24.2.10

Mars 1945

1. Il y a dans le grenier grillagé cent doubles d’avoine et une vingtaine de doubles au Vieux château. Les Edmond prennent le train de sept heures du soir.

2. Premier vendredi, je voulais aller à la messe, mais ayant été dérangé, je m’abstiens. Ces dérangements deviennent assez fréquents et m’inquiètent. Je vends à Gonin pour sept cent francs la petite taure de ma vache bretonne qui a huit jours. Pierre de Rouville est très malade, à l’hôpital Pasteur il a été administré. Jean est en permission de dix jours à Boutavent où Kiki fera sa Première communion le six. On fait passer une liste de souscription pour les prisonniers. Marcelle et moi nous donnons chacun cinq cent francs. Godard aide mon jardinier à tailler le lierre avec l’échelle à coulisse. Marcelle fait faire par Jacquin du bois de chauffage avec des vernes et des trembles. On partagera en partie égale. Le marquis de Mongont meurt à Montagne et est enterré à Crevant. Vent du nord glacial.

3. -0, vent toujours froid avec gelée blanche, l’herbe ne peut pas pousser. Marcelle va à Nevers debout dans le car. J’ai la visite de mon curé, j’en profite pour me confesser, je lui donne un paquet de cigarettes, ce qui fait son bonheur. La guigne continue pour ma cavalerie. La Marquise de Callot s’est fait une déchirure dans une jambe avec un fil de fer ronce. Quinze jours de repos.

4. -0. Dimanche. Melles Roux et de Maubecq déjeunent avec nous, elles espèrent que leur jument a des espérances.

5. Marcelle envoie cinq kilos de sel à Madame de Forcy à Rennes. Le fer électrique à Miette et des salsifis au chef de gare.

6. Pluie légère. Kiki fait à Boutavent sa première communion privée à laquelle elle a été préparée par le Père Borteay qui, de Cluny, dessert trois paroisses avec Melle Yvonne de Valence comme sacristain. Je vends mon veau breton âgé de huit jours à Gonin pour sept cent francs. Nous aurons du lait maintenant.

7. J’ai encore eu mes dérangements la nuit, ce qui ne laisse pas que de m’inquiéter.

8. La messe est dite pour Edith. Marcelle y arrive après l’élévation parce que selon sa mauvaise habitude, notre curé commence toujours avant l’heure. Madame Chicon, ma métayère, qui nous a fournit du lait pendant que mes vaches n’en avaient pas me le fait payer six francs le litre, ailleurs il coûte cinq francs. Marcelle déjeune au Manoir où elle goûte avec Mme Gabriel Mathieu. Téléphone d’Yvonne disant qu’elle nous reviendrait le dix avec un taxi de Cluny.

9. La Normande met bas un magnifique veau mâle. Roy à Callot finit de semer du blé de printemps dans les champs Janboux sur un bon labour. Le Renaud du Lieu Maslin nous apporte de la jolie farine de blé.

10. -0. Yvonne nous revient de Boutavent avec les petites qui sont superbes. Pour faire cent quarante kilomètres, un taxi gazo de Cluny lui prend cinq mille francs. Lettre de Miette qui demande des vivres car elles sont mal nourries à son hôpital.

11. Dimanche. Le maçon Godard qui m’a envoyé son petit commis pour aider mon jardinier à tailler le lierre contre la maison me demande cent francs. Richard vétérinaire vient faire une piqure anti microbienne à ma vache normande qui a de la mamite dans une tétine. Ca va lui faire perdre un quart de son lait. Marcelle, sur la demande pressante de la comtesse de Maudelot va faire une conférence (Chantenay) aux ligueuses sur la question du referendum pour savoir si les populations veulent que les écoles libres soient oui ou non subventionnées par l’état. Présence de vingt cinq ligueuses dont Mmes Motte, de Fontenay, Gozard. Les Persan offrent un excellent déjeuner à Marcelle au Perray. Le gendre et la fille contredisent tout le temps madame mère, bien à tort.

12. Cécile nous annonce la mort de Pierre de Lafond à Dinan.

13. Une dépêche nous apprend la mort de Pierre de Rouville à Paris. Je garde de lui un charmant souvenir, j’avais beaucoup de plaisir à le voir pendant ses séjours à Planchevienne. J’écris à sa femme. Marcelle va à Nevers par le train de sept heures pour assister à la pieuse __ , à une retraite prêchée aux ligueuses par le père de Chalendar SJ. Au retour, son train à une heure de retard. Elle déjeune chez les Delamalle.

14. +12°. A la première heure, nous avons la surprise de voir arriver Dédette pour la journée. Elle est en séjour à Moulins. Yvonne et Kiki vont à un service anniversaire pour Mme Grincour à Saint Pierre et déjeunent à Buy au retour. Temps superbe, douze degrés.

15. Marcelle retourne à sa retraite où elle entend avec plaisir le père dire à son auditoire qu’il vénère le maréchal Pétain. Suzanne Le Sueur est renversée par un camion rue Lafayette et ramenée en taxi à Villar assez meurtrie.

