30.8.10

JUIN 1943

1 Je fais une tournée aux Petites Granges, en voiture bien entendu. 25 gamines de l’école libre font par ordre, une tournée dans les champs de pommes de terre pour ramasser les doryphores. Au passage, Marcelle leur offre un fromage blanc.

2 Pluie. Depuis quelque temps, je perds à Callot et à Tâches des veaux de 14 à 15 mois. Nous mettions cela sur le compte de l’entérite. J’en ai parlé à mon vétérinaire Richard, qui a envoyé de la fiente de deux taures qui n’ont pas fait leur poil et qui n’ont pas profité depuis leur mise au pré, à son collègue Mongy qui a installé à Nevers un laboratoire très moderne pour en faire l’analyse. Celle-ci a trouvé de cesophagostomose, maladie inconnue jusqu’à ce jour et pour laquelle, ils ne connaissent pas de remède. Ils vont chercher. C’est gai ! Le même Richard est humilié, car après avoir traité le cheval Negro pour un effort de tendon, le maréchal Mérot lui a trouvé un abcès dans le pied. Reçu lettre très touchante de la Marquise de Chargères.

3 Pluie glaciale. Ascension. Pas mal d’hommes à la messe. Marcelle va faire une visite à la Chasseigne, où elle trouve la comtesse ramassant les doryphores dans son jardin.

4 Premier vendredi du mois. Je m’approche de la Sainte Table. Louis, Yvonne, André et Philippe Roullet nous font part de la naissance de leur sœur Anne. Je loue la maison du Pied Prot, à un vieux ménage, Grisotte, hors d’âge qui ferait mieux chez les petites sœurs des pauvres que chez moi, mais ils doivent amener une vache bien que je leur ai fait observer qu’il n’y avait pas d’eau. Louis Pinet en tournée d’assurances s’arrête en passant. Nous le gardons à dîner, repas qui lui coute moins cher que son déjeuner à St Pierre chez Burdin, cout 200 dont la bouteille de vin 65.

5 Beau temps, je bine le maïs planté dans le jardin du Pied Prot par Marcelle qui entreprend trop de choses pour les entretenir convenablement.

6 Dimanche. Temps gris. Notre cuisinière qui devait aller passer quelque temps à La Baratte pendant que nous avons Michelin et venir au secours des du Verne qui n’ont personne, ne peut partir, elle a un très fort mal de gorge.

7 Lundi. Décidément notre maison de Nevers était destinée à une bonne œuvre, ce matin l’abbé Bucheton me la demande pour y installer ses services. Mon métayer Michel qui ne bouche jamais ses clôtures a laissé ses juments aller manger l’avoine de Taillardat qui vient se plaindre à moi, je n’y peux rien qu’en souffrir plus souvent que lui.

8 Antoine vient au ravitaillement et cherche des œufs frais pour Hubert. Madame de Montrichard vient gouter avec Marcelle.

9 Marcelle se paye une petite folie, elle achète six agneaux pesant 21 kilos à 680 F la pièce, elle en laisse deux à Michel qui les nourrira pour 600 l’un, les 4 autres lui reviendront à 720 pièce, c’est pour rien ! Madame de Saint Blanquat a vendu pour 1200 F une oie engraissée en Périgord.

10 C’est Jeanne de Mollins venu passer la journée avec nous qui nous raconte ça. Elle arrive du bord de la Garonne, où ses parents ont des châteaux tous plus grands les uns que les autres.

11 Lavergne vient badigeonner la maison du Pied Prot qui se blanchit bien mal.

12 Marcelle va à Nevers par le car. Elle dit à Madame de Sansal, au sujet de la clinique de la rue Hoche où Simone doit aller pour ses couches, ses craintes sur cette maison d’où Madame Dervault née Candolle est sortie avec de l’infection et la chose se renouvelle ces jours ci pour Aline Bertin.

13 Pentecôte. Première communion à St Parize. A 1 h ¾ mon vétérinaire Richard à défaut de toute autre voiture roulant le dimanche, nous amène de la gare de St Pierre, Roger retour de Vichy où il a été présenté au Maréchal avec les 10 plus vieux Maires du département dont d’Anchald est le doyen. Il nous raconte longuement cette réception et nous parle du discours de Laval prononcé pendant le banquet. Celui est très laid, commun, mais très énergique et disposé à corriger sévèrement les 22 ans qui ne se sont pas présentés quand on les a appelés.

14 Je passe une agréable journée avec Roger, car avec lui je peux parler de l’autrefois.

15 Marie Thérèse de Buy m’envoie Etienne et sa ponette pour conduire Roger prendre le train de 13 h à St Pierre. Nous avons à dîner un père chapelain de Paray le Monial venu à St Parize pour une journée de récollection prêchée aux ligueuses. Il constate que dans l’ensemble de la France, la foi est en décadence.

