
(petit dessin (10x5 cm) sur feuille volante dans le 23ème cahier et daté du 18.2.42. Au verso, dessin du Wellingtonia)
17 - 5° neige. J’entame ce 23° cahier par une fâcheuse histoire, pour dire qu’au domaine de Tâches depuis deux ans, l’élevage des porcs va très mal. Il y en a qui crèvent, les truies avortent etc. Je vais faire désinfecter les écuries. Il fait un vent de bise c.à d. NE qui vous déshabille. Je n’ai pas achevé ma promenade tellement j’avais froid. Cécile nous a envoyé du bon beurre de Bretagne. Il est le bienvenu car ici, il est introuvable. Ma métayère des Petites Granges revient de l’hôpital, pavillon de gynécologie, où le confort ne règne pas, mais elle va mieux. Par des chemins horribles et le dessous de mes sabots pleins de neige, je me traîne au domaine de Tâches pour peser des génisses que je veux vendre. L’une de 22 mois pèse 320 k, une d’un an de plus 440 k. Marcelle va au Veurdre d’où elle téléphone aux Gouttes et à Bulhon où Yvonne et ses filles sont arrivées à bon port. Monique dévore. Retour très pénible dans la neige.
18 -7°. Mercredi des Cendres. Malgré tout mon désir de recevoir les cendres, je garde le coin du feu, les chemins toujours impossibles pour mon âne ; Marcelle va à la messe chaussée de mes grosses bottes de caoutchouc. Nous avons la visite de notre curé. Georges Robert, Fouret et autres malins qui avaient acheté l’île verte pour
180 000 F, viennent de la revendre 12 millions. Madame Lesueur, qui avait pas mal d’actions touche la forte somme, Jeanot Chavane aussi.
19 -9°. Vu Albert Barillet, basse courrier de M. Bariol à Gy, 103 hectares, 108 bêtes à cornes, 10 chevaux. S’il voulait revendre cette propriété, il gagnerait gros. Il est vrai qu’il y a dépensé beaucoup d’argent. Michel occupe un Espagnol venant de la zone libre qui travaille bien mais n’a pas de tickets pour sa nourriture. Il y a aujourd’hui six Espagnols sur la terre de Tâches. N’ayant plus rien à donner aux cochons, on les mange tout petits.
20 -9°. Le froid et un givre épais qui embellit les arbres mais refroidit la vue. Jacques déjeune avec nous et part à Sancoins d’où il gagnera Bulhon et Alger, où il retrouvera son frère qui y tient garnison. Longue lettre d’Edmond, une suite de jérémiades, blés avoines gelés, les juments et les porcelets crèvent, plus de charbon pour le gazo etc.
21 -10°. Louis Monnier envoie à Marcelle une boîte à casiers pour la remplir d’œufs. Ce Parisien ignore que par dix degrés de froid, les poules ne pondent pas. Gazoute de Villaines subit une assez grave opération à la clinique Sallé de Nevers. Paule est installée chez M.A. du Verne. Marcelle va faire une visite de charité à la Chasseigne où elle trouve la comtesse dans sa chambre en train de frotter des peaux de lapins. Je viens de lire Napoléon III par Aubry, ce qui m’a intéressé. J’ai vu qu’un de ses livres de chevet, c’était Don Quichotte. J’ai eu la curiosité de le relire. Je trouve cela purement enfantin.
22 - 0°. Dimanche. Il dégèle un peu, mais les routes sont encore trop glissantes pour que mon âne me conduise à la messe. Je lis avec intérêt un livre que m’a envoyé M. de Montrichard. Eclaircissement sur Mein Kampf, de Benoit Méchin. Livre qui a changé la face du monde. Mon Combat.
23 +2°. Il dégèle un peu, j’en profite pour aller faire quelques courses à St Parize. A la Poste, je vois partir quantité de colis de 3 kilos de pommes de terre et de poireaux à 7 francs le colis. J’assure 4 juments poulinières contre la mortalité. Marcelle soigne avec des compresses chaudes, sa jambe qui a été meurtrie en tombant de bicyclette.
24 +4°. Le vétérinaire Richard vient délivrer trois vaches dans les domaines. Marcelle continue les compresses chaudes.
25 +4°. Nous avons la visite des Pierre de Rouville et de Suzanne Le Sueur. Il paraît que Jacques qui par l’intermédiaire de Melle Bouquillard avait obtenu un laissez passer pour franchir la frontière à Mornay, a été complètement déshabillé par les Boches et trouvé porteur d’une lettre de sa tante Gabrielle qui lui parlait de son voyage à Alger et dont il n’avait aucun besoin. On l’a tout de même laissé entrer et aller à Sancoins d’où il a pu gagner Clermont où il sera surveillé et où il est descendu chez les Cote, Cours Sablon. Carte d’Hervé qui attend vainement sa belle mère. A 9 h ½ du soir, Cécile nous téléphone que son beau père va plutôt mieux, que des amis lui ont donné du bois et qu’elle nous enverra du beurre, ce qui fait complètement défaut ici.
26 -1° neige. Le Comte de Monterno meurt au Bost à l’âge de 85 ans. Il n’a qu’une fille, la comtesse de Raincourt qui n’en a qu’une également. Foire à St Pierre. Temps sombre, triste, j’ai la tête lourde, je trouve pourtant bon, le bœuf à la mode. Téléphone de Mme de Savigny, naturellement c’est pour demander des domestiques à Marcelle. Il paraît qu’au Colombier, il n’y en a plus du tout. C’est Mériem qui assure tout le service.
27 -0°. Temps aussi triste qu’hier. J’assure 4 juments poulinières pour la mortalité au moment du poulinage. La mère seule assurée coût 2850 F, c’est plutôt cher. Téléphone des Clayeux de Moulins, rien de nouveau à 2 h, mais à 7 h ½ par les Gouttes et Madame XX nous apprenons qu’Hubert de R. est débarqué ce matin à Tlemcen. Deo gratias ! Tout le monde doit être content, mais la grand-mère n’a pas encore son laissez-passer.
28 -1°. Pendant ces 28 jours, il a été enterré dix personnes dans le cimetière de St Parize, bien qu’il n’y ait pas eu d’épidémie. Je travaille pendant deux heures dans les allées du jardin. Lettre de Joséfa qui se tue à Paris, où elle n’a ni vivres ni cuisinière. Nous envoyons une dinde à Madame Le Droumaguet notre aimable voisine de Nevers qui donne l’hospitalité à quelques uns de nos meubles.
18 -7°. Mercredi des Cendres. Malgré tout mon désir de recevoir les cendres, je garde le coin du feu, les chemins toujours impossibles pour mon âne ; Marcelle va à la messe chaussée de mes grosses bottes de caoutchouc. Nous avons la visite de notre curé. Georges Robert, Fouret et autres malins qui avaient acheté l’île verte pour
180 000 F, viennent de la revendre 12 millions. Madame Lesueur, qui avait pas mal d’actions touche la forte somme, Jeanot Chavane aussi.
19 -9°. Vu Albert Barillet, basse courrier de M. Bariol à Gy, 103 hectares, 108 bêtes à cornes, 10 chevaux. S’il voulait revendre cette propriété, il gagnerait gros. Il est vrai qu’il y a dépensé beaucoup d’argent. Michel occupe un Espagnol venant de la zone libre qui travaille bien mais n’a pas de tickets pour sa nourriture. Il y a aujourd’hui six Espagnols sur la terre de Tâches. N’ayant plus rien à donner aux cochons, on les mange tout petits.
20 -9°. Le froid et un givre épais qui embellit les arbres mais refroidit la vue. Jacques déjeune avec nous et part à Sancoins d’où il gagnera Bulhon et Alger, où il retrouvera son frère qui y tient garnison. Longue lettre d’Edmond, une suite de jérémiades, blés avoines gelés, les juments et les porcelets crèvent, plus de charbon pour le gazo etc.
21 -10°. Louis Monnier envoie à Marcelle une boîte à casiers pour la remplir d’œufs. Ce Parisien ignore que par dix degrés de froid, les poules ne pondent pas. Gazoute de Villaines subit une assez grave opération à la clinique Sallé de Nevers. Paule est installée chez M.A. du Verne. Marcelle va faire une visite de charité à la Chasseigne où elle trouve la comtesse dans sa chambre en train de frotter des peaux de lapins. Je viens de lire Napoléon III par Aubry, ce qui m’a intéressé. J’ai vu qu’un de ses livres de chevet, c’était Don Quichotte. J’ai eu la curiosité de le relire. Je trouve cela purement enfantin.
22 - 0°. Dimanche. Il dégèle un peu, mais les routes sont encore trop glissantes pour que mon âne me conduise à la messe. Je lis avec intérêt un livre que m’a envoyé M. de Montrichard. Eclaircissement sur Mein Kampf, de Benoit Méchin. Livre qui a changé la face du monde. Mon Combat.
23 +2°. Il dégèle un peu, j’en profite pour aller faire quelques courses à St Parize. A la Poste, je vois partir quantité de colis de 3 kilos de pommes de terre et de poireaux à 7 francs le colis. J’assure 4 juments poulinières contre la mortalité. Marcelle soigne avec des compresses chaudes, sa jambe qui a été meurtrie en tombant de bicyclette.
24 +4°. Le vétérinaire Richard vient délivrer trois vaches dans les domaines. Marcelle continue les compresses chaudes.
25 +4°. Nous avons la visite des Pierre de Rouville et de Suzanne Le Sueur. Il paraît que Jacques qui par l’intermédiaire de Melle Bouquillard avait obtenu un laissez passer pour franchir la frontière à Mornay, a été complètement déshabillé par les Boches et trouvé porteur d’une lettre de sa tante Gabrielle qui lui parlait de son voyage à Alger et dont il n’avait aucun besoin. On l’a tout de même laissé entrer et aller à Sancoins d’où il a pu gagner Clermont où il sera surveillé et où il est descendu chez les Cote, Cours Sablon. Carte d’Hervé qui attend vainement sa belle mère. A 9 h ½ du soir, Cécile nous téléphone que son beau père va plutôt mieux, que des amis lui ont donné du bois et qu’elle nous enverra du beurre, ce qui fait complètement défaut ici.
26 -1° neige. Le Comte de Monterno meurt au Bost à l’âge de 85 ans. Il n’a qu’une fille, la comtesse de Raincourt qui n’en a qu’une également. Foire à St Pierre. Temps sombre, triste, j’ai la tête lourde, je trouve pourtant bon, le bœuf à la mode. Téléphone de Mme de Savigny, naturellement c’est pour demander des domestiques à Marcelle. Il paraît qu’au Colombier, il n’y en a plus du tout. C’est Mériem qui assure tout le service.
27 -0°. Temps aussi triste qu’hier. J’assure 4 juments poulinières pour la mortalité au moment du poulinage. La mère seule assurée coût 2850 F, c’est plutôt cher. Téléphone des Clayeux de Moulins, rien de nouveau à 2 h, mais à 7 h ½ par les Gouttes et Madame XX nous apprenons qu’Hubert de R. est débarqué ce matin à Tlemcen. Deo gratias ! Tout le monde doit être content, mais la grand-mère n’a pas encore son laissez-passer.
28 -1°. Pendant ces 28 jours, il a été enterré dix personnes dans le cimetière de St Parize, bien qu’il n’y ait pas eu d’épidémie. Je travaille pendant deux heures dans les allées du jardin. Lettre de Joséfa qui se tue à Paris, où elle n’a ni vivres ni cuisinière. Nous envoyons une dinde à Madame Le Droumaguet notre aimable voisine de Nevers qui donne l’hospitalité à quelques uns de nos meubles.
6 commentaires:
Qui peut être cette Madame XXX qui annonce votre naissance??
Il y a deux et non trois. J'étais intrigué moi aussi de cet intermédiaire et j'ai demandé à Maman qui n'a pu me répondre
qu'est-ce que l'ile verte ??? 18/2
"n'ayant plus rien à donner aux cochons on les mange tout petits" cela m'amuse!!!
Deo Gratias pour ton débarquement à Tlemcen !
je trouve formidable qu'il l'ai su le jour même ...
Merci de nous écrire tous ces cahiers
J'espère que vous avez noté l'écart des commentaires entre l'annonce des naissances d'Aliette et Hubert.
Pour ce qui est de l'île verte, il s'agit d'une île dans l'estuaire de la Gironde. Edith tu devrais poursuivre l'enquête sur ce sujet car il y a bien des gens qui ont fait de belles plus values. Même Evelyne Lauwick en avait entendu parler. Pourquoi les Robert de Tâches n'ont-ils pas été dans cette affaire juteuse ?
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