16. Mon rosaire. Madame de Nadaillac nous amène Roger pour déjeuner. Mon germain a bien vieilli physiquement mais la blague est toujours bonne. Il a encore tué trois sangliers cette année. Il m’apporte une bouteille de marc de son hectare de vigne qui lui a rapporté vingt mille francs cette année et ce n’est rien à côté de ses bois qu’il exploite lui-même. Buffet vient tailler les arbres fruitiers du jardin. Son fils est revenu de captivité.

17. Dédette vient passer la journée avec nous. Hervé est à Moulins pour bécher et semer son jardin.

18. Dimanche. Guite Le Sueur nous amène pour déjeuner Melles Le Droumaguet et de Chalvron qui font avec elle leur Croix rouge à l’hôpital de Nevers. On nomme à l’élection le bureau du syndicat agricole de Saint Parize. Les membres sortent dans l’ordre suivant : Roger de Bouillé, A. Moreau, Richard, de Parizy Raclin, Morizot, Deleume, Roy mon métayer (bon résultat). Après la messe, le conseil paroissial se réunit pour parler du référendum et de la façon dont seront envoyés et recueillis les bulletins des votants, hommes et femmes.

19. -0. Saint Joseph. Je m’approche de la Sainte Table. Mon métayer Michel me dit que ne trouvant pas de ferme, il veut rester aux Petites Granges. Ce qui me plonge dans un cruel embarras.

20. Lettre de Cécile, elle est devenue une grande conférencière comme sa sœur. Les membres du syndicat agricole nomment leur bureau. Président, R. de Bouillé, vice-président Richard, Abel Raclin secrétaire.

21. Marcelle déjeune à Fontallier.

22. Je suis encore dérangé à trois heures du matin. Yvonne va à Nevers. Foire à Saint Pierre. Chicon et Roy y mènent du nourrain qu’ils ne vendent pas, il ya de la baisse sur cet article.

23. Yvonne et Monique passent la journée à Moulins chez Simone. Marcelle, qui a eu pitié de Silky qui était enfermée dans un box, et pour cause, l’a lâchée un instant, ce qui a suffit pour qu’elle contracte mariage avec un affreux roquet ; on avait promis sa main au cocker d’Antoine Robert. Je fais mettre mon blé en sac. Callot mène six veaux d’un an à la Seigneurie en pension.

24. Jeanne de Lary et sa fille passent la journée avec nous. Marcelle va à Varenne à l’enterrement de Leuferna qui avait trois mois de plus que moi, mais qui depuis longtemps était dans le gâtisme.

25. Les Rameaux. Au retour de la procession, le vent est Sud-est, c'est-à-dire de solaire.

26. Pluie. Berthe Tiersonnier, venant de Nevers, arrive à neuf heures à Mars et en repart à quatre heures et demie. Nous gibernons agréablement avec elle pendant ces quelques heures. Je ne l’avais pas vue depuis un an.

27. Lettre d’Hervé qui a quitté l’artillerie pour faire fonction d’adjudant major dans un régiment d’infanterie. J’envoie neuf paquets de cigarettes à Suzanne de Rouville. Marcelle déjeune à Planchevienne. André Robert me fait part de la naissance de son dix-septième petit enfant, une fille chez les Roulet pour qui cela fait le numéro six.

28. Pluie. Messieurs de La Lande et G. de Vassal viennent faire le logement des scouts qui doivent venir au nombre de quatre vingts. Je les mène à la forêt où ils monteront leurs tentes, ils prendront l’eau potable dans le puits de la Pétasse. J’en ai demandé pour eux la permission à M. Laudet. J’envoie au contrôleur les déclarations d’impôt sur le revenu. Marcelle fait dans l’église le reposoir pour le Jeudi Saint.

29. Jeudi Saint. A trois heures, les scouts nous arrivent à pied de Saint Pierre, beaucoup sont très jeunes et plusieurs sont très chargés, mais tous manœuvrent comme de vieilles troupes, je leur en fais tous mes compliments. Parmi eux, il y a François Jourdier, fils de Guillaume à qui il ressemble du reste. Marcelle leur offre le café et les conduit ensuite à leur campement. Le fermier de la Pétasse met une chambre à leur disposition pour y ranger leurs provisions. Roger de Bouillé leur envoi un mouton tué et des pommes de terre. Madame Le Sueur leur vend un veau. Barreau me fait prendre pour l’emmener à son moulin soixante quatre sacs de blé de quatre vingt kilos. Son camion passe avec peine dans les portes.

30. Pluie. Vendredi Saint. Les scouts sont mouillés. Visite du ménage Henri de Rouville qui passe les vacances à Magny. Lettre de Cécile encore censurée. Elle s’étonne de ne pas voir arriver Yvonne. Le voyage n’est pas facile avec les petites.

31. Le garagiste de Magny vient mettre des cales sous les roues de la Citroën de Marcelle (dreure). Moreau m’amène à Nevers, j’en profite pour déposer une assez forte somme au Crédit Agricole qui donne plus d’intérêts que les Bons du Trésor. Je passe chez Savignat qui n’a pas encore fini de régler le prix pour la succession d’Edith. Je paye la caisse de compensation pour ma bonne, neuf cent trente francs par an. Je fais une visite à notre évêque à qui je me confesse.

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