19.2.10

Apremont

C’est un des beaux châteaux de France et il ne date pas d’hier, car on raconte que Jeanne d’Arc dans sa chevauchée triomphale de St Pierre le Moûtiers à la Charité s’y est arrêtée. En 1883, il appartenait au Marquis Raphélis de St Sauveur avec l’énorme terre qui l’entourait et qui touchait celle de son voisin Aguado. Je ne sais s’ils étaient amis, mais ils avaient les même goûts de luxe et de dépenses, aussi le Marquis à bout de ressources et d’expédients à la date que je cite s’est fait sauter la cervelle à l’hôtel Vouillemont à Paris, laissant sa très charmante et jolie femme née Gontaut Biron et ses 4 enfants dans le plus cruel embarras. Depuis plusieurs années, il passait dans ses nombreux taillis de tous âges pour y couper et vendre tous les gros arbres qui s’y trouvaient, aussi à sa mort, sa belle et vaste forêt était-elle déshonorée et dépréciée. Heureusement pour elle, la chance a voulu que sa fille aînée épouse ait épousé le fils de Schneider, directeur du Creusot, qui avec son énorme fortune a pu remettre d’aplomb la maison d’Apremont et rester de très nombreuses années sans couper un arbre dans la forêt, ce qui lui a permis de se repeupler et de redevenir ce qu’elle était autrefois et même d’avoir été embellie de certains cotés, car Schneider n’a pas ménagé les routes, les ponts, les plantations d’arbres rares sur les chaussées d’étangs. Sur celui de Planche Chevrier, il a même construit une maison de garde de l’époque Louis XIV dont il a envoyé chercher les matériaux authentiques à quelques lieues de là.. Devant elle, il y a un garage pour les bateaux et chez le garde, une salle à manger pour goûter après les bains. Actuellement, c’est le Comte de Cossé-Brissac, gendre Schneider qui est châtelain d’Apremont. On le dit fort galant homme, et comme il y a 62 ans que son grand’père a disparu, il n’y a que les gens de mon âge qui peuvent se rappeler de ses défauts.

C’était l’homme le plus cynique qu l’on put rencontrer. Une méthode qu’il avait pour se procurer de l’argent était de se mettre dans le noir le plus sombre et d’aller chez son tailleur qu’il n’ avait pas payé depuis longtemps. Celui-ci lui disait : Monsieur le Compte est en deuil ? Oui, j’ai perdu un oncle à succession, il faut me faire un complet et me donner votre facture pour que je la règle. Le tailleur ne réclamait pas, au contraire, et le Comte se retirait après lui avoir soutiré quelques mille francs pour lui aider à payer les droits de succession. De là, il allait chez son chapelier pour faire de même.

Fould, l’ancien ministre qui habitait Lévy, près de Lurcy, Allier, et qui était l’oncle de la Comtesse de Valdener, avait un vieux valet de chambre qui lui était très dévoué nommé Cartier et qui a été la victime du Comte qui lui a emprunté 1o ooo frs qu’il ne lui a jamais rendu, dit-on. A une battue , à Prye, où j’avais l’honneur d’être invité, du Bourg donne un ordre à porter au fils de son régisseur, celui-ci part au pas gymnastique. Antonin ! je donnerais cent mille francs pour courir comme cela, dit St Sauveur, qui n’ avait plus 1oo ooo sols.

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