28.2.11

JUILLET 1940

1 A la commandantur où on devait me payer mon châtron, on me dit de revenir dans huit jours et pour apprendre cette bonne nouvelle, je fais la queue pendant 1h 1/2. Il faut un sauf conduit pour aller à Nevers, je ne peux l’avoir n’ayant pas de carte d’identité. Après déjeuner, les officiers m’annoncent qu’ils vont partir ce soir. Deo gratias. Mais pourvu qu’ils ne soient pas remplacés par de plus mauvais qu’eux, car somme toute, ils ont été convenables. Comme les prés des Petites Granges sont très mal clôturés, ma belle jument grise de 3 ans se sauve à 8 h du matin et impossible de la retrouver, c’est une perte de 15 000 ou 25 000 suivant le cours d’il y a un mois.

2 Je vais à Nevers pour y faire 3 commissions, la première d’acheter un pneu coût 370 F, je paye avec un billet de mille F on me rend la monnaie en Mark, la seconde de changer une paire de souliers rapportée par Marcelle qui me sont trop petite, le magasin est fermé parce qu’il n’a plus de marchandise, le troisième d’aller toucher à la Commandantur le prix de mon châtron, on me répond de repasser après la guerre. Retour par Le Mou, Favier me donne seulement les 2/3 de ce qu’il doit sur son terme de mai. Les rues de Nevers sont pleines d’Allemands qui dévalisent tous les magasins. Zizi Delamalle lors de la fuite générale a fait à pied les 60 km qui la séparent de Moulins. Les Pinet de Curty sont à Salvadura sur les bords de l’Adour. Mabira La Caille est prisonnier au camp de concentration de St Saulge. Marie Thérèse Guillemain ne va toujours pas fort, sa fille est à Nevers chez les Jacques d’Assigny. Marcelle rencontre Solange de Brimond qui lui raconte qu’au moment de la panique générale sa mère, ses sœurs, nièces, petites nièces avaient pris la fuite et erré pendant plusieurs jours sur le plateau de mille vaches (Creuse). De retour au Colombier elles ont trouvé toutes leurs chambres occupées et c’est avec peine qu’elles ont pu les reprendre. L’argenterie a disparu. Les Maremberts occupés de la cave au grenier. A Quantilly, Mimi Barandon mise à la porte de chez elle a dû se réfugier chez son jardinier.

3 Mon rosaire. Toute la nuit des troupes très nombreuses ont traversé St Parize dans les deux sens. A 10 h du matin 3 officiers sont arrivés en auto devant le perron, mais ils ont fait de suite ½ tour et grâce à Dieu, la journée s’est passée sans que nous en voyions d’autres. A 6 h du soir nous recevons une lettre d’Edith déposée à Moiry chez Martinat par quelqu’un se rendant à St Eloi. J’apprends avec plaisir qu’Hervé est au Puy. Bulhon loge encore les Valence et les Champeaux qui ne peuvent pas se procurer d’essence. Yvonne est contente d’y être.

4 Journée relativement calme pour nous, mais à St Parize, il est passé des troupes et la nuit et le jour partant dans la direction de La Chasseigne. Il ne reste plus rien dans les magasins. Les bruits les plus divers circulent. On pense que ça va mal pour les Boches et que les Etats Unis exigent qu’ils aient évacué la France le 7 juillet. Je ne crois guère à tous ces bobards. A Paris on meurt de faim dit-on. Ici je rentre du foin et je fais nettoyer le tour de la maison.

5 Premier vendredi du mois. Je communie. Montrichard sert la messe, tous les enfants de chœur étant absents de même que toutes les gamines de l’école libre. La guerre ne ranime pas la foi. Plus de soldat dans le village, en revanche à Moiry où je vais chercher de la ficelle de moisson, j’en vois passer sans arrêt dans les deux sens. La ficelle coûte 1030 F les 100 kilos, plus du double que l’année dernière. A 6 h nous avons la visite de G du Verne retour de Sancoins où il a conduit une infirmière qui a soigné pendant quelques jours Marie Thérèse qui est actuellement au château de Tintury appartenant à M. Prégermain où l’on a installé une maison de repos.

6 Pluie. Un orage nous amène une pluie très bienfaisante car tout est horriblement sec, et qu’il n’y a plus d’herbe dans les prés mangés. Marcelle et Josefa vont à La Chasseigne où elles trouvent la Comtesse ramassant les doryphores sur ses pommes de terre.

