Essertenne Saône-et-Loire, adjudant retraité, vient me demander la place occupée par Barrat. Je lui fais visiter l’endroit qui a l’air de lui plaire, et je prends des renseignements sur son compte.
Les Dubois de la Sablonnière nous ont manqué hier pendant que nous étions à Nevers.

28. Félix déjeune avec nous, il apporte à Marcelle une superbe botte d’œillets cueillis dans son jardin. Lettre d’Edith qui a reçu pendant quatre jours Madame Chevrier et Madame Polissart, elle est venue au secours de sa cuisinière en faisant les entremets.

29. Les Soultrait, Toytot, Charles Tiersonnier et le stagiaire de Fraix passent la journée avec nous. Eclipse de soleil.

30. Pluie sérieuse, dite de l’éclipse.

11.10.10

MAI 1927

1. Vin d’honneur offert par le Maire aux communistes, la place Carnot est pavoisée, une guirlande de petits triangles rouges entoure le terre plein, c’est du meilleur effet. Journée calme. Bridge chez Madame Houdaille. Cinq tables plus une de Banco. Marguerite et Félix dînent ici.

3. Nous allons à Tâches, Marcelle et moi, par une vraie journée de printemps, avec Barrat qui me quittera le 10. Je visite une coupe de bois afin de me rendre compte de ce qui est vendu et de ce qui reste à vendre. Il y a encore peu d’herbe.
Les Riberolles entassés dans leur auto nous quittent en passant par Moulins où ils doivent déjeuner chez les Clayeux encore en ville pour deux jours.
A quatre heures nous rentrons pour recevoir les Villeneuve qui sont invités à dîner chez les Houdaille, et à un bridge chez Andrieu, ils n’arrivent qu’à sept heures et demie, ayant eu un accident d’auto. Une camionnette descendant de la rue de l’Asile les tamponne en faisant son tournant direction de Guérigny, heureusement personne n’est blessé mais la Peugeot de Gaby a beaucoup de mal, au moins cinq mille francs de réparations, et s’il ne peut pas prouver qu’il est irresponsable, il faudra tout supporter.
Les Guillemain d’Echon nous font part des fiançailles de leur fille Anne-Marie avec Paul de Boursier de la Rivière. C’est un gentil mariage en perspective. Mais que le futur est donc jeune 29 ans ! la jeune fille en ayant 24.

4. Les Comte offrent à la Haute société un Bridge-goûter que la Marquise de Veyrey honorait de sa présence, et comme dans l’évangile le jour de la multiplication des pains, il est resté des gâteaux de quoi nourrir vingt personnes.
Comme ma ponette continue à boiter sans espoir de guérison, je la vends à la boucherie pour huit cent cinquante francs, cela diminue le prix d’acquisition de mon âne.
Je paye à Cassart quelques petites réparations, il me compte l’heure de travail quatre francs et la fourniture à l’avenant ; ces gens là peuvent plus facilement manger des poulets que les propriétaires.

5. Lettre d’Edith qui nous dit qu’ils ont fait bon retour et qu’ils ont trouvé mémère Marthe en parfaite santé, de l’attaque qu’elle a eu dernièrement, il n’en est rien resté. Bridge chez Marguerite Pinet avec les Touttée, c’est un vieux ménage qui se conserve bien, chic-à-mort, toujours élégant.

6. Nous emmenons Mesdames de Pardieu dt Delecluze faire des visites à La Croix, à Cheugny, aux Bourdons et à Veninge. Nous trouvons les Lenferna au complet, quant aux dames, les deux filles sont plus maigres l’une que l’autre. Madame de Maumigny nous offre une tasse de thé. Amélie de Noury rien du tout, et Madame de Dongermain la vue d’une toilette des plus seyantes, les bas en rigodins et un galurin qui a fait pouffer de rire toutes les visiteuses.

7. Je reçois une invitation au mariage de la belle Solange Thuret avec Monsieur Olivier de Luze qui aura lieu à Béguin le 19 mai à deux heures. Madame Thuret recevra à Champroux après la cérémonie religieuse. Choquets termine les peintures de mes contrevents, sauf le côté des écuries qui attendra l’année prochaine pour se blanchir. Bridge chez Jeanne de Mollins, contrairement à la veine qui depuis un mois me favorise je perds tout ce que je veux. Le jeune ménage Guillemain nous offre à déjeuner à Marcelle et à moi, accueil des plus gracieux et sans pose.

8. Sainte Jeanne d’Arc. Messe à 11 heures à la cathédrale, beaucoup de monde, le préfet s’est fait représenté par le ( ?° ) général Brouillet. La maitrise se fait entendre et l’abbé Boudat nous dit un très court mais très bon panégyrique de la Sainte. Après dîner nous allons avec Marie-Antoinette du Verne admirer les illuminations municipales et particulières. Madame de Savigny s’est distinguée, l’hôtel Maumigny mérite aussi une mention. Le temps est splendide à Nevers, il n’en est pas de même à Paris, où le cortège très nombreux a été fortement arrosé.

9. Déjeuner chez Félix et retour à Tâches[1] par temps gris mais assez chaud. Je règle mes comptes avec mon garde Barrat qui me quitte demain après dix ans de service à la maison, c’est un honnête homme, qui a cependant un gros défaut, il est d’une extrême susceptibilité[2]. Il faut toujours faire attention quand on lui parle, pour ne pas le froisser.

10. Pluie bienfaisante et douce. J’essaye mon âne qui trotte comme un cheval, mais ne veut pas approcher de chez Blot à cause de dalles qui bordent la maison, je l’attache en face où il n’y en a pas et il reste tranquille.

11. Je montre à Duceau, garde de M.M. Crotat et Constant, la limite de mes bois, cet homme me fait bonne impression. Avec Marcelle nous allons à Nevers pour assister à un thé Bridge donné par Melle de Toytot et Madame de Pardieu chez cette dernière. Beaucoup de monde, ville et campagne, buffet servi par Gobillots et Taupin. Bon champagne, sept tables de jeux. Les Saints de glace se font sentir, 5° à ma fenêtre aussi le soir j’allume une flambée.

12. J’ai au pouce gauche une forte douleur, comme un muscle froissé, j’y mets de l’iode.
Robert Eustache meurt au Chasnay dans sa soixante quatorzième année, enterré à Paris.
Je reçois 446 litres de vin pour la cuisine, coût 1989 francs, et il monte encore.
Verdet peintre à Nevers vient avec un ouvrier peindre le plafond du salon qui est tâché.

13. Je vends au boucher ma ponette boiteuse depuis huit mois, pour huit cent cinquante francs. Elle m’en a coûté deux mille il y a deux ans.

14. Les près sont tout blancs au réveil et les haricots et pommes de terre sont gelés à certains endroits. Foire à Nevers, cours un peu en hausse en comparaison du mois de février. Les agneaux et les petits cochons se vendent bien. Avec Marcelle nous déjeunons chez Auguste du Verne.

15. Marcelle nous conduit mon métayer Barillet et moi à Nevers pour assister à une réunion de l’Union catholique au clos Saint Joseph. Le Président de Pardieu ouvre la séance par une allocution pleine d’à propos et présente les orateurs qui prendront la parole après lui, d’abord le père Janvier qui nous lit son discours, ce qui est toujours moins agréable que d’entendre parler, ensuite M. La Cour Grandmaison député de la Loire-Inférieure, il est jeune et parle avec feu et éloquence, il nous a conseillé de résister de toutes nos forces à la création de l’école unique, en nous montrant que quatre vingt pour cent des instituteurs étaient affiliés à la Confédération générale du travail, et à la Franc maçonnerie. M. Chatelun remercie les orateurs et invite tous ceux qui sont présents à se transporter à la cathédrale pour y chanter le Credo et recevoir la bénédiction du T. St. St. Ainsi fut fait, et notre vieille basilique qui peut contenir sept mille personnes debout était pleine, ce qui prouve qu’il était venu beaucoup de monde. Les forcenés d’Action Française s’ils se sont abstenus n’ont pas fait rater cette splendide réunion à laquelle assistaient mon neveu Villeneuve et Jean de La Brosse accompagné de son épouse que j’ai très en beauté, elle a maigri ce qui lui va bien. Remarqués Pierre de Laplanche, Nadaillac, B. Faulquier, Montrichard, Ch. du Verne, Rouälle, - Damas brillait par son absence, Mauras avait dû lui conseiller de ne pas venir. Les dames présidentes d’œuvre avaient des places au premier rang.

16. Charles et Berthe déjeunent avec nous. Je sème dans le jardin de la Garderie du blé noir, et Marcelle des petits pois. Ce sera un moyen de l’entretenir propre.

17. Henri, sa femme et ( ?) Vou déjeunent à la maison. Le Bridge suit, et je constate que mon cher cousin qui est toujours tout feu tout flamme a fait peu de progrès malgré de nombreuses séances au cercle de Moulins où il s’est mesuré avec de grands joueurs.

18. Promenade peu intéressante à la Seigneurie avec Lavergne, je constate que les couvertures y sont en fort mauvais état, et qu’il y en a au moins six cent cinquante mètres carrés, avec les imprévus c’est une dépense de neuf mille francs environ. Agréable métier que celui de propriétaire. Il ne reste plus une feuille sur les chênes et les érables, tout a été dévoré par les hannetons. Mes quatre châtrons qui sont en pension dans les Guérimbets ont bien profité. Pluie abondante, gros coup de tonnerre sans vent.

19. Marcelle envoie Antoine à Saint Pierre acheter du beurre avec Jaurès, Jaurès c’est mon âne.

21. Nous allons à Nevers où j’assiste à une conférence sur les assurances accidents. Madame de Pardieu raconte à Marcelle que Paul Tiersonnier a donné sa démission de l’Union catholique, ce doit être selon un ordre de Maurras, cette Action Française fait bien du mal en faisant passer la politique avant la religion.

22. Berthe emmène Marcelle à Lamenay pour y fonder la Ligue, elles sont admirablement reçues par le jeune ménage Certaines, et trouvent dans cette petite localité des gens de l’ancien régime, polis, et ayant encore le respect des seigneurs, et même du Seigneur car ils suivent la messe avec fierté. Au retour ces dames passent par les Ecots.
Henri qui pense toujours au Bridge et ne m’en veut pas des admonestations dont je l’accable m’apporte un carnet de jeu et cette strophe qui l’accompagne.

Pour marquer les honneurs,
Pour noter les parties,
Au grand maître des joueurs
Souvenir d’un conscrit.

Ton art est légendaire
Ta patience l’est aussi ;
Mais gare au partenaire
Que la mémoire trahit !

23. Blond fait venir un Wagon de charbon dix mille francs, que je partage avec M. Blond de l’Isle, De Gagny S Moselle, la part coûte 654 francs.

24. Bob Le Sueur me conduit à Nevers pour assister à l’assemblée générale de l’Union Nivernaise, président Damas, qui est à la hauteur de sa tâche. Nous entendons d’abord un discours de M. Flandin qui manie la parole d’une façon très intelligente et spirituelle. Midi, déjeuner Salles Vauban, vingt francs par tête, ce n’est pas trop cher car le repas est bon. Montrichard m’indique une place à la table d’honneur, je me trouve à côté de mon voisin Bernigaud, c’est une chance, car on a toujours à retenir quelque chose de sa conversation surtout en agriculture. Il y a cent soixante convives venus de tout le département. Deux invités de marque, le Comte de Warren, député de Meurthe-et-Moselle et le Comte d’Andlau, alsacien celui là, l’un et l’autre se font entendre à la séance du soir. Somme toute grand succès pour l’Union Nivernaise qui est très en progrès. Pendant que l’on prend des conférences on n’en saurait trop prendre, aussi à huit heures et demie du soir, j’en entends une dans la mairie de ma commune, sur les sels de potasse d’Alsace et la conclusion que j’en tire c’est qu’ils ne peuvent faire d’effet que s’ils sont additionnés d’azote et d’acide phosphorique.

25. Par des chemins défoncés, grâce à l’exploitation barbare de la forêt de Parenche, je vais avec Jaurès jusqu’au Lieu Maslin, pour y régler le terme du 11 mai, qui pour la première fois est payé en nature, Billots se plaint beaucoup, je ne suis cependant pas exigeant, car Soulat m’a raconté que le Clergeat qui touche mes domaines et qui a vingt hectares, aurait pu être affermé dernièrement huit mille francs. Il faut tout de même reconnaître qu’il est près de la grande route et d’un accès beaucoup plus facile que le Lieu Normand, qui voit son fermier obligé de passer par les champs pour sortir de chez lui, le chemin rural étant actuellement défoncé par le roulage de l’exploitation d’un bois qui le touche. Et aussi un petit domaine s’afferme plus cher à l’hectare qu’un grand. Le taureau né du domaine de Tâches et vendu à mes fermiers leur donne une très bonne production.

27. Cécile m’écrit qu’elle est au grand ciel, son excellent beau-père vient de lui offrir une GHP Renault, conduite intérieure dernier cri. Yvonne est également dans la joie, ce qui est bien naturel, je me réjouis avec mes chères enfants. Qu’elles profitent donc du répit que nous laisse les communistes, cela ne durera peut être pas longtemps. Quant à moi, en fait de luxe je recouvre les granges.
Bridge à la maison douze personnes, la belle Solange nous amène Madame Delecluze, sa fille et Andrieu, Auguste du Verne suit avec Anne de Champeaux, qui eux même précédent les Dubois de La Sablonnière avec Mademoiselle Richier, grande et belle fille qui est mieux que sa sœur tout en lui ressemblant beaucoup, les du Part ferment la marche avec la jeune Chantal qui n’a pas de bonne pour la garder. A Chevenon l’on est souvent sans personnel et Antoine frotte les parquets tous les matins, pendant que sa femme fait les repssages.

29. Marcelle emmène à Nevers trois demoiselles de Saint-Parize, Andrée Moreau, Denis et Lamoussieu pour assister à Nevers à l’assemblée des jeunes filles ligueuses, débutant par une messe dite à Saint-Gildart par Monseigneur à neuf heures. Marie Antoinette fait ensuite une intéressante conférence sur les progrès de la Ligue, progrès qui sont dû à son inlassable dévouement.

30. Déjeuner à Fontallier avec les Buy et Marie de La Boulaye. Mon camarade Grincour est de plus en plus tardigrade, ce qui ne l’empêche pas d’avoir encore vingt-six chiens au chenil. Au retour , visite à Saint-Léger, personne, au Manoir nous rencontrons les Le Sueur.

31. Pluie. Déjeuner à Buy, même convives que la veille.
Bridge de mazettes.


[1] Souligné dans le texte
[2] Id°