16 Marcelle va à St Pierre suivre la journée de récollection. Hervé m’écrit aussi que dans son milieu, la foi progresse en sens inverse de ce qu’il désire.

17 Pluie 30 mm. Sous une pluie battante, les du Part nous arrivent à bicyclette pour déjeuner. Peu après eux, l’abbé Jean du Verne et Simone descendent de l’autobus. Ce n’est pas sans crainte que je vois arriver cette dernière qui est sur le point d’accoucher, car ce n’est pas avec mon âne que je pourrai la conduire à la clinique. Lettre de Dédette qui nous dit, sans donner de date, qu’Yvonne a su que Jean était à Rabat.

18 Une carte du Lt de la Chapelle prisonnier, adressé ici à Yvonne dit que le 20/4 Jean allait très bien. Ces deux nouvelles me font plaisir.

19 Lettre d’Yvonne qui entend aussi parler de Jean par le Colonel de Contenson mais sans date. Après dîner, je fais une tournée dans les Craies avec mon âne, accompagné de Marcelle. Grâce aux dernières ondées, l’ensemble des récoltes est bon. Le ménage Grisolle prend possession de la maison du Pied Prot.(Mention marginale : Normande 19 mars)

20 La Trinité. Peu de monde à la messe, mais beaucoup de maîtres et de valets sur la place.

21 Pluie. Je vais à l’enterrement du père Barillet mort à 82 ans après une longue maladie, c’était un bien brave et très honnête homme avec lequel je n’ai eu que des rapports agréables pendant les nombreuses années où il a été mon métayer. Guite de Sansal déjeune avec nous et emporte des framboises pour faire des confitures.

22 Roy fauche le pré de la Joie où il y a beaucoup d’herbe.

23 Marcelle va à Nevers par le train de 7 h ¼ pour suivre une journée de retraite prêchée chez les Petites Sœurs de l’Assomption. Elle déjeune chez Marie Antoinette avec la Comtesse Lafond et Mériem de Martinprey. On me rentre du foin qui est rien moins que sec, mais maintenant tout se fait à la galope.

24 Saint Jean. Lettre d’Hervé qui est bien découragé, parce qu’on emmène tous ses jeunes gens en Allemagne. Lettre d’Yvonne qui a eu des nouvelles de Jean du 29 mai par les Contenson via Suisse. Les René Musnier nous font part du mariage de leur fils Serge avec Melle Claire Bourdet Pléville. On me rentre 4 chariots de foin pour l’hiver, Roy 2, Chicon 1, Michel 1. Il y en a 8 dans le fond du pré de la Joie.

25 Lettre d’Hervé, qui m’envoie deux photos de ses jeunes travaillant dans les bois. Il est bien découragé parce que 34 d’entre eux partent pour l’Allemagne.

26 Suzanne Le Sueur vient manger avec nous une excellente pintade aux choux, elle est très inquiète sur le sort de son fils revenu à Villars après avoir été réfractaire à l’appel par les Boches des jeunes gens nés en 1922. Nous recevons une lettre de part du baron Yves Jallot mort à 51 ans, il laisse 8 enfants. Château de La Vrolais. Le Louroux Béconnais Maine et Loire.

27 Dimanche. Vent Nord Est desséchant qui souffle trop souvent. Suzanne Le Sueur et ses filles allant à Libourne marier un cousin, sont descendues chez les Georges. Elles prétendent que c’est la mère d’Agnès qui est la cuisinière et sa sœur la femme de chambre et qu’elle accepte bien le pourboire qu’on lui donne en partant. Agnès a dit à Suzanne : quand vous verrez la femme d’Antoine, vous lui direz que si elle veut ravoir ses draps de lit, il faut qu’elle vienne les chercher. Il paraît qu’ils sont très fins, ceux qui étaient plus communs ont été renvoyés il y a quelque temps. Les dits draps sont à Libourne depuis l’exode de 1940. Quant au jeune Michel, on ne parle que de ses bonnes fortunes, qui sont nombreuses, paraît-il. Nous pouvons être fiers de ce côté de famille.

28 Roy fauche (4 chariots) le pré de l’étang qui ne l’avait jamais été. Lettre de Cécile qui dit qu’à Rennes, on tremble toujours. J’écris à André.

29 Vent desséchant. Dans la Varenne Callot, betteraves et pommes de terre sont dévorées par les vers blancs. On en a trouvé 14 au même pied. Les Boches font encore une rafle, une rafle de chevaux dans notre canton.

30 Je taille la haie du pré de l’étang le long du chemin qui va au domaine. Visite de Mesdames Soulot et Boursin qui me disent que Tassain est venu relouer son domaine de Moiry à Arbaut.

Aucun commentaire: