1. Solange Houdaille nous mène à Aubigny, où c’est le jour de sa tante la Comtesse Servon. Tout a été remis à neuf. L’Ideal classique chauffe bien, l’électricité éclaire de même. Cela ne sent pas la caque, les murs sont décorés de tableaux de famille remontant à Louis XIV, côté Servon, côté Watelet. Trois tables de Bridge, une de Poker. Avec les Marcy, d’Anchald, Ganay, Pazzis, Terline, Andrieu, Pinet, du Part, etc. La Marquise de Rolland et les Scorail font une courte apparition. Nous rentrons à Tâches seulement à huit heures et demie. Heureusement le ménage Charronnier ne nous avaient pas attendus et avaient soupé.
Les Cote, des Réaux, sont désolés, leur fils ainé fait ce jour à Clermont un mariage du plus morganatique.
2. Geneviève Clayeux me fait part des fiançailles d’Antoine avec Mademoiselle Elisabeth Riant, fille d’Emmanuel. Vingt ans, les yeux bleus et toutes les qualités, tout le monde est dans la joie y compris les vieux. Moi aussi, je suis content de voir mon neveu entrer dans une famille très bien posée en Bourbonnais, mais pour Geneviève c’est peut-être la fin de la tranquillité. Auguste du Verne et Marie-Antoinette déjeunent avec nous. Cette dernière a l’air de remonter sur sa bête, elle suit un traitement pour combattre l’affaiblissement ou l’avait mis son grand dévouement à la Ligue où elle a mis tout son cœur et ses forces.
3. Déjeuner chez ma sœur avec les Pardieu, du Verne, de Goy, Marguerite Pinet, etc.
4. Je signe avec les époux Roy-Michel un contrat pour les Petites-Granges pour entrer au onze novembre dix neuf cent vingt huit.
5. Déjeuner à la Grâce avec la famille François Jourdier.
6. Ceux-ci s’arrêtent ici pour déjeuner en se rendant aux Fougis. François en descendant de voiture se met dans une colère terrible, jurant comme un templier parce qu’on a très légèrement rayé sa voiture en mettant le pare-brise, Marcelle lui dit que quand on a aussi mauvais caractère on ferait mieux de ne pas se marier, qu’il est indécrottable. Ca le calme et à table il devient charmant. Avant de partir il nous sonne quelques fanfares, je trouve qu’il a fait beaucoup de progrès depuis qu’il chasse le renard à courre avec Monsieur de Nanteuil près d’Alençon avec un petit équipage qu’ils ont en commun.
7. Nous avons notre bon curé à déjeuner, il nous explique très clairement la différence qu’il y a entre les ultramontains et les libéraux et ensuite nous sortons les chiens, il manque de deux coups de fusil un lièvre dans les plis de sa soutane.
8. Marcelle réunit une dernière fois les enfants de son patronage à Moiry devant un arbre de Noël. Quatorze enfants sont présents et chacun reçoit un modeste cadeau.
9. Nous arrivons aux Gouttes où l’on exulte, il n’y en a que pour Elisabeth dont tout le monde chante les qualités, les grands parents ne se sentent plus de joie. Le fait est qu’Antoine m’a l’air de faire un mariage ou il trouve tout réuni. Les ménages Jourdier et Villeneuve dînent ici pendant que Geneviève et Antoine sont à Petitbois où ils règlent les accordailles.
13. Marthe donne un grand déjeuner en l’honneur des Riant, nous n’y sommes pas convoqués, mais dans l’après-midi nous allons faire la connaissance de la jeune fiancée, que je trouve très sympathique, sans être jolie elle est agréable, regarde bien en face et n’est pas à la pose. Les deux amoureux ont l’air au septième ciel. Le soir Antoine emmène Elisabeth dans son auto passer trois jours aux Fougis, ça c’est de l’école nouvelle qui me renverse un peu.
17. 14°. On enterre à Nevers la petite Adenot (Doudou) âgée de deux ans et demi cette charmante enfant a été rappelée à Dieu après une cruelle agonie qui a duré quinze jours bien cruels pour les parents.
Gaby me conduit à la foire de Dompierre où je constate une plus grande activité qu’à celle de Nevers, il y a une certaine reprise chez les bovins, les bons et jeunes trouvent preneur à cent pour cent. Les petits cochons sont chers, onze francs le kilo.
Edmond m’emmène le soir faire une visite à Toulon, où je fais la connaissance de la femme de Jean qui sans être jolie est agréable entrain et fait beaucoup de frais, elle joue passablement au Bridge, elle a une autre qualité, celle d’attendre un enfant, ce qui la condamne à rester au lit pendant de nombreuses journées et à ne pas sortir, ce qui est sévère pour une jeune femme. Elle déteste Lyon sa ville natale.
18. 19. Froid vif. 1-4°
20. Les Edmond emmènent Marcelle visiter les fouilles de Glosel à Verrière-sur-Sichon, et vont ensuite déjeuner à Vichy où ils doivent retrouver les Riberolles. Ceux-ci ne viennent pas parce qu’il y a de la neige chez eux.
21. Gaby allant à Villette m’emmène et me dépose à Moiry. Je trouve Charronnier tout dolent, en portant du bois dans son tablier il est tombé sur le dit bois et s’est luxé une côte. Robet lui a fait mettre dessus un vésicatoire qui a bien tiré et qui j’espère le débarrassera.
R.D.N. dans mes domaines si ce n’est qu’aux P.G. la naissance des agneaux n’est pas brillante, trois sont morts sur six venus. Dreuze a tué pour son usage un superbe cochon de cent soixante dix sept kilos.
En me reprenant le soir Gaby me raconte qu’un des radiateurs du salon du premier étage a gelé et qu’il y a de la glace sur le parquet.
Le petit Maurice Jourdier revient de Montluçon où on lui a coupé les amygdales dans la clinique d’un spécialiste.
George du Verne meurt subitement à Paris à l’âge de soixante-sept ans. Le pauvre diable souffrait depuis quelques temps d’une maladie de cœur. Il a eu une fin d’existence assez pénible, amené à habiter à la capitale par les goûts de sa femme qui n’étaient guère les siens, il y vivait plus que modestement, sans domestique et sans confort, ne mangeant que la cuisine faite par sa dernière fille et brossant lui-même ses parquets, il eut mieux aimé ratisser les allées de son jardin s’il en avait eu un. On l’enterre à Lainseq, Yonne, où ses beaux-parents avaient leur propriété.
23. Les Jourdier emmènent Marcelle à Vichy où elle retrouve les Riberolles accompagnés des petites qui ont fort bonne mine, et qui vont de la goûter à Cropte.
24. Temps extrêmement doux, les gens des Fougis passent avec nous la veillée de Noël, on fait force Bridge. Après la messe réveillon aux Fougis où nous dégustons un excellent pâté de foies gras qu’Edmond a fait venir de Nancy. Noël au balcon, suivant le vieux dicton Pâques sera aux tisons.
27. Les Riant déjeunent aux Gouttes et goûtent aux Fougis où Geneviève a convoqué tout son voisinage, buffet somptueux et assistance très select, Marquise et Comtesse de Bartillats, Baronne de Rochefort, et ses enfants, Comte et Comtesse F. de Chavagnac, tout le Rallye Bourbonnais qui a fait buisson-creux en terme de vénerie, Mesdemoiselles de Ribains et de Ligneville, cette dernière passe les gâteaux comme si elle était de la maison, tout l’équipage Beauchamps, le Colonel et Madame Tiersonnier, le Vicomte de Montlaur, etc. Cinq tables de Bridge.
29. Mon beau-frère invite tous les membres de l’équipage Beauchamp à déjeuner après avoir vidé quelques bouteilles de Château Yquem, on monte lancer un chevreuil aux Bois Boulotte et trois heures après on sonne l’hallali tout près du château où les veneurs viennent goûter accompagnés de Mesdames Buzenat, Féjard et Jaclot de Potier, cette dernière avec ses trois gentils enfants.
30. Nous passons la journée à Petitbois où les Riant nous reçoivent de façon très écossaise, déjeuner aussi exquis qu’abondant, tour du propriétaire, tout est en ordre et bien soigné, il est vrai que le maître de maison met les mains à la pâte, taille les haies, pose les fils de fer, etc. Dans la soirée nous visitons les châteaux de la Salle et de la Chaussier appartenant à la famille Riant, ce sont des demeures que pour habiter honorablement il faut être multimillionnaire. A quatre heures et demie nous rentrons pour trouver un goûter aussi abondant que l’était le déjeuner.
31. Les Jourdier nous mènent, Marcelle et moi, déjeuner aux Ecots. L’Action Française est étalée sur la table du salon, à mon grand scandale, mes chers cousins sont des forcenés donnant le mauvais exemple à tout leur entourage. Ils me font visiter les écuries de la ferme qu’ils viennent de mettre en régie directe, et où je vois quelques bonnes vaches achetées à Monsieur Ratheau, de Beaumont, Marie les connait mieux que Paul. Je crois que malgré leurs espérances, ils arriveront difficilement à faire des reproducteurs, les prés de l’endroit étant de second ordre.