1ER Fête Nationale décrétée par Pétain qui s’appelle Philippe. Celui-ci visite aujourd’hui Montluçon et Commentry, cités ouvrières. Heureusement, mes métayers travaillent, mais les maçons ne viennent pas. Je fais planter mes pommes de terre personnelles dans la Varenne Callot. À 3h, 4 officiers Allemands débarquent dans la cour et me demandent combien je peux donner de chambres et ils repartent. Lettre d’Édith, le ménage Riberolles est allé voir les Valence pendant les vacances de Pâques, Hervé en est revenu avec la jaunisse à Douera près d’Alger. Je lui écris aujourd’hui sur une carte de zone. J’ai comme cheptel 162 bêtes à cornes. Mais pour les chevaux, cela va toujours très mal. Charlotte a mis bas un beau poulain qui est crevé 12 h après sa naissance.
2 . Magdinier vient me voir et me fait lire une lettre qu’il écrit à Chassagnon pour lui donner la preuve que ses comptes sont en règle, pour les versements qu’il a effectués vis-à-vis de lui, pour les bois que je lui ai vendus. Je lui fais rectifier la chose, en lui faisant remarquer que c’est Chassagnon l’acquéreur, et non pas lui, et que jusqu’à preuve du contraire, c’est Chassagnon que je considère comme responsable vis-à-vis de moi. Premier Vendredi du mois, je m’approche de la sainte table, et après j’ai un entretien avec Dom Blot, sur la façon de monter l’ornement auquel je travaille. Lettre de M. Th Anginieur qui nous donne de bonnes nouvelles de Bulhon. J’écris par l’intermédiaire du vétérinaire qui me dit que la septicémie qui, jusqu’à présent ne sévissait que sur les veaux, va maintenant s’attaquer aux poulains, c’est de cela que le mien a été atteint et dont il est mort. Dorénavant, pour les sauver, il faudra faire des piqures aux mères pendant la gestation. Marcelle a fait une chapelle dans le bureau et à 7 h du soir, les enfants de la propriété viennent chanter le Mois de Marie.
3 . Marcelle déjeune avec les amoureux qui sont rayonnants, ils cherchent à acheter une propriété pour s’y installer. À 5h, ils viennent goûter ici, Beloute est très en beauté.
4 .glace Il gèle très fort, nos pommes de terre sous les châssis, sont perdues, ainsi que les fraises. La lune rousse tient sa parole malfaisante. Marcelle goûte chez les Le Sueur. Longue lettre venue par Corbigny d’Édith, il parait qu’Augustin va aller nus pieds, il ne trouve plus ni souliers, ni sabots. J’écris à Hervé à Douera, près d’Alger.
5 . Tout le monde ramasse les escargots, cela en vaut la peine car on les vend 25 frs le cent. Hier, vente aux enchères à Mars chez le père Bellavoine, un âne déjà âgé est monté à 11ooo, je dis 11ooo et 14ooo avec sa carriole. La famille Jeanty au complet part sur un énorme camion avec tout son mobilier pour Chivry. Janot Chavane qui est en séjour à Nevers chez sa tante nous fait une petite visite, son frère attend son 5 ème enfant à Freland qui est dans la zone interdite. À l’automne, il a passé deux mois au Play, il est très lié avec Antoine.
6 . Je donne à ma cuisinière une bouteille de vin pour deux jours, elle la boit dans sa journée, les ivrognes sont incorrigibles. Montrichard, très aimablement, vient nous prendre pour nous conduire à Nevers, il craint de devenir sourd, en tout cas, il vieillit bien. Je passe dans nos banques pour mettre nos comptes à jour. Visite à Madame Pinet.
7 . Toujours le vent de bise qui fait rentrer l’herbe en terre. Un garde du S.H.Club vient de Moulins me demander de la part de Maurice si je veux faire garder une chasse. Je vais réfléchir à cela.
8 . Gabrielle de Rouville venue par le car du jeudi, déjeune avec nous. Suzanne Le Sueur vient goûter avec elle. Georges Robert, qui est pour qq jours à Buy avec son épouse lui a dit qu’avec sa mère, ils échangeaient du papier timbré, leur cohabitation doit manquer de charme.
9 . Marcelle va au Mou, elle y trouve Garuet avec un plâtrier et ensemble ils voient les travaux à faire pour nettoyer la cuisine et les chambres, elle revient par le Colombier, où elle goûte. Je fais le mois de Marie aux enfants. À 4h, deux Allemands s’arrêtent devant le perron, j’ai peur que ce soit de nouveaux occupants, heureusement non ! Ils viennent depuis Moulins chercher des œufs, je ne peux les satisfaire, en l’absence de la patronne.
1o . Il est tombé qq gouttes d’eau et il fait plus froid qu’avant. Auguste Château vient me payer le terme du 11 Mai et m’apporter le sous-seing qui prolonge leur fermage jusqu’au 11 Nov 42. Joly, garde, m’écrit que 2 espagnols cantonnés à St Ouen coupent des baliveaux dans le paturail de la Claie, je lui dis de prévenir les gendarmes.
11 .Ste Jeanne d’Arc Montrichard, en l’absence de sa femme déjeune avec nous. À 6 h, coup de téléphone de Reine Fournial, de St Germain en Laye, disant Henri Dhané décédé. Pauvre petite veuve, avec une dizaine d’enfants. À déjeuner, je me suis aperçu que le vin était très clair, je l’ai goûté et j’ai constaté que ma cuisinière l’avait fortement baptisé. Je l’ai fait venir, elle a avoué sa faute, je l’ai fortement grondée. L’ivrognerie est donc un défaut duquel il est difficile de se guérir.
12 . J’écris une lettre de condoléances à Magdeleine du Part, Marcelle à Simone. Guite de Sansal vient aux provisions, œufs, fromages, épinards et mange une tartine beurrée à son goûter. Je sème des graines de foin dans la basse cour qui se nettoie lentement.
13 . Légère pluie Je touche 3ooo frs pour le bœuf pris le 26 Juin par les Allemands + 3oo frs pour leur logement, je n’y comptais guère. Les Antoine Robert allant de Sermoise au Play nous font une visite en passant.
14 . Marcelle prend le train à 7h pour aller à Nevers avec Madame Mathieu pour aller suivre une retraite prêchée par un père Jésuite chez les petites sœurs de l’Assomption ; elle couche chez Madame de Sansal. Lettre de Dédette, tous vont bien. La correspondance est rétablie entre les deux, mais simplement avec des cartes postales non illustrées, sur lesquelles on a 7 lignes, où il ne faut écrire que des choses à caractère familial. Je m’en sers pour écrire à Edmond.
15 . Marcelle revient à 7 h du soir de Nevers où elle a trouvé 2o dames suivant la retraite dont Mesdames de Thoury, de Villaines, de Ganay, cette dernière a maigri plus que toutes les autres, il est vrai qu’elle avait beaucoup à perdre. Je fais le mois de Marie avec les enfants.
16 . Marcelle va à Nevers à bicyclette pour la dernière journée de sa retraite, elle y rencontre Math. Anginieur qui devient très sourde ; Perette va mieux, elle a pu descendre au rez de chaussée.
17 . Les 2 gardes du S H C viennent reconnaître la propriété, Chicon leur fait voir les limites son domaine et les Craies, Marcelle le coté des Queudres et le Paturail Masle. Je leur paye mon entrée dans la maison 345 frs. Le charpentier de Nevers vient voir le toit des Petites Granges qu’il couvrira le 23 ? Au moins il le dit ! Depuis hier, les Allemands mettent des vigiles sur les clochers des villages, 2 hommes montent la garde pendant 24 h, ils sont recrutés parmi les hommes de la commune âgés de 18 à 55 ans, leur consigne est de voir si des bombes incendiaires lancées par les Anglais n’ont allumé d’incendies.
18 . pluie Chicon vient me payer le terme du 11 Mai, 5ooo frs. L’électricité a été mise dans son domaine, coût 3ooo frs. Bringault a fait venir le tracteur de Buy pour labourer ses terres.
Dimanche, en chaire, Mr le Curé prend le Maire à partie pour la violation de la sacristie qui, du fait de la garde au clocher, est devenue un corps de garde. Heureusement, après explications entre eux, tout s’arrange.
19. pluie Marcelle Sté Gale 59 ooo, moi 9ooo.
1er Jour des rogations. Il tombe une pluie bienfaisante, la végétation se réveille, on voit l’herbe pousser, il n’était que temps. Edmond me téléphone de Dompierre que grâce à son gazogène, ils viendront déjeuner avec nous Vendredi. À l’avance, je m’en réjouis. Gonin dépose un tombereau de sable devant le perron, et grâce à mes 86 ans, je l’écarte à moi tout seul, j’en suis le premier étonné. Toute ma vie, j’ai eu le culte des allées bien tenues. En fait de jardinage, je ne connais que cela. Cheveux.
2o . Chicon et Roy me rentrent du bois, ce dernier le prend aux Champs Blonds, coupe Chassagnon, qui doit m’en donner 5 petites cordes, il en amène 2 cordes + ¼
21 . Je mène mon âne à Moiry pour le faire ferrer. J’y rencontre Madame Le Sueur qui me conseille de demander le concours du génie rural pour m’aider à payer l’installation de l’électricité au Lieu Maslin. C’est ce que je m’empresse de faire. Mes métayers m’envoient leurs domestiques pour travailler dans mon jardin pendant qu’ils roulent des bourrées à Chenut.
22 . Je traîne mes sabots dans les prés, je marche aussi bien qu’avec mes souliers, je ménage ces derniers car il est à peu près impossible d’en racheter d’autres.
Ascension. Pas mal de monde à la messe bien que ce soit la foire à St Pierre où il y 3 vaches en tout, l’une avec son veau, vendue 95oo à Seguin, du Crot de Savigny, une autre 7ooo à mon fermier Garuet qui est repassé par la maison. Il n’est pas satisfait de ma générosité parce que je ne veux dépenser que 5ooofrs pour nettoyer l’intérieur de sa ferme.
23 . pluie Nous avons la joie de recevoir à déjeuner les Edmond et Geneviève Clayeux, amenés par le gazogène. Bonne nouvelle de la marraine qui continue à tenir la cuisine, mais ne voyant plus clair, elle se désintéresse du jardin. On va mettre de la lingerie dans la chambre de son mari. Les charpentiers devaient venir aujourd’hui aux Petites Granges, mais je n’y vois personne. Je vais secouer l’architecte, à Bonay, tout est fini. Edmond vient de vendre à Audin des chênes 55o frs le mètre cube. Les Guillaume du Verne allant de Sancoins à Nevers nous font une petite visite en passant, Suzanne a bonne mine bien qu’elle se plaigne de rhumatismes.
24 . pluie Marcelle était invitée à déjeuner à Planchevienne avec Thérèse de Toytot, elle se décommande parce qu’elle était rentrée gelée de la messe, elle se contente d’aller l’embrasser dans l’après-midi parce qu’il faisait moins froid. J’ai un trèfle dans les Craies qui craint le froid autant que Marcelle et qui pour cette raison n’a pas pu quitter la terre, il sera inutile de le faucher.
25 . Lettre de Roger qui me dit que son neveu Dani est mort à 49 ans, laissant 1o enfants et une belle propriété en Italie mise sous séquestre, qui ne rapporte pas un sou
Dimanche Le Maréchal Pétain ordonne de fêter les mères Françaises, chaque municipalité le fera comme elle le voudra. À St Parize, notre curé a pris la direction de cette fête. Avant la grand’messe, réunion des mères de familles avec leurs enfants, celles qui en ont le plus sont à l’honneur, reçoivent des bouquets tricolores et un compliment du curé. Une procession assez nombreuse se forme et défile par le champ de foire et la place de la poste tout en chantant des cantiques et le Magnificat jusqu’à son retour à l’église. Madame de Montrichard, en sa qualité de Présidente de la Ligue portait la bannière qu’elle a trouvée bien lourde.
