1.9.10

JUILLET 1943

1 Je vais à l’enterrement de la femme de Raclin qui depuis très longtemps est garde régisseur à la Chasseigne. Beaucoup de monde à l’église. Carte d’Hervé qui a donné à ses sœurs un déjeuner qui n’a rien des restrictions à Pontgibaud. Lettre de Ginette de Tours, Gaby a de l’avancement, il est nommé à Angers. Lettre de Josefa qui propose un parti pour mes petites filles.

2 Premier vendredi. Je m’approche de la Ste Table. Jean Le Sueur aussi. Son sort doit se décider ce soir. Il passe la visite et il est réformé, aussi la joie règne dans le manoir. Il s’était fait donner un certificat de tuberculeux par un médecin, ne tenant pas compte du proverbe qui dit qu’il ne faut pas parler de corde dans la maison d’un pendu. Chicon vient me dire qu’il a trouvé crevé un châtron de 15 mois bien portant la veille. Je téléphone à l’équarisseur de venir le chercher. Je lui ferai emmener en même temps une génisse du même âge que je considère comme perdue. Le 29, Madame Alexis Thonnier va à St Pierre à bicyclette et le 30 elle met au monde un poupon de huit livres ½. J’écris à Simone.

3 La mortalité sévit toujours sur mes bovins de 15 mois à Tâches. L’équarisseur enlève un châtron mort du charbon symptomatique et une génisse atteinte d’entérite. Les Guillaume du Verne déjeunent avec nous et emportent aux Mollins le gigot d’un des agneaux de Marcelle qui s’est noyé dans la source. Il pèse 4 livres ½. Lettre de Marguerite Clayeux qui reçoit tous ses neveux Monnier les uns après les autres. Pour la procession de la Fête Dieu à Thionne, il y avait 3 hommes en dehors des Clayeux. Edouard de Chatelperron a été mis en prison par les Boches. Il a été dénoncé comme ayant des armes chez lui, ce qui n’est pas vrai.

4 Dimanche. Au retour de la procession devant quatre reposoirs, le premier sur le champ de foire, le second devant la poste, le troisième devant la Croix du puits, le quatrième dans la cour de l’école libre. Au retour dans l’Eglise, M. le Curé encadré par le Maire et moi-même comme Président du Conseil Paroissial, lit la consécration de la Commune au sacré Cœur de Jésus. Beaucoup de monde et des belles toilettes. Jean de Sansal vient chercher des côtelettes de l’agneau. Au goûter il mange de la gelée de pied de veau et tout un fromage à la crème. Marcelle dîne à Buy.

5 Pluie insuffisante. Taillardat vient avec son moteur me scier du bois pour le fourneau de la cuisine et enlever du travail à mon jardinier, pour lequel ce travail journalier est très absorbant. Chicon vient me dire qu’un des châtrons vaccinés il y a deux jours est bien malade. J’appelle Batréau à défaut de Richard absent.

6 Il me donne son avis pour une génisse, le châtron malade a de l’enflure causée par une piqûre et non par le sérum. Pour les génisses qui ont de l’entérite, des reconstituants qu’on ne trouve plus guère. A l’automne, vermifuge aux veaux de l’année. Gazoute vient déjeuner avec nous pendant que sa fille est au manoir. Elles devaient nous arriver par le car Balançon, celui-ci ayant été réquisitionné par les Boches, elles se font amener par un taxi. Gazoute est couverte de perles et de diamants. Elle a les belles boucles d’oreilles de sa mère et des bagues à tous les doigts. A 4 h, les Massias viennent goûter et la chercher. Paule vient la rejoindre accompagnée des petites Le Sueur. Toutes font honneur aux galettes préparées par Marcelle.

7 Yvonne nous annonce la mort de Pépée de Riberolles. Vraiment ses pauvres parents sont bien à plaindre, perdre deux enfants déjà grands et au début de leur mariage, ils en avaient déjà perdu deux. Avant dîner la tête me tourne, mes jambes flageolent. Marcelle me fait une piqûre d’accioline. Je me couche et dors bien.

8 Pluie. La tête engourdie une partie de la journée. L’appétit est bon. Nouvelle piqûre d’accioline. J’envoie chercher au bois Renard dix sacs de charbon fabrication Le Sueur. Madignier m’en cède cinq.

9 Marcelle part à la première heure pour Nevers afin d’assister chez nos locataires à une réunion de dames ligueuses présidée par Monseigneur. Déjeuner de 16 dames dans notre salle à manger avec M de Ganay et M.A. du Verne. Guite de Villeneuve était de la fête, elle allait de Tours à Trinay. Marcelle rapporte un grand panier d’abricots de notre cour. Les Chleq et M. Antoinette en prennent leur part. Roger de La Brosse m’envoie la Vénerie contemporaine du Marquis de Foudras. J’y lis l’histoire du père Jourdan du Mazot.

10 Suzanne Le Sueur prend ici son petit déjeuner en revenant de la messe. Comme il n’y a plus d’avoine pour nourrir les poules, j’envoie dans les champs chercher des gerbes d’orge d’hiver qui viennent d’être coupées.

11 Dimanche. Bien peu de monde à la messe. Je passe chez Tantot pour payer les 10 sacs de charbon que j’ai pris dans la coupe Le Sueur pesant 269 kg à 5 F. Je n’avais que mille francs sur moi ce qui a été insuffisant car il y en avait pour 1345 F. Jacques de La Brosse de passage à Planchevienne vient nous voir. Il a maigri mais n’a pas perdu son brillant appétit. Après lui arrive pour chercher un fromage blanc Madame Courard, la femme du maître d’école de Moiry dans une toilette qui aurait été remarquée un jour de Derby à Chantilly et avec des cheveux jadis foncés, devenus tout en or. C’était une jolie proie pour le divorce qui n’a pas manqué d’arriver.

