10.9.10

19ème cahier

11 mars 1927

Ce 19ème cahier aura l’honneur de donner l’hospitalité à un poème composé par mon gendre pour remercier ceux et celles qui ont assuré le succès de la vente de Charité de 1927.

Remerciements

Qui devrais-je d’abord remercier ce soir ?
L’acteur le meilleur ? la plus habile marchande ?
Ceux dont les soins ont fait et plus belle et plus grande
Cette fête ?... Si tous ont donné leur offrande,
Merci d’abord à ceux qui vont la recevoir.

Car ils méritent toute notre reconnaissance,
Ces maîtres si chrétiens, si vaillants, détestés
Par les instituteurs laïques, bien rentés,
Qui ne comprennent pas vos saintes pauvretés,
O frères du grand Saint François d’Assise, en France !

L’école est libre, oui, libre avec ce crucifix
Qu’ailleurs on enlève sans que rien le remplace.
Christ, ami des enfants, rayonnant sur la classe,
Vers toi, souvent, le soir, le maître, l’âme lasse,
Cherche le réconfort des labeurs sans profits.

Ecole libre ? non, mais école chrétienne
Qu’on voulut étrangler par d’intangibles lois,
Malgré tous les baillons et les décrets sournois,
Tu fais entendre encor ta salutaire voix
Que n’étoufferont pas les tristes cris de haine.

Agréez donc nos vœux et nos remerciements,
Nobles éducateurs de l’âme populaire,
Vous vous sacrifiez de façon exemplaire.
Nul ne saurait payer ici-bas un salaire
Digne de votre zèle et de vos dévouements.

Sachez que l’on vous aime et qu’on vous encourage.
Devant ces francs papier qui vous seront remis
Songez qu’ils sont venus d’innombrables amis,
Par un commun élan de leurs cœurs, réunis
Moins pour vous remercier que pour rendre hommage.

Vos amis, voyez les se dépenser pour vous.
Saluons tout d’abord la fée inspiratrice[1],
La grande dame blonde au port d’impératrice,
Qui commande avec tant de grâce séductrice
Qu’obéir, quels que soient ses ordres, semble doux.

Près d’elle, saluons les reines de l’aiguille
Se jouant parmi les tissus arachnéens,
Ayant, avec l’esprit, et le gout parisien,
L’art de vendre très cher, ces jolis petits riens
Ou l’éphémère éclat d’une mode scintille.

Remercions encor la Ligue et le Noël
A leurs comptoirs parés d’une égale élégance,
Les dames déployaient une telle éloquence
Que l’acheteur charmé de trouvait sans défense
Et laissait dans leurs mains un gain substantiel.

Louons l’Epicerie et la Pâtisserie,
Merci, Mesdames, pour vos mets, vos entremets,
Vous avez, méritant les bravos des gourmets,
De mille petits fours su faire un grand succès,
Si vous me permettez cette plaisanterie.

N’oublions pas non plus les magiques concerts,
Les thés que vous servaient des servantes mutines,
Le joyeux tournoiement des rondes enfantines
Avec les rires frais et les voix argentines
Scandant de leurs grelots le rythme de vieux airs.

Fortunio, merci, vous nous fîtes entendre,
Avec vos petits clercs gais et malicieux
Qui jouèrent si bien, chantèrent encor mieux,
La chanson de Musset, hymne délicieux
De franche poésie et de musique tendre.

Gloire aux petits chevaux tournant éperdument !
Honneur à ce caissier, d’une galante espèce,[2]
Payant d’un madrigal le billet ou la pièce,
A ce caissier qui sait faire et sauver la caisse !
Il l’a prouvé, jadis, sous les bombardements.

Célébrons les acteurs. Je ne saurais décrire
Cette idylle en bateau, d’un moralisme clair,
Car le couple amoureux, en proie au mal de mer
Trouve l’amour coupable encore bien plus amer,
Et les spectateurs, eux, sont malades de rire.

Nous devons applaudir enfin « le sanglier ».
La rieuse Suzanne est une artiste experte.
On comprend mal, voyant la fine et tendre Berthe,
Qu’un homme qui l’aima se résigne à sa perte
Et que, même au Brésil, on ait pu l’oublier.

Evocateur de la cynégétique gloire
Dont l’écho, Nivernais, emplit encore vos bois,
Type des grands veneurs et chasseurs d’autrefois,
Rude et fier comme un preux dans les anciens tournois
Le galant colonel remporta la victoire.

La vente maintenant va s’achever. Les fleurs
Des comptoirs et des murs seront bientôt fanées
Mais que le souvenir de ces belles journées
Fleurisse encore en vous, les fêtes terminées,
Par le bien accompli qu’il vous rende meilleur !

Que votre charité s’accroisse et persévère !
Car les besoins sont grands, car nos maîtres chrétiens
Faibliraient s’ils n’avaient le bienfaisant soutien
Des Véroniques et des bons Cyrénéens
Dont le secours les aide à gravir le calvaire.

Sans vous, le mal serait encore plus triomphant
L’école athée encore plus sectaire et funeste.
Comme on arracherait vite ce dernier reste
De foi, de pureté, de lumière céleste
Dont la flamme s’éteint dans trop de cœurs d’enfants.
A. de Riberolles
[1] Note marginale : Marie Th. Pinet des Ecots
[2] NM : Louis d’Assigny

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