7 Pluie. Dimanche. Suzanne, Pierre et Henri de Rouville viennent nous voir à pied à travers les craies, ils nous annoncent des nouvelles très gaies, les Anglais ont bombardé notre flotte dans le port d’Oran, tué mille matelots, coulé le Dunkerque notre plus beau et récent bateau. Le Parlement se réunit à Vichy pour voter une nouvelle constitution, elle sera propre étant votée par les Chantemps, Sarraut, Herriot, Blum et consorts, tous ceux qui ont mis la pauvre France dans l’état de décomposition où elle se trouve. Je suis profondément découragé.

8 Il passe deux régiments à St Parize, un d’infanterie un d’artillerie. Heureusement nous n’avons personne à loger. En traversant la cour du domaine, je trouve deux jeunes gens parlant avec mes métayers, ils appartenaient à un bataillon de chasseurs à pied et ont été faits prisonniers près de Forbach. Parvenus à s’échapper, ils regagnent leur pays de Haute Loire à pied en empruntant les petites routes. Ils disent avoir été écrasés par le nombre le 12 mai, manque d’avions et de matériel chez nous. Cette débandade fait peine à voir. On se demande ce qui reste de notre armée.

9 Il fait un temps admirable, dont on jouirait agréablement si l’on avait moins de soucis. Je viens d’avoir avec mon métayer Roy qui était de mon avis la conversation suivante, c'est-à-dire que s’il y a 20 ans, comme le journaliste Hervé le conseillait, nous avions fait alliance avec l’Allemagne, nos deux pays eussent été imbattables et ils auraient eu sous leurs bottes l’Angleterre, l’Italie et la Russie. Si mes enfants me font l’honneur de lire un jour cette pensée, je ne sais pas ce qu’en diront mes deux aînées, mais bien sur Marcelle dira que j’ai toujours eu de l’admiration pour le Boche. En cela je reconnais que si nous avions fait comme eux, en ayant un gouvernement qui se serait fait respecter, en ayant des lois raisonnables et qui n’aurait pas obéi aux ordres de la Franc maçonnerie, comme cela est arrivé depuis 60 ans, nous n’en serions pas là. J’ai taillé 10 mètres de la haie vive du Clou en ¼ d’heure, il faut donc 1 minute ½ par mètre courant. Il y a 207 mètres du manège au chenil. Ceci à 85 ans.

10 Nous allons à Nevers, Josefa, Marcelle et moi. Louis garde la maison car il a mal à un pied. Il n’y a plus de commandantur pour vous arrêter sur la route, mais encore beaucoup de Boches dans les rues. Je voulais me faire couper les cheveux, mais il y avait 5 Boches à passer avant moi, j’y ai renoncé. J’ai tenté encore une fois de chercher des souliers, chose introuvable. Henri Cote est à la clinique Sallé pour des anthrax au cou, il se fait un mauvais sang terrible. Ils vont abandonner les Réaux à l’occupation et se retirer à Clermont. Le Général Weygand occupe leur hôtel qu’ils partageront avec lui. Retour par Chevenon. Le château est rempli de Boches, il y en a même dans le grand salon et j’en vois assis à peu près nus sur les appuis des fenêtres au premier étage. Inutile de dire que les du Part en sont excédés.

11 N’ayant pas pu me faire couper les cheveux à Nevers, je fais venir Madame Thierry la coiffeuse de St Parize qui m’accommode dans la perfection avec mes ciseaux, ma tondeuse et mes brosses. Je n’aurai donc plus besoin d’avoir recours aux artistes de la ville et surtout à leurs accessoires. Je fais de nombreux piquets avec Louis, cela le distrait, car il marche très difficilement.

12 L’Espagnol qui est domestique à Callot et qui avait fui jusque dans le Lot au moment de la panique générale, vient de rentrer à petites journées de Cahors jusqu’à Moulins. Il n’a pas vu un Boche et dans cette dernière ville, il y en a beaucoup et ils y font la police, il n’a pu en sortir qu’à cause de sa qualité d’Espagnol, ouvrier agricole. Les ponts du Veurdre et de Mornay sont gardés rive droite par les Allemands, rive gauche par les Français.

13 Je fais passer à nouveau mes pommes de terre à l’arséniate. Je vends le taureau des Petites Granges qui n’est qu’à moitié gras 6 le Kilo et le veau de ma Bretonne 1180 à Besançon pour Nevers, parce qu’il en fournit quelques uns pour les hôpitaux, sans cela en ville on ne mange que du frigo, ordre de la municipalité. Je lis le journal de Locquin paraissant à Nevers les mercredi et samedi. Il ne dit pas grand-chose. C’est terrible de ne pas avoir de nouvelles ici ni poste ni télégraphe. Le garde Jeanty que j’emploie me compte des journées de 12 h à 3 F. Je lui dis que 10 me suffiront.

14 Dimanche. Triste fête. On commence à recevoir des lettres. Fleury en a une d’un de ses fils prisonnier en Allemagne. Couillart de St Parize revenu du camp de concentration de Clamecy, dit que les détenus y crèvent de faim. Chaque jour deux petits morceaux de pain et une tasse d’eau tiède au fond de laquelle, il y a un peu de farine. Quant à l’eau potable, elle fait défaut.

15 Pluie. Un Paris Soir est arrivé à St Parize, il y est dit que les Parisiens peuvent rentrer dans la capitale, aussi deux ouvriers qui travaillaient depuis quelque temps aux Petites Granges partent ce matin. Notre village est encore rempli de Boches.

16 Pluie. De bonne heure, j’ai la visite de M.M. Barle père et fils de Chantenay. Ils vont ce soir à Sens Yonne chercher un des leurs prisonnier dans cette ville et qu’on libère comme ouvrier agricole. Le Colonel de Sansal étant lui aussi prisonnier dans ce camp me fait demander des nouvelles d’Hervé. Je lui en donne avec plaisir. On me dit qu’il vient de passer à Moiry 3 000 prisonniers allant de Roanne à Fourchambault par petites journées et couchant sur la route. Dans la soirée, j’apprends que mon jardinier Baudry est lui aussi prisonnier à Sens. Marcelle va à bicyclette à Planchevienne qui est occupé de la cave au grenier par de nouveaux Boches. On a des nouvelles de Jacques qui est à Périgueux. Je reçois mon bordereau d’impôts de Chevenon. En 39 j’ai payé 163 F, en 1940 c’est 222.

17 Pluie. Marcelle conduit ma jardinière à Fleury afin qu’elle s’entende avec la fermière de l’Atrechant pour qu’ensembles elles aillent à Sens chercher leurs maris détenus. Nombreuses lettres d’Hubert de la fin de mai, le cher garçon est encore plein d’espoir. Lettre de mon beau frère du 16 juin. Il leur arrive des réfugiés de partout, ils sont obligés d’envoyer Anne de La Brosse à Moulins chez Madame de St Martin. Marie Thérèse Robert a quitté Buy, je ne sais où elle est. Avec ces pluies continuelles, le jardin est envahi par le pourpier sauvage et autres herbes.

18 Rien de nouveau, beau temps. Michel coupe son orge d’hiver. Les Louis reçoivent de vieilles lettres d’Odette qui doit être à Châteauroux.

19 Nous voulions aller à Nevers, à la Kommandantur de St Parize, le capitaine étant absent on ne peut nous donner l’autorisation.

20 Ce matin on me la donne, après des pourparlers sans fin. On me donne un laissez passer pour Nevers, nous y allons avec les Louis. A la clinique Sallé, Louis consulte le Dr qui lui ordonne de rester étendu pendant 3 semaines. Vu Cote qui souffre toujours de son anthrax. Vu Mse de Ganay qui a de bonnes nouvelles de ses 3 fils. Elle me dit qu’il y a 10 jours les Anginieur ont ramené les petites Champeaux à la Comaille. Madame de Sansal a une lettre d’Hervé du 4 juillet, il est à 15kilomètres du Puy dans un village où il fait l’instruction d’une compagnie de recrues. A la Kommandantur qui a élu domicile à l’hôtel de France, je présente mon mandat, qu’on ne me paye pas, j’en présente un autre, Français celui-là à la poste. Pas d’argent. Cela ne m’empêche pas d’acheter une paire de souliers de chasse, cuir jaune et gras qui conviendrait mieux à un garde qu’à son maître. Coût 390 F. En revenant, je demande à Guérant, maire de Magny et régisseur de Sermoise, s’il sait quelque chose de ses habitants. Il me dit qu’il y a 3 semaines, Antoine est revenu du front laissant sa formation en débandade et que le lendemain, en deux autos, il a emmené sa belle mère, sa femme, sa belle sœur et au passage à Buy sa mère à Libourne où ils doivent être encore. Le château a été pillé par les Français d’abord et ensuite par les Boches qui l’occupent encore (mention marginale : ceci exagéré). On m’a appris hier que Bob Le Sueur qui s’était réfugié chez sa sœur à Volvic est mort subitement pendant une promenade qu’il faisait à bicyclette avec son fils. Nous manquons la visite de Gabriel Mathieu. Rencontré G de Montrichard qui a de bonnes nouvelles de ses trois fils. Pierre est chez ses beaux parents en Bretagne, en vertu de quoi ?

21 Dimanche. Peu de monde à la messe. M. le curé monte en chaire oubliant d’ôter sa chasuble, mais parle très bien tout de même. Je vois deux Boches chassant dans le pré de La Joie, descendant des Craies, où ils ont tiré deux coups de fusil.

22 Il pleut sans arrêt. Des orges déjà coupées vont pourrir dans les champs. Tout va mal. Comme exercice, je fais des margotins.

23 Pluie. Marcelle va à bicyclette faire une visite à Madame Mathieu qui se morfond au milieu de tous les Boches qui encombrent sa maison. Pas de charbon au dépôt de Mars. Un bruit se répand un peu partout, bien sûr propagé par la 5ème colonne, c’est que dans bien des formations, les officiers ont abandonné leurs hommes.

24 Pluie. Georges, Agnès et Michel Robert viennent me voir. Ma nièce dont je fais la connaissance est moins mal que je ne le craignais. Ils sont venus à Buy par Angoulême et Tours et partout dans le moindre village, ils ont vu des Boches. Marie Thérèse retour de Libourne est installée au Plaix. Lisbeth avec ses filles est aux Salles. Maurice avec l’escadron qu’il commandait à Moulins, tient garnison à Vichy. Antoine Clayeux est sous ses ordres. Georges a trouvé les domaines de Buy à l’abandon, aussi il va les prendre en main. Il a acheté un tracteur qui lui coûte plus de cent mille francs. Antoine qui était maréchal des logis au moment de la débâcle a quitté le front avec une auto militaire emmenant avec lui 4 de ses hommes. Ils n’ont pas pu arriver à Angers où était leur dépôt pour se faire démobiliser, mais ils l’ont été dans une autre ville à titre d’agriculteur. Je n’entends parler que de soldats ayant fui le front en disant : nos officiers sont partis les premiers. Je ne peux pas croire cela. Peut-être y a-t-il eu quelques défections, mais ce ne peut-être une généralité, au moins je l’espère.

25 Pluie. Je reçois une lettre d’Edith, datée du 17. Ils vont bien et ils ont des nouvelles de Cécile. Jean a pu reconduire sa mère et ses sœurs à Boutavent. En fait d’étrangers, ils n’ont plus que Guite de Sansal. Simone va tâcher d’aller retrouver Hervé au Puy. Lettre de Madame de Lépinière. Roger est prisonnier et Guillemain dans une ville du Midi. Elle-même aux Loges est prisonnière de Boches qui occupent les 9 dixièmes des Loges. Mais Marie Thérèse va mieux, elle doit quitter Tintury dont les Boches feront un hôpital pour eux. Mon jardinier Baudry est revenu hier de Sens où il était prisonnier et où il crevait de faim. Il va trouver son jardin bien sale. Avec les pluies persistantes les mauvaises herbes envahissent tout. A 11 h, je suis agréablement surpris en voyant les Faverges mère et deux grands fils s’arrêter devant le perron. Ils partent pour Bulhon afin d’être plus près de la faculté en vue de la session du Bachot. La cocote prend mes vaches comme en 1938. C’est la Bretonne qui est la première atteinte de toute mon exploitation.