12 Marcelle déjeune à Planchevienne.

13 Suzanne Le Sueur insiste pour m’avoir à déjeuner. J’accepte et je n’ai pas lieu de le regretter car on nous sert de très bonnes choses. Je rencontre les Thonnier venus dans une voiture inventée par leur gendre Mangerel : le devant d’une auto auquel on a mis des brancards à la place du moteur pour y atteler un cheval. Parmi les autres convives, Mesdemoiselles de Fontenay et de Rouville.

14 Il n’y a pas de fête de la République. Je m’en passe bien. Roy coupe dans le champ Carreau un beau blé qui a 1,50 m de hauteur, mais la ficelle papier qu’on nous vend horriblement cher pour lier les bottes, se casse à tout moment. Jacques de La Brosse et Antoine de Sansal dînent avec nous.

15 Guillaume du Verne nous envoie une jolie petite Cocker blanche et marron âgée d’un mois. Je la baptise Silky, du nom de mon excellente Laverack d’il y a 60 ans.

16 Une lettre d’Yvonne nous apprend que dans la nuit du 12 une bombe est tombée près de Crevant et que l’explosion a été si forte qu’il y a eu beaucoup de vitres brisées et qu’à Bulhon un cadre est tombé sur le lit de Dédette, ce qui lui a fait très peur.

17 25° sans orage, ce qui est étonnant. Nous avons notre curé à déjeuner. Je lui donne 700 F pour le denier du culte et 100 F pour les bancs.

18 28° Dimanche. Temps orageux sans pluie. Le jeune Le Huday Pazzis épouse la plus riche héritière de Bruxelles. Somptueux repas de noce, auquel mille pauvres sont invités.

19 Le baromètre baisse, il fait très lourd, mais sans pluie. On donne le prix du blé nouveau : 410F le quintal, ce qui fait pour un double pesant 15 kg, 82 F. L’avoine 264 F le quintal, pour un double pesant 10 k 26 F.

20 40 mm de pluie. A 9 h du soir un orage éclate au dessus de nous, nous arrosant copieusement. Le besoin s’en faisait sentir. Je râpe la cour côté midi.

21 Marcelle va à la gare de Nevers, où elle trouve Cécile se rendant aux Gouttes. Elle monte avec elle jusqu’à St Pierre. Mon aînée va bien.

22 Pluie. Triste anniversaire. Je vais à la messe dite pour ma chère Edith, je communie à son intention, bien que j’ai plus besoin de ses prières qu’elle n’a besoin des miennes. Foire à St Pierre. J’achète une petite coche de 3 mois pesant 28 k pour 2400. Antoine de Sansal vient manger un fromage blanc et en emporter un autre avec des haricots verts.

23 Madame Thiery vient me couper les cheveux. Marcelle part à 1 h ¼ de St Pierre pour Bulhon. Je rentre en possession de deux montres envoyées en réparation. Celle de ma chère femme à Nevers, une Oméga à St Pierre, coût 85 et 50.

24 Le taureau de Callot donne un coup de corne au vieil Espagnol employé là, ce qui nécessite son transport à l’hôpital de Nevers. Marcelle me revient à minuit après la triste cérémonie d’anniversaire de ma chère fille à l’église et un déjeuner de 22 personnes à Bulhon. Les Edmond Clayeux l’amènent à Vichy prendre un train qui l’apporte à 8 h ½ à Moulins, où elle monte sur sa bicyclette pour s’appuyer ses 40 kilomètres en pleine nuit. Hervé avait pu venir à la triste cérémonie.

25 Dimanche. Magdinier m’apporte une lettre émanant des eaux et forêts où on lui dit qu’il a acheté le bois de St Ouen trop cher. Que peut-il en résulter ? J’écris à l’inspecteur A de Villenaut que je crois qu’il n’y a rien d’exagéré dans mon prix de vente et j’attends.

26 Lundi. Cécile, Yvonne et les petites arrivent à 1 h ¼ en gare de St Pierre où je les fais prendre par le taxi de Clostre. M. Mathieu de Bulhon les a menées à Clermont. Mes arrières petites filles sont superbes. A 7 h du soir, Guiguite de Villeneuve et sa fille, venant de Trinay viennent dîner et coucher.

27 Antoine Clayeux après avoir conduit sa mère à Cuy et au Chamont nous la laisse en passant. Cécile et Yvonne vont à Nevers retrouver M.A. du Verne pour faire l’inventaire dece que nous lui laissons comme meubles dans notre maison.

28 Guiguite et sa fille vont à bicyclette prendre le train de 13 h à St Pierre. Geneviève n’ayant pas trouvé de véhicule pour la conduire à la gare nous reste jusqu’à demain.

29 28°. Mon âne la mène à mars à 6 h ½. Cécile Marcelle et Yvonne déjeunent au Colombier avec Paul de Martinprey allongé sur une couchette, il ne peut pas s’asseoir. Temps étouffant sans orage.

30 Même temps. 28 ° sans un nuage ni éclair ce qui est anormal.

31 29 °. Antoine de Sansal vient dîner et se ravitailler. Il emporte œufs, fromage, concombres, haricots verts et prunes du Pied Prot qui abondent et que nous partageons avec les locataires.

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