26 .pluie Les charpentiers de Fourchambault arrivent enfin aux Petites Granges avec le bois nécessaire. J’ai la visite de Chassagnon, qui consent à céder son marché de bois à Magdinier. Je suis bien aise que tout s’arrange.
27 . Jacques vient nous dire qu’il ne viendra pas déjeuner demain avec sa fiancée comme c’était convenu parce qu’elle suit au château d’Azy une retraite prêchée à une trentaine de jeunes filles du monde par sa Grandeur Mgr Flynn sous la haute direction de M.A. du Verne dont Mlles de Croÿ, de Sansal, de Galembert, de Villaines, Gozard, Le Sueur, 2 Talabot, de Villenaut, F. Bernard etc …
28 . pluie Lettre de Cécile qui va bien, je lui répond par courrier. Ce temps mouillon convient aux récoltes des Craies, particulièrement à celles qui touchent les Queudres et qui avaient bien souffert de la gelée pendant l’hiver.
29. Marcelle déjeune à Buy où elle trouve Madame Charlenf. La conversation roule sur la discorde qui règne entre Georges et sa mère. Pour plaider contre son fils, elle a pris Girard comme avocat et Dubot comme avoué. Après Buy, Marcelle va goûter à Fontallier. Je descends à Moiry chez Arbant qui revendiquait l’écornage des têtards qui entourent le bois des Antes. Il se rend compte qu’il a tort après mes explications. Vu Bertier qui va embarquer une jument achetée trente cinq mille francs, j’écris cela en toute lettre. Le tracteur de Georges laboure au lieu Normand.
3o . pluie Les du Part avec Chantal et Anne de Rouville déjeunent avec nous. Dans l’après-midi, les deux jeunes filles vont se promener à St Pierre, ville pleine de Boches
31 . Gonin me demande de lui faire faire une cuve en ciment pour recueillir ses purins et les mener dans les Craies. Pour une cuve contenant un mètre cube, 2m x 1 x o,5o, Perrier me demande 89o frs. Je vais voir ? Gonin voudrait aussi avoir un petit hangar pour y mettre sa chaudière à légumes, je vais lui prendre pour cela les planches de l’abri que mon locataire de chasse Crotat avait bâti pour loger son auto.
Marcelle va à Nevers en bécane et revient par le Mou pour s’occuper des réparations. Madame Garuet trouve que les cinq mille francs que je veux y consacrer, c’est bien peu de choses. Je fais le mois de Marie avec 14 enfants.
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6 commentaires:
A la date du 11 décès d'Henri Dhané, je pense qu'il pourrait s'agir d'Henri Darré époux d'une fille du Part que je n'arrive pas à relier à la généalogie sautereau du part.
Il vous reste encore quelques années pour écarter le sable devant le perron.
Merci pour ces lignes! c'est vraiment le feuilleton!
J'ai des dizaines de questions qui me viennent en lisant et je suis toujours étonné de découvrir le quotidien pendant la guerre. Grand-Père Robert l'aborde avec humour - Mme de Ganay avait beaucoup à perdre - et même si on a beaucoup entendu que la faim était bien présente pendant ces années, je ne réalisais pas que des choses aussi simple que des chaussures étaient alors devenues impossibles à ce procurer.
Merci encore Yves et Papa pour ce travail de fourmi!
par exemple, une question d'Histoire: qui dédommageait alors le logement des allemands ainsi que les 3000 francs pour le boeuf? la municipalité? l'état? l'Allemagne?
L'Allemagne sans doute, sauf peut-être pour les réquisitions
le maréchal aimait bien les fêtes, 1er mai, fête des mères ... si madame de Montrichard avait vu comme Geogeo porte bien l'étendard !
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