26 Pluie. Deux lettres d’Edith, une du 14 l’autre du 20. Albert Barillet est venu échouer à Bulhon. Je ne sais comment il aide à faire les foins. C’est probablement parce qu’il est dans la zone non occupée qu’il ne peut pas revenir ici. Le 4 d’artillerie est à Riom et c’est par son ami Ridoux de ce même régiment que Jean a pu avoir 40 litres d’essence pour reconduire sa mère à Boutavent. Jean de Durat s’est tué en motocyclette jour pour jour, près de Cropte au même endroit où il y a 15 ans son plus jeune frère avait trouvé la mort également en moto. Je lis Le Matin et Paris Soir qui ne m’apprennent rien car ils sont rédigés par des Boches. On dit que les Anglais ont des avions électriques, qui grâce à leur silence peuvent aller incendier Berlin et autres villes la nuit. Est-ce vrai ?

27 Samedi. Marcelle et Josefa vont à Nevers de bonne heure. Elles apprennent que de nos amis sur lesquels on était inquiet, sont prisonniers dont Adenot, Pierre de Noblet, Robert Pinet, Joseph de Champeaux, de Busonnière etc. Elles ramènent Marie Antoinette du Verne pour 3 jours. Je manque la visite d’André, allant de Moulins à Nevers pour son service de croix Rouge. Son gendre est prisonnier. Il donne à Louis de bonnes nouvelles des Gouttes. Edmond qui avait une bonne provision d’essence, se l’est vu séquestrée par les gendarmes. Il paraît que la vie est plus difficile dans la zone libre que dans celle qui est comme chez nous.

28 Dimanche. La conversation est agréable avec M. Antoinette qui a étudié et a beaucoup retenu. Visite de nos voisins Rouville venus à pied. Marcelle va voir Suzanne Le Sueur de passage à Villars.

29 A 8 h du soir, arrive un officier me demandant à loger 2 officiers, 4 sous officiers et une vingtaine d’hommes dans des lits. Je lui fais voir les chambres du vieux château pour les soldats. Il ne les trouve pas convenables, pas plus du reste que les mansardes de la maison. Seules les chambres du premier étage ont le don de lui plaire. Ils viendront demain les occuper.

30 J’étais encore au lit quand le premier détachement entre dans la cour. Les soldats envahissent tout le premier, exigent même qu’on leur ouvre la chambre de Marcelle et prennent également les mansardes que l’officier n’avait pas trouvé dignes d’eux. Il y a une quarantaine d’hommes entassés là. Peu de temps après leur arrivée, la plupart se mettent en costume de bain, qu’ils gardent jusqu’à 9 h du soir en jouant aux cartes sous les arbres de la pelouse. Ils veulent mettre à couvert leurs 7 voitures, aussi nous envoyons notre auto et celle de Louis au domaine. Heureusement leur cuisine est faite à Moiry et ils nous laissent la notre libre ainsi que le salon. Comme un ennui n’arrive jamais seul, le jardinier m’annonce que ma vache Normande est crevée de la cocote. J’appelle l’équarisseur qui l’enlève avec une taure de 2 ans de Callot. En voila pour une huitaine de mille francs. Je reçois une lettre de Cécile qui va bien, ainsi que son beau père. Rennes a beaucoup souffert du bombardement, on parle de 7 000 morts. Le Boulevard Sévigné a été épargné.

31 Cécile a tout de même eu dans sa maison pas mal de dégâts causés par la déflagration. Son auto a été volée. Lettre d’Edith, des Gouttes, d’Hervé celle-ci tapée par lui à la machine à écrire n’a mis que 3 jours pour nous parvenir. Le Colonel de Place est mort ainsi que M. Pierre de Valence. L’hôtel des Monnier à Tours complètement brulé. La Tour Baudin aux Valence brûlée aussi. La nuit a été calme et les 42 soldats que nous hébergeons nous ont laissé dormir paisiblement. Nous n’avons entendu que la relève du factionnaire qui monte la garde autour de la maison. A 2 h devant les marronniers face au perron, les 42 soldats ont passé une revue d’armes à poil,avec le fusil en bandoulière, cela faisait un drôle d’effet. Arrivés à 3 h, les Faverges ont pu jouir de ce charmant spectacle. Ils nous ont apporté des nouvelles toutes fraîches de Bulhon où l’on va bien. Simone est allée trouver Hervé à St Etienne. Jean de Valence ira probablement en août dans un régiment d’Artillerie qu’on formera à Issoire. Guitte de Sansal reste toujours à Bulhon.

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