1 Marcelle enfourche sa bicyclette pour aller à St Pierre prendre le train de 12 h 40 direction les Gouttes où elle veut aller voir sa vieille tante et ensuite si possible à Boutavent pour embrasser Yvonne et ses trois filles. Son train a deux heures de retard. Les gardes du SHC font un procès à Asselineau qu’ils prennent surveillant une tente de collets.
2 La Chandeleur. Edmond a aujourd’hui 64 ans. Miette nous revient par le train de 18 h 40. Elle est accompagnée d’Eliane Villedey qui vient passer quelques jours ici. La conversation ne chôme pas jusqu’à 11 h du soir.
3 Les gardes du SHC prennent Dupré surveillant une tente de collet dans le champ de Nevers, où il râpe de l’épine, d’où nouveau procès. Mes 3 filles déjeunent chez leur amie Paulette Le Sueur.
4 Pluie. Marcelle revient pour dîner après trois dures journées en chemin de fer, car, autos et surtout bicyclette dont 25 kilomètres sous une pluie battante. Enfin elle est venue à bout de son programme, c'est-à-dire Les Gouttes le 1 et le 2, Boutavent le 3. Elle y va par Le Donjon, Marigny et Cluny. Elle trouve Yvonne assez maigre et les petites en bon état. Madame de Valence l’accueille très aimablement, mais bien simplement. Elle n’a pas de domestique et sa fille Yvonne et elle-même font le service. Il y a de très beaux meubles dans le salon. Pour le retour, Marcelle et sa nièce vont à Cluny à bicyclette, là elles prennent un taxi qui les mène à La Clayette. Là elles se séparent. Marcelle prend sa monture jusqu’à Roanne où elle prend pour Nevers, d’où elle nous arrive encore à vélo, pas trop fatiguée.
5 Premier vendredi. Je m’approche de la Ste Table avec mes petites filles et Eliane. A midi, téléphone de Geneviève Clayeux disant que le Lt Plessart qui tenait garnison avec Jean a été fait prisonnier et rapatrié en France par les Boches en avion. Il est à Roanne et prie d’avertir sa femme qui est à Rennes. C’est ce que nous faisons. Il nous apprend que Jean après s’être battu en Novembre est maintenant à Oudjda. Paulette Le Sueur arrive pour gouter, en apportant des gâteaux. On fait l’obscurité dans la salle à manger, où sont allumées 25 bougies en l’honneur des 25 ans d’Eliane Villedey. Je fais remplacer dans l’avenue 3 érables qui sont morts. Plusieurs hommes de la Commune passent une visite médicale en vue d’être envoyés en Allemagne comme travailleurs, dont le domestique des Petites Granges. Il ne nous restera personne dans les champs.
6 La commandantur se charge de faire elle-même les réquisitions de pommes de terre d’œufs et d’avoine, même où il n’y en a pas. Elle exige que chaque commune garde pendant les nuits les voies de chemin de fer qui les traversent. Les hommes de 18 à 60 ans devront assurer ce service. Ils seront payés 7 francs par heure et chaque équipe veillera 3 nuits de suite. Mes trois filles vont déjeuner à Nevers où elles retrouvent Paule de Villaines à la Dame Blanche. Elles goutent chez Melle Franc Bernard avec les Sansal. A 2 h, Marcelle accompagnée de Picard, mon homme d’affaires, font avec Gonin, le locataire de notre maison, l’inventaire de celle-ci, qu’il quitte. Marie Antoinette du Verne, nous la demande pour ses œuvres.
7 St Blaise. Beaucoup d’hommes de la confrérie à la Messe. Je me fais inscrire dans ses rangs, j’aurais dû le faire depuis longtemps. Eliane Villedey nous quitte pour aller voir sa jeune sœur qui est en pension à Chantenay.
8 Mes petites filles retournent à Bulhon. C’est toujours avec un gros serrement de cœur que je vois un des miens me quitter, car je me demande si ce n’est pas pour la dernière fois. J’ai dit plus haut qu’à Rennes, elles avaient été invitées à gouter chez Madame Hubert. Cécile nous écrit que Miette avait été remarquée par un de ses fils qui demande à la revoir. Celle-ci interrogée, dit qu’elle n’y tenait pas. C’est toujours flatteur.
9 Pluie. Le chien Farinot s’étant sauvé et réfugié au Colombier, Marcelle va y déjeuner pour le ramener. Pendant ce temps, je vends la coupe de St Ouen à Magdinier, que je ne connais guère, mais il me donne un gros acompte en signant le marché, ce qui est la meilleure des garanties.
10 Journée sans histoire. Carte d’Yvonne.
11 Madame de Lépinière et sa fille Marie Thérèse viennent passer la journée avec nous par l’autobus.
12 Gabriel Dervault se remarie avec une veuve de 65 ans qui a un château, Mme de La Thibaudière, très bien de sa personne. Cet animal a eu le talent d’épouser deux jolies veuves. Les Guillemain viennent de vendre salle Drouot une bergère Louis XV qui était dans leur salon de Corbigny pour 220 000 F. La tapisserie était très râpée et il lui manquait un pied. Téléphone de Cécile qui a eu la visite du Ct Pressard dont la mère habite Rennes et dont la femme et les enfants sont à Oujda avec Jean. Il a été ramené en France le 19 janvier avec un avion Boche. Marcelle goute chez les Le Sueur qui lui vendent une épaule de mouton, 20 F la livre, celle du cochon en vaut 25 poids vif. Je dis à Faucher de me faire une corde sciée à 0,33 pour qu’il entre dans le poêle du vestibule.
13 Monsieur de Costa étant chez son coiffeur à Morlaix a été tué par un éclat d’obus lancé par les Anglais.
14 Dimanche. Marcelle va gouter à La Chasseigne. C’est elle qui lui apprend la mort de son cousin germain.
15 Pluie. Carte d’Augustin. Farino apporte à la cuisine un lapin qui a un collet au cou.
16 Neige. Suzanne Le Sueur déjeune et passe la journée avec nous. Elle est vraiment très agréable. Jean m’emmène voir des veaux à Chéron et à Dérhé.
17 La loi sur les successions ayant été mal interprétée par le notaire d’Yvonne, celle-ci a encore à verser au fisc 207 000 F et cependant parce que son père a été tué au champ d’honneur, les droits à payer pour l’héritage de son grand père ne sont que ceux de père à fille. Heureusement que je peux lui venir en aide de même que je viens de le faire en faveur des Riberolles pour la succession d’Edith. Marcelle trouvera sa part sur la valeur du cheptel qui a monté considérablement ces années dernières et sur celle des bois.
18 -5°. Carmen et Simone passent la journée avec nous. Cette dernière qui attend dans 3 mois est énorme. Nous leur faisons manger notre dernière dinde et un fromage à la crème, ce qu’on mesure au compte gouttes car le lait devient une rareté (Mention marginale : St Ouen) Les Soultrait ont 183 hectares de bois et la Commune ne leur demande que 40 stères de chauffage à fournir aux Allemands, le même nombre qu’à mes filles qui n’en ont que 95. Les Féligonde nous téléphonent la mort de Geneviève de Maumigny.
19 -5°. Moreau nous emmène à Nevers. J’en profite pour donner l’ordre au Crédit Agricole d’envoyer 150 000 F au notaire d’Yvonne pour payer au fisc un supplément aux droits de succession qu’elle a déjà payés pour son grand père. Ils sont énormes et cependant ils ne sont que de père à enfant parce que le sien a été tué à l’autre guerre. J’envoie aussi à Augustin leur part dans le premier versement du bois de St Ouen. Je vais voir Hubert qui fait honneur à sa nourrice. C’est un superbe gars aux yeux bleus et aux cheveux blonds qui a 7 dents et qui commence à marcher. Marcelle revient à bicyclette et va à 2 h retrouver Picard dans notre maison pour parler de la location. Marie Antoinette du Verne prendra le rez-de-chaussée pour ses œuvres. Lettre de Roger de La Brosse qui a été assez fatigué.
20 -3°. Marcelle va en bécane jusqu’à Limont rendre un dernier devoir à sa bonne amie Geneviève de Maumigny, morte à 56 ans après une longue maladie. Elle déjeune avec la famille et goute au Chazeau en revenant.
21 Dimanche. En l’absence de sa femme, Montrichard vient déjeuner avec nous par un temps radieux.
22 J’envoie à Maître Lefeuvre notaire à Rennes, un chèque postal de 150 000 F pour payer les droits de succession qu’Yvonne doit verser pour l’héritage de son grand père. Ils sont énormes n’étant cependant que ceux de père à fille, parce que le sien est mort en 1914 au champ d’honneur. Avec Gonin et mon jardinier, je fais dégager la bonde métallique de l’étang Américain à l’aide d’un tombereau. Je voudrais changer mon vieil âne contre un jeune. On m’en offre un à Mars pour 30 000 F. Je recule devant ce prix astronomique. Il fait un temps d’été.
23 J’envoie à Madame de Brezé et de Villaine une offrande pour la quête des petites sœurs des pauvres. Il fait un temps idéal, on peut rester assis dehors comme hier.
24 Koutchi nous fait part des fiançailles de Gérard avec Monique de Foulque. Guite nous écrit que Tours a été bombardé par les Anglais 3 jours de suite, plusieurs morts et de nombreuses machines de chemin de fer détruites. Je finis d’aménager la chaussée de l’étang des Chaumes Vieilles. La ligne de démarcation entre les zones prendra fin le premier mars.
25 Monsieur le curé déjeune avec nous et à gouter nous avons la charmante Melle Valois. Je termine ma chaussée d’étang et je constate avec peine que la bonde est trop élevée d’une dizaine de centimètres. Cécile nous envoie ½ livre de beurre qui est la bienvenue. Elle ne sera pas dans la zone interdite.
26 Marcelle loue à Naudin pour 400 F une chambre attenant à sa maison pour y installer une pharmacie. Bertrand, apothicaire à Nevers lui ayant procuré à prix coutant des remèdes utiles que les gens du pays trouveront là sans aller les chercher au loin. Pour y mettre aussi les provisions que propriétaires et fermiers voudront bien leur envoyer : haricots, farine, sucre etc. pour faire des colis pour les prisonniers de la commune qui sont peu fortunés. Je vends à Dufour à la scierie de St Pierre un orme loupé pour 800 F et un autre qui ne l’est pas 400 F le stère. De Moulins, Edmond nous téléphone qu’Augustin nous fait dire qu’avec Hervé, il viendra nous voir en bicyclette la semaine prochaine et qu’ils feront escale aux Gouttes.
27 Je perds la parole pendant quelques heures avec assez violent mal de tête, ça se passe pendant la nuit. Marcelle me fait une piqure d’arécoline. Cécile nous téléphone que Rennes a été bombardé, mais qu’elle n’a pas de mal. Carte d’Hervé nous annonçant que la ligne de démarcation allant être supprimée le 4 mars à Moulins, il viendrait nous voir avec son père à bicyclette.
28 Dimanche. En allant à la messe, je porte différentes choses dans l’officine de Marcelle.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire