29.10.12
Octobre 1918
Souvenirs et pensées n°9
Dimanche 6 octobre 1918
Je suis heureux de commencer ce neuvième cahier par une réflexion pieuse. Ce matin avec Édith nous avons assisté à une messe dite dans une baraque du camp par l'abbé Clargeboeuf. La veille mes filles avaient recouvert l'autel d'une superbe étoffe décorée d'un agnus Dei. L'assistance était très nombreuses et le recueillement très édifiant, Beaucoup d'officiers et de soldats américains ont communié, tous lisaient la messe dans leurs livres, ou égrainaient pieusement leur chapelet. Contrairement à beaucoup de français les Américains ignorent ce qu'est le respect humain. Pendant la plus grande partie de l'office ils se tiennent à genoux sur la pierre, et ils écoutent avec la plus grande attention les quelques paroles qui leurs sont dites par l'officiant.
L'abbé Clargeboeuf déjeune avec nous.
6 octobre 1918
La fille aînée des Albert de Bouillé, ou plutôt la seconde, est fiancée à Monsieur de Vanssay. Mademoiselle Monique de Certaines entre aux Petites sœurs de l'Assomption. Mademoiselle Lamadou aux sœurs de Nevers.
Sept. Les Charles Tiersonnier passent la journée avec nous.
Huit. René Clayeux et sa femme nous arrivent aujourd'hui pour quelques jours. Maurice Robert, sous-lieutenant au 290e infanterie 19e compagnie section 195 vient d'avoir une seconde et flatteuse citation. On nous fait part des fiançailles d'Odette de Souferna avec son cousin Mabire, officier de dragon.
10. Je conduis Clayeux à Nevers en passant par Sully, nous traversons Challuy où nous voyons que le chemin de fer partant de Saincaize pour rejoindre la ligne de Chagny à Saint Éloi passe sous la route entre l'église et le parc de Maucouvent. Il est ensuite en chaussée dans le sommet des Argougneaux, c'est un énorme travail exécuté en 9 mois par nos alliés. Sully est occupé par des religieux d'Amiens qui sont de vieux pensionnaires, des deux sexes. J'apprends en passant au Mou que le fermier Charpentier vient de mourir à l'hôpital suite de névralgie. Je constate d'autre part que rien n'est cultivé et que les prés de Challuy ne sont pas mangés.
11. Nous mangeons un magnifique buisson d'écrevisses, cadeau de mon ami Pinon qui doit aller les prendre dans la Colâtre entre Parizy et les Planches. Je n'approfondis pas. Depuis Verdun en 1879 je n'en avais pas vu autant sur le plat. René Clayeux s'en est régalé.
12. Il pleut très fort cela gêne pour les emblavures.Il est vrai que pendant 15 jours nous avons eu un beau temps de semailles.
15. René Clayeux et moi allons déjeuner à Buy où nous retrouvons Ludvig. Bonnes nouvelles des guerriers.
17. Henri Robert déjeune avec nous et à neuf heures je mène Claire et Marcelle faire une visite à la Chasseigne.
18. Avec Sylvia, ma nouvelle jument, je conduis René à Nevers où nous déjeunons chez les La Brosse que nous trouvons bien tristes, surtout Étienne. Josefa vient de s'installer à Senlis ou elle a pris une villa. Quant à Élisabeth, elle est toujours dans le même état d'abattement, ne mange pas, ne dort pas et rend la vie bien dure à ses parents, comme si ils étaient cause de son malheur. L'état sanitaire de Nevers, et même de toute la France, est fort mauvais. L'influenza, appelée pour la circonstance grippe espagnole fait partout des ravages.
Brettmann vient faire un bridge après dîner avec un de ses camarades.
21. Les Clayeux nous quittent. Deux nurses meurent de pneumonie grippale au camp ou cette maladie fait beaucoup de victimes. Je vends à Château deux bœufs maigres de Callot pour 4000 Fr. je n'avais atteint ce prix.
22. Claire, Marcelle et moi allons déjeuner à la Grâce. R.D.N.
23. Roger de la Brosse nous arrive pour dîner à 11 heures du soir et pour passer quelques jours.
24. Foire de Saint-Pierre. Sous la pluie. Le petit cochon est en baisse et le gros à 2,50 Fr. la livre. Le syndicat de Vendée fait sa tournée et paye les taureaux une moyenne de mille francs.
26. Je vais avec Roger faire une visite à Beaumont.
Jacques de Soultrait est nommé capitaine. Je vends pour 960 Fr. mon âne que je venais de couronner pour la seconde fois, et qui était en ma possession depuis de nombreuses années. Paul Rendu, directeur de la Société Générale meurt à Nevers, c'était un homme aimable, grand chasseur et fort complaisant. Son fils est capitaine au 19e de ligne.
27. En l'honneur de Roger nous invitons à dîner le colonel américain Winner Hanon et Eberth. La soirée a été pleine d'entrain, excepté pour moi qui ne comprenait pas un mot des conversations.
28. Je conduis Roger à Fontallier, Marcelle nous accompagnent. Le soir deux lieutenants américains dinent avec nous. Ils ont l'air de milliardaire, ils ne savent cependant pas se tenir à table. Ils mettent le pain dans leurs assiettes, mélangé à la sauce du ragoût. Ils se servent sans ôter leur couvert de dessus l'assiette, mettent leur verre à la place des carafons, etc. Les colonels en font autant, tous mangent peu ou pas de pain, même avec le fromage. Félix m'écrit qu'il a vendu sa coupe de St Ouen 22000 fr à Saintoyeu. Ce dernier m'avait offert 18 000 à adjudication. Tous ces marchands de bois sont des filous.
30. Je conduis René déjeuner à la Barre chez Trompette.
31. Henri Robert nous amène ses deux aînés à déjeuner pendant qu'Antoine a la rougeole.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire